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Ricky Álvarez, une beauté dans le coma

Par Markus Kaufmann
Ricky Álvarez, une beauté dans le coma

Perdu au milieu d'un profond dilemme contractuel entre l'Inter, Sunderland, la FIFA et peut-être bientôt Porto, Ricky Álvarez et son pied gauche voluptueux ressemblent de plus en plus à une beauté plongée dans le coma…

Juin 2011. Dans son bureau prestigieux du centre élégant de Milan, on imagine aisément Massimo Moratti prendre le temps d’observer la vidéo qu’on vient de lui faire parvenir : « Ricky Álvarez, Vélez Sársfield. » Les images défilent, et le Presidente se laisse charmer par un pied gauche aguicheur, une conduite de balle sensuelle et un toucher désinvolte. La beauté n’est pas encore maîtrisée ni disciplinée, elle est plutôt rebelle, gauche, presque maladroite. Mais cette façon de conduire le ballon ne ment pas : elle laisse assurément entrevoir une promesse d’amour à l’argentine. Entre deux signatures de contrats pétroliers, on devine l’imaginaire du président nerazzurro. Ricardo Álvarez est argentin. Gaucher. Milieu créateur. Il porte le prénom et l’allure de Kaká. Il fait croire à la surprise de Pastore. Il est capable d’inventer dans l’axe et de déborder sur le côté. Il vient de remporter le titre de champion d’Argentine. Et il joue pour une douce contrée nommée Vélez Sársfield, un nom qui s’articule en chuchotant.

Un an après le triplé et deux semaines après l’arrivée de Gian Piero Gasperini, l’Inter n’est ni grande ni folle, et Moratti a besoin de respirer un air recobesque. Si l’Inter doit vendre – et elle vendra – et ne peut acheter de grand nom, il faut faire des paris. Faisant confiance à sa faiblesse pour les pieds plus esthétiques qu’efficaces, ces organes agréablement talentueux, Moratti fonce. Et tant mieux si le reste de l’Europe refuse de s’aligner sur cette offre de onze millions d’euros. Ricky Maravilla est présenté comme une réplique argentine de Kaká et lorsqu’Álvarez place son premier double contact à San Siro, la place milanaise croit admirer une princesse prenant un café en legging. Un geste facile pour une beauté insolente.

De Trabzonspor à Sunderland

Mais dans une Inter où il a pourtant de la place pour séduire, les preuves d’amour se font rares. Un premier but qui attendra près de six mois, une étincelle contre Trabzonspor – c’est presque du mauvais goût –, puis une autre contre Lecce, et c’est tout. Après une première saison d’adaptation, Álvarez commence la deuxième comme s’il avait besoin de confirmer la déception. De beaux déhanchés provinciaux face au Chievo ou à Catane, sans plus. Des feintes de frappe sans la frappe qui suit, aussi. Et des cheveux qui s’arrachent en tribunes, par dépit. Pourtant, le talent de Ricky Álvarez n’est ni une femme trop maquillée ni une beauté qui se laisse aller. Il est bien plus mystérieux, torturé, insaisissable. Le pied gauche d’Álvarez ressemble alors plutôt à une princesse endormie que personne n’arrive à réveiller. Jusqu’au 24 février 2013.

Ce soir-là, dans le froid hivernal du Nord de l’Italie, un crapaud vient embrasser la princesse : Ezequiel Schelotto marque dans le derby. Inspiré, Álvarez retrouve des couleurs et offre enfin la lumière du jour à sa semelle gauche. Entre mars et mai 2013, l’Argentin marque 7 buts. La saison suivante, lorsque Walter Mazzarri et ses boutons de manchette s’installent en Lombardie, c’est Álvarez qu’il choisit pour faire office de « Hamšík du 3-5-2 » . Après une passe décisive pour Icardi contre la Juve à San Siro, tout le monde y croit. Mais cette Inter privilégie le bloc au mouvement, et Álvarez devient – aux côtés de Palacio – une lueur de créativité au milieu d’un désert compact de jeu. Seul moteur des relances milanaises, l’Argentin signe un bilan de 4 buts et 8 passes décisives. Assez pour faire croire à l’Argentine qu’il pourra débloquer une rencontre fermée du Mondial brésilien, mais insuffisant pour faire rêver Moratti, qui voit de loin son fantasme s’éteindre. Pour relancer le charme, l’Argentin est envoyé en prêt en Angleterre. Là-bas, dans le Nord, les atouts de son pied gauche partent réchauffer Sunderland. Et puis…

De Sunderland au vide

« Bip – Bip – Bip – Bip – Bip… » À peine réveillé, le talent d’Álvarez replonge, dévoré par la Premier League. Cette fois-ci, le docteur annonce froidement un coma sans raison apparente. Ricky Álvarez ne joue pas. Certes, il ne parle pas anglais. Mais de toute façon, son entraîneur est uruguayen. Seulement, la bonne volonté de Gustavo Poyet ne suffit pas face au désespoir ambiant : les yeux dans le vide, les supporters de Sunderland voient Álvarez perdre un à un ses duels comme s’ils entraient tour à tour dans une chambre d’hôpital pour faire le constat de son coma. Dans le couloir aseptisé, entre une machine à café au goût de fer et une cantine qui donne de la nourriture en plastique, l’espoir est irrécupérable. Il y aura un sursaut, pourtant. Un frisson, même. Contre Fulham, alors en seconde division anglaise, Ricky sort de l’aile droite pour pénétrer dans la surface sur son pied gauche. Enchaînement de feintes, crochet extérieur et frappe. But, enfin. Le tour de magie est crédible et l’illusion efficace. Dans la chambre, les proches et la famille croient au réveil. Mais le talent d’Álvarez ne bronche pas et traverse la Premier League comme un talent sans inspiration. Cinq titularisations et huit bouts de match, et pas un frisson de plus. Et à la fin de la saison, personne ne se bouscule pour croire au réveil.

Alors que Sunderland est lié à une option d’achat obligatoire de onze millions de livres, le club anglais quitte l’hôpital sans regarder derrière soi, prétextant l’annulation du contrat du fait d’une blessure au ménisque. Tel un jouet avec un défaut de fabrication, Álvarez devient indésirable. L’Inter, elle, s’en remet à la FIFA, sorte de puissance diaboliquement divine dans cette histoire. En septembre, alors qu’Álvarez s’entraîne seul à Buenos Aires et que le mercato européen est terminé, San Lorenzo vient taper à la porte avec un remède : une saison de championnat argentin et la promesse d’un temps de jeu salvateur. Mais la FIFA refuse : d’après une règle aussi incontournable qu’insensée, Álvarez doit jouer pour un club européen cette saison. Après un curieux sommeil, les blessures récurrentes, l’adversité et sa propre inconstance, Ricky Álvarez doit faire face aux obstacles de la bureaucratie. Ces dernières semaines, Porto a donc tenté le coup. Tel un faiseur de miracles ou un opportuniste au flair avéré, le club Portugais semblait tout près de faire venir l’Argentine cette semaine. Mais le Dragon souhaiterait être assuré que ni l’Inter ni Sunderland ne puissent venir réclamer quelques millions sur le dos de la princesse endormie…

Les notes de Koh-Lanta : la tribu maudite

Par Markus Kaufmann

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