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RFC Liège : Le géant endormi

Par Julien Duez
RFC Liège : Le géant endormi

Cette deuxième étape du Tour 2017 se terminera par un sprint massif dans les rues de Liège. La Cité ardente a déjà été ville-étape à de multiples reprises, comme un témoignage de reconnaissance à son public mordu de vélo, mais aussi de football. Ce sont d'ailleurs les créateurs de la Classique Liège-Bastogne-Liège qui ont donné naissance au RFC Liège, premier champion de Belgique de l'histoire. S'il végète aujourd'hui en D4 dans l'ombre de l'ogre du Standard, le FC Liégeois se présente comme une alternative locale au football moderne, tout en caressant le rêve de retrouver un jour le plus haut niveau.

En 1892, des membres de la Liège Cyclist’s Union – à laquelle on doit également la première édition de la Doyenne des Classiques, Liège-Bastogne-Liège – décident de créer un club pour pallier le manque d’activité vélocipédique pendant les rigoureux mois d’hiver. Le Football Club de Liège est né. Comme souvent à l’époque, les fondateurs ont un lien avec l’Angleterre et ceux-ci rapportent les couleurs de leur club de cœur, ici le rouge et le bleu de Dulwich Hamlet, une modeste équipe du Sud de Londres qui évolue aujourd’hui en D7. Trois ans plus tard, les Sang et Marine participent à la création de la Fédération belge de football, et remportent dans la foulée le premier championnat de l’histoire. « À jamais les premiers » , mais version XIXe siècle.

Un chat noir couleur Sang et Marine

Quelques années plus tard, une scission a lieu entre membres laïcs et catholiques. Ces derniers partent fonder leur propre équipe : le Standard, dont le nom s’inspire, une fois n’est pas coutume, du Standard Athletic Club, une structure omnisport parisienne, dont la section football a disparu dans les années 1930. Ironie du sort, ces nouveaux venus jouent leurs premiers matchs avec des maillots away prêtés par… le FC Liège. La couleur rouge restera, à l’image de la rivalité entre les deux clubs, bien que chacun ait connu une fortune différente au fil du temps. « Les supporters restent viscéralement attachés à ce club, parce qu’il a une histoire riche, des histoires folles, des souvenirs européens et un des plus beaux palmarès du pays (le sixième parmi les clubs encore en activité, ndlr) ! Cinq titres, une coupe de Belgique et une Coupe de la Ligue, les deux tiers des clubs de Jupiler League ne peuvent qu’en rêver de loin. Cela ne donne aucune garantie d’avenir ou de passe-droit, mais ça force le respect. Le maillot a un certain poids » , s’émeut Raphaël Schmitz, trésorier du club de supporters Johan 1982, et qui compte trente ans de tribunes dans les pattes.

Pendant des décennies, le FC Liège joue ses matchs dans le quartier de Rocourt, sur la pelouse d’un vélodrome qui a accueilli plusieurs éditions des championnats du monde de cyclisme sur piste. Jusqu’à sa destruction en 1997, pour laisser place au plus grand complexe cinématographique de Wallonie. Un exil qui force le club à disputer dès 1994 certaines rencontres dans des villes voisines et même au stade de Sclessin, chez le rival du Standard. « Notre direction a bien vite changé d’avis tant le stade était désert. Je pense qu’on y a joué un Liège-Anderlecht devant 4000 personnes alors que la saison précédente il devait y en avoir 20 000 de plus » , se souvient David Ambrosio, supporter lui aussi depuis presque trente ans.

En 2017, le club a fêté ses 125 ans avec un retour sur ses terres. De quoi regarder dans le rétro et constater qu’en dépit du joli palmarès glâné au fil du temps, le FC Liège a également connu la poisse, surtout au moment de fêter ses anniversaires : premier quart de siècle gâché par la Première Guerre mondiale, tandis que la seconde fait de même avec les cinquante ans. Les soixante-quinze ans, eux, sont marqués par le décès du secrétaire du club dans un accident de la route à quelques heures d’un match de gala face à l’Ajax Amsterdam. Quant au centenaire, il voit le président de l’époque, André Marchandise, démissionner et le club s’enfoncer dans une crise tant financière que sportive. Dès lors, les attentes étaient grandes pour fêter les 125 ans. D’autant que Liège était à un cheveu de la montée en D3. Mais la victoire finale passe sous le nez du « Great old wallon » et ce sont les Flamands d’Alost qui compostent le ticket gagnant. « On devrait sortir des T-shirts avec un grand M sur l’épaule droite » , se marre David Ambrosio, cinéphile dans l’âme.

Le supplice du coït interrompu

En parallèle, le Standard, lui, a réussi à s’imposer comme un cador de l’élite belge. Bien que les deux formations liégeoises ne se soient plus affrontées en match officiel depuis 1995, la rivalité n’a pas complètement disparue. « Avec notre chute dans les bas-fonds du football, les Standardmen sont de plus en plus souvent appelés « les Liégeois » par la presse et le match face au Sporting de Charleroi est devenu un derby alors qu’il y a plus de cent bornes entre les deux, déplore Raphaël Schmitz. Les plus belles rivalités sont souvent celles entre les clubs d’une même ville ! On se considère toujours comme les « vrais » Liégeois, le chant « Liège c’est nous » a beaucoup de succès. Pour être honnête, le Standard a le nombre pour lui, mais nous avons assurément le public le plus fidèle. Si nous remontons un jour les titiller, la rivalité refera son apparition aussitôt. » David Ambrosio approuve : « Quand j’étais ado, je devais surveiller mes arrières à chaque fois que j’allais en ville tant la rivalité avec le noyau dur du Standard était vive. Maintenant, je suis serein. Il y a un certain respect entre nous, notamment grâce au travail qu’on a pu faire au niveau politique pour fermer leur gueule aux fachos qui étaient dans nos tribunes. »

Car à défaut d’être sportivement au premier plan, le public du FC Liège a entre-temps développé une ligne politique marquée à gauche. « Au début des années nonante, notre tribune était connotée de droite, après les agissements de quelques idiots noyautés par le groupuscule fasciste Agir, grince Raphaël Schmitz. Une scission a d’ailleurs eu lieu entre fascistes et antifascistes, mais il a été difficile de se défaire de cette étiquette. À force de réagir aux comportements inappropriés, la tendance s’est inversée. Des fans ont invité des réfugiés aux rencontres du FC Liège, nous sommes amis avec les supporters du Cercle de Bruges et de l’Union Saint-Gilloise qui comptent beaucoup d’antifas. Nous avons aussi des contacts avancés avec l’AEK Athènes. Le combat n’est pas fini, mais nos idées avancent. Même les fans du Standard (dont les ultras sont également marqués à gauche, ndlr) ont compris que nous sommes leurs rivaux sportifs, pas politiques. »

En attendant la reprise du championnat, le FC Liège peut compter sur un public toujours plus nombreux à venir encourager le quatrième plus vieux club du royaume, que le temps n’a jamais réussi à terrasser. « Si nous sommes champion de Belgique une fois durant ce siècle – on peut rêver – nous serons le seul club à avoir gagné un championnat sur trois siècles différents, prophétise David Ambrosio, qui garde encore un goût amer de la montée ratée en D3. C’est une énorme frustration. Chaque année on a droit au supplice de la douche écossaise ou du coït interrompu. On aspire tous à ce que le RFCL retrouve la place qui est la sienne, en haut de la hiérarchie, même si je suis conscient que cette confrontation avec le football moderne va elle aussi amener une grande frustration. Fini de faire ce qu’on veut, ou presque, en tribune : regarder le match debout avec deux bières en main et un pétard en bouche pour les fumeurs. »

Vivre avec son temps sans laisser de côté son passé populaire, tel est le défi qui attend les Liégeois avant leur 150e anniversaire. « Venir à Rocourt, c’est vivre une autre facette du foot, loin du business et des sociétés de paris sportifs. C’est un peu le Max Havelaar du ballon rond : ça sent la bière, les frites et la transpiration » , conclut Raphaël Schmitz, qui ira regarder passer le Tour dimanche. Non sans une pensée pour les ancêtres qui écrivirent dans la Cité ardente le premier chapitre d’une glorieuse page du sport belge.

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Propos recueillis par Julien Duez.

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