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Retour sur la première soirée de Ligue des champions des supporters du Stade rennais

Par Clément Gavard, à Rennes
Retour sur la première soirée de Ligue des champions des supporters du Stade rennais

Le Stade rennais n'aura pas réussi à transformer son baptême du feu en triomphe en Ligue des champions, mais les supporters bretons n'ont pas eu besoin de ça pour vivre l'évènement à fond dans un contexte de crise sanitaire.

Sous la pluie bretonne, ils ne sont plus qu’une poignée à patienter devant la sortie du parking réservé au personnel et aux joueurs du Stade rennais. Il est minuit passé, le coup de sifflet final de la partie contre Krasnodar a retenti depuis plus d’une heure, mais ces fidèles habitués ne sont pas rassasiés. Avant de rentrer, ils espèrent un mot, ou tout simplement un geste, de Julien Stéphan, Eduardo Camavinga ou d’un autre Rennais. Plus loin, dans la nuit noire, le clapotis des gouttes de pluie sur la Vilaine brise un silence presque pesant. Seules les lumières du Roazhon Park rappellent qu’un match de foot vient de se jouer ici. Un peu plus loin encore, en face de la tribune Mordelles, les derniers irréductibles du Roazhon Celtic Kop sont décidés à poursuivre la soirée de rêve ensemble, quitte à ce qu’elle se termine tard dans la nuit. Après tout, il faut profiter. Rennes n’a pas gagné, c’est vrai, mais la frustration du résultat ne peut pas enlever le plus important : le club breton a pu goûter à la Ligue des champions pour la première fois de son histoire. Et cela a suffi à rendre cette journée inoubliable.

La route des étoiles

Dans le centre-ville de Rennes, ce 20 octobre ressemble presque à un mardi banal. Si l’hôtel de ville, le couvent des Jacobins et quelques commerces affichent les couleurs rouge et noire, les passants vêtus de la tunique du SRFC sont rares. Un joggeur par-ci, un jeune homme par-là. Pour saisir l’importance de cette journée, il faut aller jeter un coup d’œil un peu plus à l’ouest, à quelques encablures du Roazhon Park, où les ultras du RCK donnent le ton avec une série de banderoles déployées sur des ponts bretons : « 5000 au stade, mais toute la ville avec vous », « Pour tes couleurs, notre ferveur est éternelle » ou encore « Tout le peuple rouge et noir est derrière vous ». Dans quelques heures, le Stade rennais va découvrir la Ligue des champions, et les supporters attendent ce moment depuis trop longtemps pour ne pas le vivre pleinement. Il y a cette plongée dans l’inconnu et les petites habitudes : les journées interminables (et peu productives) au travail, les films dans la tête ou les rendez-vous avec les copains.

Sur la route du stade, justement, les maillots fleurissent au fil des minutes qui passent. Les terrasses des bars du Mail, la place rennaise à la mode, se remplissent tout doucement. Il est un peu plus de 17 heures quand la musique de la Ligue des champions sort du téléphone d’un client de La Piste, provoquant les sourires des tables voisines. Toutes les discussions ou presque tournent autour du match à venir. « Je te rappelle que c’est un euro la minute ce soir, donc il va falloir profiter ! » lâche Gaëtan sur le ton de la vanne à Kevin, qui a déboursé 95 euros pour pouvoir assister à l’affiche Rennes-Krasnodar. « En même temps, c’est la première, je ne pouvais pas la rater », glisse le principal intéressé. Les premières bières descendent, sans que les restrictions sanitaires ne soient négligées. « Je suis vraiment désolé, mais vous êtes sept et on n’a pas le droit de laisser plus de six personnes à la même table depuis les dernières mesures », regrette un serveur. Peu importe, l’heure est venue de poursuivre les festivités aux abords du stade.

Les sens de la fête

Pour la première fois de la saison, la route de Lorient est vivante à plus de deux heures du coup d’envoi d’une rencontre du Stade rennais. Le bruit, les gens, les couleurs rappellent aux romantiques et à tous les autres la douce époque pré-coronavirus, quand les masques n’étaient pas de rigueur et les règles de distanciation sociale inexistantes. De la présence et une absence : celle de la fameuse odeur de la galette-saucisse, qui flotte habituellement dans l’air les soirs de match. Tant pis pour les papilles. Les effluves de houblon se chargent en tout cas de combler les narines, avant que le RCK n’en mette plein les mirettes au staff et aux joueurs du Stade rennais, dont le car est accueilli sur la rocade par des fumigènes en pagaille transformant la grisaille du ciel rennais en rouge écarlate le temps de quelques minutes. « Notre arrivée en bus a donné le tempo de la ferveur, et de l’attente que pouvaient avoir les gens pour ce match », rembobinera Julien Stéphan quatre heures plus tard, à l’issue de la rencontre. Le technicien rennais n’est pas non plus passé à côté de l’ambiance phénoménale à l’intérieur de l’arène.

Les plus ponctuels n’attendent pas la dernière heure pour rejoindre l’intérieur du stade, et ils ont la chance de pouvoir entendre une première fois l’hymne de la Ligue des champions, déjà accueilli par des applaudissements et un brouhaha d’excitation. L’émotion sera plus contenue une heure plus tard, quand la mélodie résonnera officiellement pour la première fois à l’entrée des joueurs. « La musique finalement, ça ne rendait pas super bien de dehors, le son n’était pas très fort », souffle Hugo, qui a tendu l’oreille à travers les grilles du Roazhon Park à défaut de décrocher un précieux sésame. Les 5000 chanceux, eux, auront donné de la voix pour tous les absents pendant plus de 90 minutes.

Il y a eu l’habituel boxon de la 35e minute, l’explosion sur l’ouverture du score de Serhou Guirassy et la douche froide quatre minutes plus tard sur la sacoche monstrueuse de Cristian Ramirez. La tribune Lorient – plus connue sous le nom de Super U pour les amateurs de sponsors – aura suivi le kop de la Mordelles jusqu’au bout. Même après le coup de sifflet final, quand les regrets rennais n’ont pas empêché les supporters d’applaudir leurs héros. « Pendant la rencontre, pfiou, il y a eu du bruit comme s’il y avait 15 000, 20 000, 25 000 personnes dans le stade, racontera Stéphan dans les coursives du Roazhon. C’était incroyable, c’était très porteur pour tout le monde. Et si on a fini aussi fort, c’est aussi grâce à l’appui de ce public, qui a été sans cesse derrière nous, à nous encourager et nous pousser. Et pour lequel on aurait vraiment aimé marquer ce deuxième but parce que ça aurait aussi récompensé la qualité de leur match. » À l’exception de quelques solides, bien décidés à vivre l’évènement sur place, les supporters rennais n’auront pas le bonheur de retrouver l’Andalousie la semaine prochaine pour retourner la ville de Séville comme en 2019. Mais il leur restera le souvenir de cette soirée. Et la perspective de celles à venir.

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Par Clément Gavard, à Rennes

Tous propos recueillis par CG

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