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  • Coupe de France – Finale – Stade rennais/EA Guingamp

Rennes – Guingamp : la finale des clichés

Par Régis Delanoë
Rennes – Guingamp : la finale des clichés

Il y a ceux qui s'en réjouissent : ils habitent majoritairement le Nord-Est de la Bretagne, c'est-à-dire un petit territoire. Et puis il y a les grincheux et les moqueurs, qui ne manquent pas de commenter cette nouvelle finale de Coupe de France 100 % bretonne de petites piques plus ou moins méchantes et de remarques acerbes. Sont-elles justifiées ? Voyons voir ça…

« Le Stade rennais est un club de losers »

C’est l’éternelle rengaine entendue depuis quelques années s’agissant du SRFC et son incapacité à soulever un trophée. Certains sur les réseaux sociaux se sont même amusés à dire qu’à force de perdre les finales, les Rennais devaient se contenter de fêter leurs qualifications au stade des demi-finales, comme en atteste l’envahissement de stade qui a suivi la victoire face à Angers l’autre jour… Rappelons que le club d’Ille-et-Vilaine a remporté deux fois la Coupe de France en 1965 et 1971. Depuis, plus rien, malgré deux récentes finales au Stade de France : en Coupe de France, déjà face à Guingamp, en 2009, et en Coupe de la Ligue face à Saint-Étienne la saison dernière. Il y a aussi eu ces sorties un peu honteuses, comme en demi-finale de Coupe de France face à Quevilly en 2012. Et puis en championnat, Rennes a parfois flirté avec le podium et une qualification pour la Ligue des champions, sans jamais réussir à conclure, malgré les moyens considérables des propriétaires, la famille Pinault. Un soutien financier qui devient un facteur aggravant quand le palmarès reste inchangé. Mais pourquoi diable avoir autant d’argent à disposition et ne jamais réussir à gagner un trophée ?

Verdict : oui quand même, Rennes a la lose depuis quelques années, difficile de le contester. Mais une victoire ce samedi et cette réputation peut aisément disparaître. Pouf.

« Et l’EA Guingamp un club de paysans »

Des paysans, des ploucs, voire des bouseux pour les plus acerbes des commentaires : voici l’image caricaturale que renvoie l’En Avant Guingamp. Dans un schéma qui représenterait le football pro français, si le PSG figure à une des extrémités, Guingamp se situe alors à l’autre : un bourg d’un peu plus de 7 000 habitants situé dans la Bretagne rurale, une image très old school revendiquée, des joueurs au contact direct du public, un budget modeste… L’EAG cultive son côté foot de terroir. Mieux, il le revendique à tous les niveaux. Bertrand Desplat, le président, ne manque jamais l’occasion d’en parler dans les médias (quitte à grossir exagérément le trait au point d’agacer), et les supporters chantent volontiers « Les paysans sont de retour » à Roudourou. Autrefois utilisé par les rivaux pour blesser, le coup des tracteurs et des sabots est désormais largement utilisé par le Kop Rouge dans ses tifos.

Verdict : oui, même s’il ne faut pas tomber dans la caricature. Si Guingamp joue les modestes, c’est aussi une posture qui lui va bien pour mieux surprendre l’adversaire et se constituer une image rassembleuse et pratique, alors qu’en vrai beaucoup de clubs en France peuvent lui envier ses infrastructures et son organisation. Petit, Guingamp ? Oui, mais plus costaud que la commode image d’Épinal.

« Le public rennais est froid »

Un autre grief persistant concernant le SRFC : le public du Stade rennais serait l’un des pires de France. Un public froid, distant et exigeant, toujours prompt à siffler ses joueurs quand le résultat n’est pas favorable plutôt qu’à les encourager à renverser la situation. La vérité apparaît bien plus subtile. Prenons les chiffres déjà. Rennes possède cette saison la huitième affluence de L1. Il a même eu la sixième lors de certaines des saisons dernières. Le taux de remplissage est un peu moins glorieux : quatorzième de l’actuel exercice. Bilan : bien, mais peut mieux faire. Le club en est conscient et multiplie d’ailleurs les campagnes de pub rigolotes pour attirer plus de monde au stade. Mais il semble que c’est de belles épopées et de trophées qu’il manque, encore et toujours, pour générer plus d’enthousiasme autour de ce club. Potentiellement, il a du public prêt à s’enflammer, mais il a connu tellement de désillusions passées qu’il est normal qu’il soit plus difficile que la moyenne des publics avec, il est vrai, une majorité de petites ambiances les soirs de L1. Quelques exemples récents ont montré qu’il pouvait quand même y avoir un public très chaud route de Lorient, comme en septembre 2011 avec la réception de l’Atlético Madrid en C3 (1-1). Et puis le virage du Stade de France pour cette finale face à Guingamp a été rempli en une poignée d’heures, avec d’impressionnantes files d’attente à la billetterie. Preuve que, quand l’événement est là, les supporters savent se montrer à la hauteur (eux).

Verdict : clairement pas le public le plus chaud de France, mais dans la moyenne, ce qui est déjà pas mal étant donné la frustration accumulée.

« Guingamp est protégé par Le Graët »

Côté guingampais, la ferveur du public n’est jamais remise en cause. Il figure assez largement en tête du championnat de France des tribunes. Mais une rengaine revient très souvent, surtout lorsque l’équipe costarmoricaine a une décision arbitrale en sa faveur. « Oui mais forcément, Guingamp est protégé, c’est le club de Le Graët » , ou ce genre de commentaires. Des réactions de jaloux aigris ? Difficile de trancher concernant ce cliché tenace… Ce qui est sûr, c’est que l’incroyable ascension de l’EAG dans le foot pro s’est faite sous la présidence de l’actuel boss de la FFF. Et son influence à Guingamp est impressionnante : il a été maire de la ville, son premier employeur et a donc permis à cette petite sous-préfecture de connaître une médiatisation hors du commun par l’entremise de son club de foot. A-t-il favorisé ce dernier en profitant de son pouvoir grandissant au sein du foot français ? Président de la Ligue dans les années 90, il n’aurait rien fait pour aider les voisins Brest et Saint-Brieuc, alors en proie à des déboires financiers. Pour mieux laisser le champ libre à l’EAG ? C’est le point de vue de ses détracteurs, certains allant assez loin dans la théorie du complot. La remontée de Guingamp depuis le National ces dernières saisons ne semble en revanche souffrir aucune contestation et elle est due en partie au travail de l’entraîneur Jocelyn Gourvennec, que Le Graët a eu la bonne idée d’aller chercher en DH. Verdict : tant que Noël Le Graët ne sera pas en retraite et gardera de sa redoutable influence, l’EA Guingamp semble condamné à évoluer avec la suspicion permanente et à se trimballer son lot de haters.

« Petite affiche, petite ambiance » / « Cette finale n’intéresse personne hors de Bretagne »

Dans son émission quotidienne jeudi soir sur RMC, Vincent Moscato a vexé les supporters rennais et guingampais en estimant que cette finale était une petite affiche qui n’intéressait pas grand-monde. C’est cru et cruel, même si dans le fond, il y a un peu de vrai. D’ailleurs, pas loin de là, à Brest, on se moque pas mal de ce match et de tout le décorum BZH qui l’entoure.

Ce n’est qu’un derby parmi d’autres en Bretagne et la guéguerre s’avère bien plus farouche entre Rennes et Nantes ou entre Guingamp et Brest qu’entre Rennes et Guingamp, qui entretiennent une rivalité plus récente et bien plus cordiale. En revanche, niveau ambiance, les beurres-salés savent y faire et la finale de 2009 est restée dans les mémoires en grande partie grâce à ça. Ce samedi, ça devrait être pareil, les billets se sont arrachés et le match se jouera à guichets fermés dans un stade en rouge, noir et blanc, les couleurs dominantes des deux équipes plus celles du Gwenn-ha-du, le fameux drapeau de la région. Verdict : oui, probable que cette affiche ne passionne qu’un nombre assez restreint de personnes ; mais non, ça ne veut pas dire qu’il n’y aura pas d’ambiance, il devrait même y en avoir comme rarement. La dernière fois pour une finale de Coupe de France, ça devait même être justement en 2009… Niveau audience, cette finale d’il y a 5 ans se situe dans la bonne moyenne, avec 5,7 millions de téléspectateurs et 28,4 % de parts d’audience, contre 4,5 millions et 19,3 % de parts d’audience par exemple pour la dernière finale Bordeaux-ETG.

Dans cet article :
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Par Régis Delanoë

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