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Rémy Descamps : « J'aimerais être un anonyme pour nettoyer les plages »

Propos recueillis par Jérémie Baron, à La Chapelle-sur-Erdre

Après avoir solidement assuré l'intérim dans la cage du FC Nantes pendant la convalescence d'Alban Lafont, en fin d'été, Rémy Descamps (27 ans) a retrouvé sa place de n°2, mais continue de briller sur un autre terrain : celui de l'écologie. Avec Doxa, la marque de vêtements « éthiques » qu'il vient de lancer avec deux amis, le portier passé par le PSG revendique un véritable engagement environnemental.

Rémy Descamps : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J'aimerais être un anonyme pour nettoyer les plages<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

La promesse de votre marque, c’est de miser sur des matières bios, minérales et végétales plutôt que chimiques.

Le durable, quoi. C’est notamment au niveau de la teinture, qui est là aussi naturelle, donc plus éthique. L’entreprise avec laquelle on travaille au Portugal est soucieuse de l’environnement. À la base, on voulait faire quelque chose de local, en France, sauf qu’on n’a pas été pris très au sérieux. Pour lutter contre la fast fashion, on veut faire quelque chose qui peut entrer dans la garde-robe de tout le monde, et qui dure. La teinte naturelle, c’est le futur de nos vêtements. On a commencé un autre projet, c’est de récolter le marc de café pour essayer d’en faire une teinture. Ça peut aussi être les peaux de banane ou les noyaux d’avocat… On veut avancer, amener une réflexion.

De ton côté, tu essaies d’avoir une consommation de vêtements « raisonnée » ?

J’essaie de ne pas consommer en permanence. Chez H&M ou Zara, il n’y a pas grand-chose qui dure dans le temps, donc je n’y vais plus du tout. Consommer du H&M ou du Zara, c’est être d’accord avec leur mode de production. Ce n’est pas du tout ce en quoi on croit.

Parfois, je ne me sens pas à ma place pour parler d’écologie.

Le fait d’avoir passé plusieurs années en Auvergne, par exemple, ça t’a donné un rapport particulier à la nature ?

Je viens de Lille, une grande métropole. L’écologie, c’était lointain pour nous. Après, je suis parti à Bagnères-de-Luchon, en plein milieu des Pyrénées, dans une académie de gardiens. Et là, on vit avec la nature, on est dépendant d’elle, on est entouré par les montagnes et on voit ce que le dérèglement climatique provoque réellement. J’ai vraiment pris conscience de ça à Luchon vers l’âge de 15 ans, et à Clermont, avec les volcans et ce côté rural, je suis resté dans ce mode de pensée. À Lille, j’ai des voisins agriculteurs, qui sont tout autant dépendants de la nature. On avait des discussions avec eux autour du développement durable. Dans l’agriculture, il y a aussi beaucoup de choses à faire, même si les produits bios prennent de plus en plus de place dans les supermarchés.

Tu essaies de consommer bio ?

J’essaie de faire attention à tout ce que je consomme. Après, on mange beaucoup ici (au centre d’entraînement de la Jonelière) ou à l’hôtel. Ça n’est pas évident, en tant que footballeur, d’avoir une conscience écologique, parce que tous nos déplacements sont orchestrés par le club. On prend l’avion un week-end sur deux, quand on joue à l’extérieur. Parfois, je ne me sens pas à ma place pour parler d’écologie. On n’a pas l’étiquette d’écolo, au contraire. Ça fait partie de mon cheminement, d’essayer de montrer la bonne voie. Il y a deux ans, je me suis rapproché d’une association sur Nantes, mais ce n’est pas évident. Parfois, j’aimerais quasiment être anonyme pour pouvoir aller ramasser des déchets le long des plages. Moi, je m’en fous, qu’on parle de moi. Je veux juste que le mouvement soit mis en avant.

C’est compliqué de s’investir concrètement dans une cause, en tant que footballeur ?

Dès que je vais parler à une association, la question va être de comment utiliser au mieux mon image. On va me demander d’aller faire des conférences dans des facs, aller voir des enfants pour leur parler de la cause écologique. Mais on ne me demande pas de faire des choses « simples » comme un simple citoyen qui veut aider sa planète. On peut aussi faire des choses sans avoir à porter le mouvement tout le temps.

Idéalement, je voudrais rouler avec de l’énergie verte. Mon rêve absolu, c’est d’avoir une maison autonome à la montagne, au bord d’un lac.

Aujourd’hui, tu roules en voiture électrique ?

J’ai récemment acheté une Tesla. Je roulais en Mercedes, et je l’ai gardée six ou sept ans, ce qui est déjà rare pour un footballeur. Comme je ne fais que des trajets domicile-travail, c’est facile pour moi. Les plus longs trajets, je les fais en train, je n’ai pas trop besoin de la voiture. Chez moi, je vais mettre des panneaux solaires que je vais pouvoir emmener à chaque déménagement. Idéalement, je voudrais rouler avec de l’énergie verte. Mon rêve absolu, c’est d’avoir une maison autonome à la montagne, au bord d’un lac, et d’être tranquille. (Rires.) Ce sera après, quand je pourrai me poser quelque part.

Il y a d’autres résolutions dans ce sens que tu as prises ?

Ça m’est arrivé de venir à l’entraînement à vélo, même si j’habite loin, à 20 kilomètres d’ici ! C’est un vélo de route, mais il faut que j’envoie un peu.

Sur tes trajets perso, tu privilégies au maximum le train, par rapport à l’avion ?

L’avion, je le garde vraiment une fois par an. Quand je dois aller à Paris ou Lille, pour retrouver ma famille ou ma compagne, j’y vais en train. Et quand j’arrive à Paris, je loue un vélo et je fais tout avec. J’ai même pris une amende en vélo, avant-hier (interview réalisée en octobre, NDLR), parce que j’avais mon casque audio !

Ça reste très rare au FC Nantes, de prendre le train ?

La saison dernière, je pense qu’on a pris une fois le train. Après, pour les déplacements plus courts, on prend le car : Rennes, Lorient, Brest, Bordeaux, Angers… Quand on va à Paris, prendre l’avion c’est un peu n’importe quoi. On met autant de temps, avec les check in etc. à l’aéroport, que de prendre le train qui te pose en ville tout de suite.

Est-ce que vous faites partie de ces discussions, au club ?

Ce sont des décisions prises par routine. Ça fait quinze ans qu’on prend l’avion, certains ne voient pas pourquoi on devrait changer ça, alors que la question écologique devrait faire partie de l’équation. J’adorerais que Nantes soit précurseur sur cette question. Ça ne ferait de mal à personne, et ça ne changerait pas grand-chose à notre routine de footballeur. Mais ce n’est pas du tout nous qui prenons les décisions.

Tu penses que tes coéquipiers, ou les joueurs que tu croises en match, sont sensibles à cette cause ?

Dans le monde pro, beaucoup de joueurs viennent du bassin parisien et n’ont pas été confrontés à cette réalité. Ils peuvent même voir cela d’un œil négatif. C’est plutôt ça que j’aimerais faire changer dans un premier temps. Je sais qu’en m’affichant en tant qu’écolo, on va me faire des réflexions. Mais c’est à moi de m’en servir pour amener le sujet, pouvoir en parler, changer la réflexion.

Est-ce que j’irais faire une manifestation devant l’Assemblée nationale ? Je ne suis pas sûr.

Tu as lancé le projet Doxa avec deux amis rencontrés au Clermont Foot. Tu peux nous parler de cette amitié ?

Adrien (Brun, aujourd’hui joueur de Moulins Yzeure en N3) et moi étions ensemble à l’école, et on jouait au foot avec Guillaume (Marques, qui évolue maintenant à Perly-Certoux en D5 suisse), donc on était souvent ensemble. On aime la mode, comme tout footballeur qui se respecte (rires), mais on gardait toujours en tête de trouver des habits qui durent. On avait cette éthique-là de ne pas acheter pour acheter, d’essayer de trouver des pièces qui vont durer. Entre nous, ça n’a jamais été mal vu de parler d’écologie, au contraire. Je suis quelqu’un qui adore le monde rural. Ce projet, c’est une manière de rendre ce que nous donne la nature. Au lycée, je voulais faire à la base un bac STI2D (Sciences et technologies de l’industrie et du développement durable), mais ça ne répondait pas vraiment à mes attentes et je me suis réorienté.

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D’ailleurs, tu habites plutôt à la campagne.

Ça ne m’a jamais dérangé d’habiter à la campagne, ça n’a jamais été une barrière d’habiter plus loin. Je veux une maison avec un jardin, parce que j’ai un chien, et j’aime aller me balader une heure ou deux, tous les deux jours. Forcément, il me fallait un cadre derrière. Ce que je trouve à Grandchamp (Grandchamp-des-Fontaines, commune de 7000 habitants, NDLR), c’est trop cool. J’ai un étang ou deux juste à côté de chez moi, j’ai tous les champs pour me balader, je suis royal.

Tu te considères comme militant ?

Quand on dit militant, j’ai l’impression que c’est négatif. Je suis plus porteur de valeurs écologiques, je tente de montrer la voie, je pense que ça fait partie du militantisme. Mais est-ce que j’irais faire une manifestation devant l’Assemblée nationale ? Je ne suis pas sûr.

On a vu beaucoup d’activistes écologiques interrompre des évènements sportifs ces derniers mois. En Premier League, certains s’accrochaient par exemple au poteau. De quel œil tu vois ça ?

Ils ne font pas ça dans les règles. Ce n’est pas que ça me gêne, mais je trouve que c’est mal fait. Vouloir faire la guerre à des gens qui n’ont pas ce système de pensée, c’est les brusquer et les conforter dans le fait de ne pas être écolo. L’année dernière, j’ai signé une pétition qui nous demandait de faire les voyages à Paris en train, par exemple. Et c’est ce qu’on a fait. C’est plus par ce biais-là, petit à petit, qu’on va y arriver.

Le Mondial au Qatar, le prochain qui sera joué sur trois continents, ça t’inspire quoi ?

Je suis totalement en désaccord avec ça. Là, le business prime dans ces décisions. Inscrire les questions éthiques et écologiques dans l’attribution de la Coupe du monde est très important, à l’heure actuelle. Quand je vois les derniers JO d’hiver (à Pékin, en février 2022), qui ont été disputés avec 100% de neige artificielle…

Voir Christophe Galtier ne pas du tout prendre au sérieux cette question écologique, ça t’a fait tiquer ?

Ça m’a choqué de voir que la réflexion n’était même pas prise en compte. Je peux comprendre que pour le PSG, prendre le train est injouable, au niveau de la sécurité. Mais répondre à cette question de cette manière, ça montre que la question écologique ne rentre pas dans l’équation. Comme si ça ne les concernait pas, alors que ça concerne tout le monde.

Dans cet article :
Nantes et Lorient respirent, Brest cale
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Propos recueillis par Jérémie Baron, à La Chapelle-sur-Erdre

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