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Rémi Serpaud : « La tribune lilloise hurlait « Tuez-le, Tuez-le ! » »

Propos recueillis par Emile Gillet
Rémi Serpaud : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>La tribune lilloise hurlait « Tuez-le, Tuez-le ! »<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

À la mi-temps de Lens-Lille, Rémi Serpaud voulait juste passer un coup de fil. Ce supporter installé en tribune Trannin s’est alors retrouvé, bien malgré lui, au milieu des débordements ultras et a perdu connaissance après avoir pris un siège sur le crâne. À froid, cet arbitre amateur fan des Sang et Or raconte les incidents dans les moindres détails. Du moins, ceux qui lui restaient...

Rémi, quelques heures après les incidents, comment allez-vous ?Ça va bien, je me suis remis. J’ai arbitré ce dimanche après-midi un match de Coupe de France (Calonne-Ricouart/Marles (2-0), NDLR), et je suis content parce que ça a tenu. (Rires.) Ça me tenait à cœur, je suis content d’avoir pu le faire. C’est l’essentiel, la vie continue.

Moi, je me mets dos aux Lillois et j’aide un papa à bouger son gamin pendant qu’ils quittent la zone tout en repoussant des supporters lensois. D’un coup, boum, je reçois un coup très violent à la tête. Je vois le siège par terre, à côté de moi, et je m’écroule dans un « black-out ».

Racontez-nous ce qu’il s’est passé pendant Lens-Lille.Samedi, je suis venu avec mon père et mon cousin, qui sont des supporters du LOSC, en tribunes Trannin au niveau zéro. Nos places étaient juste à côté du parcage lillois. Entre nous, il y a une zone tampon délimitée par des stewards. Sur l’avant-match et la première période, des insultes fusent, ça se provoque, ça se chahute, mais rien de transcendant. La mi-temps arrive. Je descends en bas de la tribune parce qu’en tant qu’arbitre, j’interviens régulièrement sur France Bleu Nord. Comme il y avait eu deux situations de main en première période, les journalistes voulaient avoir mon avis. Je suis en bas, j’attends l’appel et je vois que la zone tampon cède. Les stewards sont submergés, et les premiers Lillois commencent à escalader la grille qui nous séparait d’eux. S’ensuivent deux mouvements de foule : ceux qui veulent aussi en découdre et qui se précipitent vers les grilles, et les familles complètement paniquées qui fuient la zone de conflit avec des projectiles qui arrivent de partout. Au début, il y avait des drapeaux qui volaient, puis très vite d’autres choses. Moi, je me mets dos aux Lillois et j’aide un papa à bouger son gamin pendant qu’ils quittent la zone tout en repoussant des supporters lensois. D’un coup, boum, je reçois un coup très violent à la tête. Je vois le siège par terre, à côté de moi, et je m’écroule dans un « black-out » . Ensuite, j’ai des bribes de souvenir. Je me souviens par exemple avoir la tête en sang et qu’on m’évacue sur la pelouse où je suis alors pris en charge par les secouristes.

Et ensuite plus rien jusqu’à l’hôpital ?Après, c’est encore des bribes de souvenir. Je suis évacué et je me rappelle la tribune lilloise qui hurle : « Tuez-le, Tuez-le ! » lorsque je passe à côté. C’est à l’infirmerie que je regagne ma lucidité. Là, j’ai deux médecins au top, des secouristes et des pompiers qui m’ont très bien pris en charge en faisant une première surveillance comme j’ai été inconscient. Ce sont d’ailleurs eux qui m’ont tenu au courant du score et qui ont prévenu ma famille. Ma mère est traumatisée par ce qu’il s’est passé, elle ne veut plus aller au stade et mon père non plus. Mon cousin, lui, a pris un gros rouleau de chatterton dans l’épaule. On était contents d’aller dans un tel événement, de partager ça… Bref. Pour finir, j’ai été transporté vers le centre hospitalier de Lens où j’ai passé une partie de la nuit avant de regagner mon domicile tôt le dimanche matin.

Quel est le diagnostic des médecins ?Après être resté toute la nuit en surveillance, j’ai quatre points de suture sur la tête, un hématome et une suspicion de traumatisme crânien. Mais finalement, le scanner n’a rien révélé, aucune lésion, donc plus de peur que de mal.

On ne peut pas avoir ça sur un terrain, j’ai vu des gamins pleurer, l’un d’eux aurait pu prendre ce siège sur la tête.

Comment s’est passé le réveil ?Ce n’est pas tant le réveil, mais plutôt le moment où j’essaie de m’endormir sans y parvenir qui fut difficile. Parce que je me refaisais le match en permanence dans ma tête. C’est une expérience, j’estime ne pas être traumatisé, je vais m’en relever. Mais il faut que ça serve pour d’autres, qu’on ne revoie plus ça. La connerie n’a ni couleur ni blason. Je ne suis pas à la recherche d’un coupable ou dans une logique de vengeance. Ce qui importe, c’est que ce qui s’est passé hier ne se repasse plus jamais. On ne peut pas avoir ça sur un terrain, j’ai vu des gamins pleurer, l’un d’eux aurait pu prendre ce siège sur la tête.

Entre ça et les événements à Nice, l’image des supporters en France s’est détériorée ces dernières semaines…Oui, c’est vrai, mais il ne faut surtout pas généraliser. Hier, il y avait 40 000 personnes dans le stade et 38 000 d’entre elles n’avaient rien demandé et étaient là pour un moment de fête. Ce n’est pas une question évidente, mais c’est aux pouvoirs publics de trouver la juste mesure. Sanctionner tous les supporters pour finalement réprimander le comportement de quelques abrutis, pour moi, c’est un aveu d’échec. C’est-à-dire qu’on ne trouve pas la solution pour ces gens-là. Parce que les gamins de huit ans et les supporters qui respectent l’environnement subissent et vont se taper un huis clos. Tandis que les boubourses (idiots en ch’ti, NDLR) qui foutent le bordel, eux, ils reviendront.

Comment expliquez-vous que ça ait dégénéré ?Je n’ai pas d’explications. Je vais déposer plainte contre X demain (ce lundi, NDLR), donc j’aurai accès aux images, au dossier. Peut-être qu’on verra la genèse. Les Lillois qui ont brisé la zone de sécurité n’étaient pas nombreux, mais ce n’est pas la frange la plus sympa des ultras de Lille. Un peu comme les Lensois lorsqu’ils sont en déplacement. J’ai vu des saluts nazis par exemple, ces gars n’ont clairement rien à foutre là. Il y a cette minorité de Lillois qui a pété les plombs. Mais je ne veux pas trouver de coupables. J’ai entendu que les supporters lensois de la tribune Marek avaient envahi le terrain pour venir me protéger, mais je ne veux pas servir d’excuse. Ce n’est pas normal d’envoyer des chaises, ce n’est pas normal non plus d’envahir un terrain. L’enquête déterminera ce qu’il faudra améliorer, il faudra sans doute poser un filet pour éviter les jets de projectile.

Est-ce que ça vous a passé l’envie de revenir au stade ?Oh non. Je ne vais pas donner raison aux mecs dont le comportement est nul. Je vais y retourner, mais peut-être que je ne reprendrai pas de place à côté du parcage. On apprend de ses erreurs. (Rires.) Mais dès que je peux, j’irai voir un match de Lens. Après est-ce que j’emmènerai mes enfants à un Lens-Lille ? Non, je ne pense pas que ce soit la meilleure idée…

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Propos recueillis par Emile Gillet

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