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Rémi Dandoli, le PSG en Tanzanie

Par Florian Cadu
Rémi Dandoli, le PSG en Tanzanie

En Tanzanie, il existe un autre PSG : celui du Parisien Rémi Dandoli. Avec son association humanitaire Life Steppers, le Français a créé le Paje Safi Generation, une équipe d'enfants défavorisés, dans le petit village de Paje. Une région passionnée de football.

Zanzibar, Tanzanie. Une minuscule île autonome à l’est de l’Afrique, qui baigne dans l’océan Indien, au-dessus de Madagascar, en face de Dar Es Salam, la capitale tanzanienne. Au bord de l’eau et sous un soleil de plomb, ça tape le ballon dans le petit village de Paje. Parmi les joueurs, l’un se démarque par sa couleur de peau. Il est blanc, il est parisien et il s’appelle Rémi Dandoli. Cette scène a lieu presque quotidiennement depuis quelques mois et l’arrivée de Rémi à Paje. Quand il caresse le cuir, il troque son nom pour un pseudo plus connu : Marco Verratti. Comme l’Italien, Rémi est milieu défensif, petit, pâle. Il a moins de cheveux sur le caillou et dix années de plus. Et il a le PSG dans le cœur. Tellement que le Français a carrément créé son propre PSG, lui. Quand il a atterri à Zanzibar, il y a un peu plus d’un an, l’homme aux 35 balais a créé son association humanitaire de développement local, Life Steppers. Entre autres projets visant à aider les habitants de Paje, celui de regrouper des jeunes défavorisés dans une équipe de foot a rapidement vu le jour. « C’est en jouant au foot sur la plage avec les petits qu’on a eu l’idée, rapporte Rémi. Il s’agit de mômes un peu abandonnés, qui ne vont pas forcément à l’école. Ceux que personne ne veut, on les récupère dans notre équipe et on les récompense à notre façon. Du genre :« Tu joueras avec nous si tu vas à l’école. » »

Un « chauve » polyglotte

Rémi, alias Kipara ( « Le chauve » en kiswahili, langue parlée en Tanzanie), n’a pas oublié sa ville natale, son équipe s’appelle le PSG, pour Paje Safi Generation. Malgré les désaccords du début : « Là-bas, ils sont tous fans de Manchester United. Mais j’ai négocié pour qu’on s’appelle le PSG. On est pareils, on commence à devenir une grosse équipe… On a fait un logo avec les couleurs du PSG et un palmier. On est le PSG de Zanzibar, quoi ! Et médiatiquement parlant, ça peut être cool pour faire connaître l’équipe, quand je reviens en France par exemple. » Car pour faire vivre son club, Kipara doit trouver des fonds, du matériel à droite à gauche. C’est là tout le sens de son programme. Sans règle fixe, le blé provient d’un peu partout et nulle part. De ses propres économies réalisées grâce à son ancien job et la vente de son appartement parisien, mais surtout du tourisme. Ce que confirme Virginie Gourceaud, une Française qui vit à Paje : « Grâce aux touristes qu’il rencontre et qui viennent voir les matchs, il réussit à récolter de l’argent en leur expliquant le projet. Il a déjà obtenu pas mal de choses : des sifflets, des plots et des buts en plastique, des maillots, des protège-tibias, des ballons, des chaussures… Des trousses à pharmacie, aussi. » Même chose pour choper régulièrement des bouteilles ou des médocs : Rémi se bouge, varie entre les sept langues qu’il parle pour discuter et convaincre le curieux vacancier de lâcher un petit billet ou d’acheter lui-même de l’eau. Ce qui reste toujours insuffisant. Raison pour laquelle il a contacté le PSG pour récupérer un lot de maillots. Sans succès pour l’instant. « Les gosses, ça les fait kiffer de jouer avec le maillot de Zlatan ou Di María, reprend Rémi. Un maillot floqué, voilà, ça vaut tout l’or du monde pour eux. Les chaussures à la limite, on s’en fout, ils peuvent jouer pieds nus ! »

À Paje, et plus globalement à Zanzibar, les touristes peuvent chaque jour observer l’omniprésence du football. Comme dans beaucoup de régions touchées par la pauvreté, le ballon rond est institutionnel et constitue un défouloir pour la population, notamment pour les enfants. Les gens vivent au rythme du foot. Paje, qui dénombre environ 2500 habitants seulement (dont un petit millier d’enfants), compte sept équipes officielles chez les adultes. Sans compter les équipes officieuses lors des tournois organisés à l’arrache (celle des célibataires, des hôteliers, des conducteurs…). « C’est quelque chose d’incroyable, témoigne Rémi. Balancez un ballon crevé dans la rue, tout le monde court autour. Quand il y a un match, t’as 400 supporters, c’est la folie. » Et ce, en dépit de conditions pour le moins inhabituelles que décrit Virginie : « Il y a six « terrains » différents. Terrains entre guillemets, car c’est du sable et des coquillages, il n’y a pas de pelouse ni de réelles délimitations. Ça sert d’abri aux vaches le soir quand elles viennent dormir. Donc pour jouer au foot, il faut sortir les vaches qui traînent ça et là. Et surtout faire gaffe à pas shooter dans les bouses ! » Le vrai terrain, lui, est un champ de bosses entassé de caillasses, où le gazon est mort et sur lequel il est « impossible de jouer si t’as pas de chaussures, au risque de te péter la jambe » , selon « Le Chauve » . Un des gros projets envisagés est donc d’offrir un terrain digne de ce nom aux locaux.

Un Mamadou Niang au PSG !

Mais avant ça, Rémi se concentre sur son PSG, l’idée étant de faire grandir l’équipe pour devenir l’une des meilleures de Zanzibar. À l’origine, le Paje Sagi Generation n’avait qu’onze joueurs âgés de huit à quinze ans. À peine de quoi faire une véritable team. Ils sont désormais plus de trente enfants avec le maillot de United sur le dos. « Là, on vient de prendre le petit Müller de huit ans, révèle Rémi. Il va beaucoup nous apporter. » Oui, à Paje, chacun à son petit surnom. Dans les rangs du PSG, on retrouve ainsi Jordi Alba, Karim Benzema, Coutinho, Ángel Di María… Et même un Mamadou Niang ! « Le gamin est tellement en admiration devant lui qu’il a écrit son nom sur la porte de sa maison » , se marre Kipara. Les entraîneurs adultes se prennent également au jeu. L’un des gros concurrents du PSG est coaché par un certain José Mourinho, à la tête de petits portant les couleurs de… la Juventus Turin. Le Special One tanzanien est d’ailleurs dur en affaire, à écouter Rémi : « On est rentré dans les périodes de transfert. Quand je repère des mecs supers forts dans les autres équipes, je vais leur parler pour les recruter. Et là, il y a un gosse monstrueux dans l’équipe de Mourinho, qui ne veut pas le lâcher. » Et de continuer, plutôt sérieusement : « Du coup, je négocie avec le môme. Tu veux combien de bonbons par semaine pour venir jouer chez nous ? Au vrai, le système éducatif est pourri ici. Donc mis à part le foot, les gamins n’ont pas trop de projet. Alors, ils ont l’espoir d’avoir un jour la même voiture que Cristiano Ronaldo ou la même médiatisation que Messi… Rentrer dans le délire des rémunérations, ça les motive à fond ! »

Il faut dire que Rémi connaît un peu le monde du football. Né à Boulogne, il a grandi pas loin du Parc des Princes. Il a d’ailleurs été un abonné du stade par le passé, et se souvient très bien des PSG/OM un peu violents durant les années 1990. Mais il s’est éloigné du Paris Saint-Germain quand il a décidé de tout claquer il y a quelques années pour se reconvertir dans les projets humanitaires. Bye bye l’emploi dans l’industrie pharmaceutique, le gros chèque en fin de mois et l’appartement à son nom. Bonjour le voyage, la rencontre et l’entraide. « Ici, il aide tout le monde : les gens de l’hôpital, les pêcheurs, les femmes qui cultivent des algues, celles qui produisent des sacs avec des feuilles de palmiers, l’école, les drogués, les personnes âgées…, confie Virginie. Il est devenu très important dans le village. Les locaux disent que quand il rentre en France, Paje dort. » Et depuis septembre, Paje était tombé dans un gros sommeil. « Le Chauve » a en effet dû quitter précipitamment le pays cet été : après des menaces à son encontre, il a carrément été interdit de territoire jusqu’aux élections qui viennent de se dérouler. Lui ne comprend pas et dénonce la corruption établie par le pouvoir. L’ambassade et les autres personnes potentiellement au fait du sujet n’ont, elles, pas répondu à nos demandes. Toujours est-il qu’après plus de deux mois d’absence, Rémi vient juste de revenir dans son village adoptif pour continuer à mener les projets de Life Steppers, qu’ils soient ancrés dans le domaine sportif ou autre. « Le foot est un prétexte pour prendre soin des mômes et pour expliquer notre concept aux gens qui ne sont pas forcément sensibilisés par l’éducation ou par la santé » , conclut-il. Avec quand même un rêve un peu plus grand : celui d’envoyer un jeune talent dans un vrai et grand club. Histoire qu’il envoie quelques maillots.

Arnaud Souquet : « Les Américains mangent tout le temps, c’est infernal »

Par Florian Cadu

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