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Reims, bouchon d’acier
Dimanche à Marseille, le Stade de Reims a conclu son neuvième match cette saison sans encaisser de but (0-0), un record en Europe. Prolongeant, à sa façon, sur les pelouses françaises le style adopté cet été en Russie par l’équipe de France de Didier Deschamps.
En Belgique, il existe au moins deux hommes qui souscrivent à la philosophie de jeu prônée par Didier Deschamps et les Bleus en Russie cet été, fatale aux Diables rouges en demi-finale du Mondial : Björn Engels et Thomas Foket. Débarqués courant août au Stade de Reims, les deux défenseurs appliquent sensiblement les mêmes préceptes en Champagne depuis leur arrivée, sous les ordres de David Guion. À savoir laisser la gonfle à l’adversaire, bétonner, compter sur un gardien en état de grâce et planter des contres. En chiffres, sur les cinq dernières journées, cela donne 27% de possession de balle à Marseille dimanche (0-0, 15e journée), 46 contre Guingamp (2-1, 14e journée), 39 à Saint-Étienne (2-0, 13e journée), 28 contre Monaco (1-0, 12e journée), et 32 à Rennes (0-2, 11e journée). Soit moins de 35% de possession de moyenne, pour trois succès, un nul et une défaite. Plutôt rentable.
L’effet Guion
Des principes d’autant plus rentables que le club champenois les suit depuis son retour dans l’élite cet été, et ses deux succès inauguraux à Nice (0-1) et face à Lyon (1-0). À l’aube de la 16e journée, Reims est installé à la huitième place, à égalité de points avec Strasbourg (21), plus près de Lyon et du podium (7 points) que de la zone rouge (8 points). Voilà donc les Rouge et Blanc largement dans les clous de leur objectif maintien, mais surtout troisième défense de Ligue 1, avec seulement 13 pions concédés. Un total terni (biaisé ?) par les claques reçues à Amiens (4-1, 3e journée) et Paris (4-1, 7e journée). Ainsi, seuls le PSG (9) et Montpellier (11) font mieux.
Surprenant ? Pas pour Mickaël Tacalfred, ancien taulier de l’arrière-garde stadiste (2008-2016) et adversaire l’an dernier de Reims avec Auxerre à l’étage inférieur : « Ils sont dans la continuité de ce qu’ils faisaient bien en Ligue 2. Ils défendaient très très bien, c’était leur plus grande force. Malgré les changements, ils ont gardé cette envie de bien défendre. » Les changements ? Oh, trois fois rien, juste 75% de la défense type, dont Foket qui a sorti du onze Romain Métanire, et où Engels et Konan ont respectivement succédé à Jeanvier, parti à Brentford, et Koné, reparti à Lille. Sans altérer l’état d’esprit insufflé par David Guion à son arrivée à l’été 2017, et loin du style emballant promené par le Stade de Reims lors de son passage précédent en Ligue 1, entre 2012 et 2016. « On était une équipe joueuse, mais c’était aussi par rapport aux joueurs qu’on avait, replace l’ancien capitaine rémois. Il faut essayer de trouver le bon équilibre, eux ont du mal à marquer des buts. »
Les défauts de ses qualités
C’est peu de le dire : avec ses dix buts inscrits, Reims a aussi la plus mauvaise attaque de Ligue 1. « Mais ils se créent quand même des occasions, défend l’international guadeloupéen. Ils ont ce qu’il faut offensivement et des milieux qui se projettent bien. Il faut juste qu’ils soient plus efficaces. » Histoire de suivre « l’exemple » de Nîmes, coup de cœur de l’homme aux dreadlocks, une équipe « qui défend bien et marque beaucoup » . À défaut, estime Tacal’, « c’est déjà bien de défendre comme ils le font, c’est une bonne base, surtout dans un championnat comme la Ligue 1 » . Cela vaut notamment à ce Reims cuvée 2018-2019 un record européen, depuis dimanche et le nul ramené du Vélodrome : celui du plus grand nombre de matchs de championnat conclus sans encaisser de but, neuf.
Alors, comme souvent dans ces moments-là, c’est la tête du gardien qui dépasse de la file. Un dernier rempart à la carrière sinueuse, et à l’apogée tardive, dans le cas d’Edouard Mendy, 26 ans et un clean sheet de moins qu’Alisson Becker (Liverpool) cette saison. Un type passé par le centre de formation du Havre, Cherbourg et la réserve de Marseille avant d’atterrir dans les bois du Stade de Reims, un club qui a lui aussi emprunté pas mal de méandres. « On en voit de plus en plus, des parcours atypiques comme le sien, c’est ce qui fait la beauté du football, apprécie Tacalfred. Des joueurs qui ne sont pas passés par des centres de formation, ou qui comme lui ont dû repasser par les divisions inférieures avant de passer pro, c’est beau de voir ça. » Beau comme un contre éclair conclu par Pablo Chavarría ? Ce n’est ni Björn Engels ni Thomas Foket qui vous contrediront.
Par Simon Butel
Propos recueillis par SB.