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Raggi : jambes de bois, cache-œil et sabordage
Auteur d'une prestation grotesque contre Rennes, Andrea Raggi symbolise les choix peu inspirés de Leonardo Jardim pour sortir les Monégasques du marasme.
« Il faudra onze animaux sur le terrain. » En période de crise, l’humain trouve parfois refuge dans ses plus bas instincts, à défaut de chercher un réel chemin pour s’extraire de sa jungle de problèmes. C’est ainsi que, pour la troisième fois en dix jours et comme à chaque fois que son équipe a été en difficulté sous son mandat, Jardim a fait appel à sa bête de foire préférée. Celle qui s’agite constamment, attire les regards par son étrangeté, pousse des cris guerriers, mais amuse plus qu’elle n’effraie. La relation entre l’entraîneur portugais et le défenseur italien est, paraît-il, compliquée. Mais quand on ne parvient plus à guider ses hommes, on a toujours besoin d’un fidèle aboyeur pour remettre le troupeau en marche. C’est la théorie de Jardim. Celle de la majorité des coachs en manque d’idées, en vérité.
La pitrerie n’est jamais finie
Outre son désir d’animalité et une tirade d’ancien combattant sur la jeunesse d’aujourd’hui, Andrea Raggi avait présenté en conférence de presse cette étonnante affiche de bas de tableau comme « la finale des finales » . Il est vrai que pour un club qui n’a goûté au succès qu’une seule fois cette saison, chaque nouvelle rencontre ressemble à un sommet vertigineux. Alors, l’AS Monaco a vaguement tenté de grimper son Everest du moment et s’est écroulée comme chaque week-end depuis maintenant deux mois. Et, en dépit de ses grands discours conquérants, Andrea Raggi est celui qui a entraîné la meute de louveteaux dans le ravin, prenant le relais de Jemerson, guide suprême de ces dernières semaines.
Le niveau cataclysmique de Raggi n’est plus un secret pour personne. Sa présence sur le terrain ne doit qu’à sa prétendue exemplarité – nombre de locaux peuvent pourtant témoigner de son hygiène de vie douteuse –, son état d’esprit et sa hargne de besogneux. Ce dimanche, l’ancien joueur de Bologne a fait exploser le peu de considération sportive que certains osaient encore avoir à son égard. Humilié – comme d’habitude – sur chaque accélération, passif sur l’ouverture du score rennaise et coupable d’un geste d’humeur stupide lors d’un duel anodin, le pirate a laissé ses coéquipiers se débrouiller à dix avec ses contradictions de vieux radoteur. Derrière sa conviction d’être un cadre et sa fidélité un brin surjouée, le vilain chauve a acté pour de bon son illégitimité à représenter une solution à la faillite mentale de l’équipe de Jardim. Quel jeune joueur, aussi à l’écoute soit-il, peut voir en Raggi un modèle, un patron, un exemple ? Quel que puisse être le rôle de l’Italien dans un vestiaire, le terrain surpasse tout. Tous le voient se noyer à chaque nouvelle vague. Et quel équipage écouterait un capitaine qui ne sait pas nager ?
Ne pas prolonger l’interminable
« Il faut être à la fois un peu inquiet et convaincu qu’on va sortir » , analysait, plutôt justement, l’ancien international espoir italien. En pleine détresse, faut-il encore envoyer les bons signaux. Leonardo Jardim a beau être un très grand entraîneur, dont le travail – même en cas de saison désastreuse – ne saurait être remis en cause dans sa globalité, il lui arrive parfois de s’entêter à chercher des issues dans des impasses. Sa gestion conservatrice de ce que doit être un défenseur central est l’un de ces murs face auxquels il refuse de faire demi-tour. Vendredi encore, sans nier totalement les difficultés défensives de son équipe, il ne semblait pas enclin à admettre que ses choix d’hommes n’étaient peut-être pas les bons. En passant depuis quelques matchs à un système à trois derrière, il n’a pourtant rien résolu tactiquement, ajoutant de la fébrilité à la fébrilité. Sur le banc et en tribunes, la jeunesse, certes pas toujours irréprochable, s’impatiente devant la mansuétude dont fait preuve Jardim à l’égard de ces cadres qui n’en sont plus. Cette semaine, la presse s’est fait l’écho d’une demande de prolongation du pirate, âgé de 34 ans et qui n’a jamais caché sa volonté de terminer sa carrière sur le Rocher. Jardim et lui n’ayant visiblement pas compris qu’elle devrait l’être depuis un moment déjà, il faudra désormais compter sur la lucidité des hommes en noir pour arrêter le combat.
Par Chris Diamantaire