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Rafael Leão, adroit dans sa Botte
Buteur et passeur décisif ce week-end sur la pelouse d’Empoli (1-3), Rafael Leão a une nouvelle fois démontré qu’il était le patron offensif de ce Milan. À 23 ans, l'ancien attaquant lillois est au sommet de son art. Revers de la médaille, le talent du numéro 17 attire les convoitises de l'Europe entière, et notamment celle de Chelsea, à qui il rend visite ce soir.
Paul Bernardoni, Marc-Aurèle Caillard, Maxime Dupé. Voilà trois gardiens, parmi d’autres, qui se souviennent du passage de Rafael Leão en Ligue 1 sous les couleurs du LOSC, lors de la saison 2018-2019. Trois ans plus tard, l’ancien Lillois a pris en maturité et est désormais devenu grand. Sa nouvelle maison : San Siro. De l’autre côté des Alpes, l’ailier portugais a conquis le cœur des tifosi milanais et aussi des anciennes légendes du club. « Rafael Leão est un fuoriclasse, je l’aime beaucoup, car il est instinctif. Lui-même ne se comprend pas, il a trop d’imagination et de fantaisie », encense ainsi Ruud Gullit.
Arrivé en Lombardie à l’été 2019, Rafael Leão s’est imposé comme le leader offensif de cette équipe malgré une adaptation loin d’être simple : « J’avais peur lorsque je suis arrivé de ne pas pouvoir gérer la pression, de ne pas pouvoir répondre sur le terrain. Mais je ne pouvais pas manquer l’occasion de faire mes preuves », déclare-t-il au micro de l’UEFA.
Joueur très vif et capable de changer le cours d’un match sur un dribble, une accélération ou une frappe, le plus beau sourire de Serie A est parvenu à canaliser sa fougue en travaillant énormément sur l’intelligence de jeu. Si bien qu’il semble loin, le temps où son entraîneur Stefano Pioli pointait du doigt « son manque de lucidité et sa tendance à jouer sans lever la tête ». La saison dernière est justement là pour en témoigner : grand artisan du Scudetto, l’international portugais n’a cessé d’enchaîner les prestations XXL qui ont fait de lui le MVP de la Serie A avec onze buts et huit passes décisives en championnat (pour un total de 14 pions et de 12 caviars toutes compétitions confondues). Une ascension fulgurante qui « choque » son ancien compagnon de chambre au Sporting Portugal Everaldo Mendes : « À l’époque, lorsqu’on était en U15-U16, il ne jouait jamais. […] C’est le directeur du centre de formation (qui au passage a aussi été le recruteur de Cristiano Ronaldo, NDLR) qui a tout fait pour qu’il reste alors que les entraîneurs n’avaient plus trop confiance en lui. »
Les années ont passé, et Rafael Leão est aujourd’hui installé à la table des grands, qu’il regarde dans le blanc des yeux. Sur l’année civile 2022, seuls trois joueurs ont réalisé le double-double (plus de dix buts et dix passes décisives) : Kevin De Bruyne, Neymar et Rafael Leão, donc.
Impliqué dans 58% des buts de son équipe
Samedi 3 septembre 2022, San Siro. Dans ce premier derby de la Madonnina de la saison, Rafael Leão a une nouvelle fois illuminé la rencontre. Auteur de deux buts et d’une passe décisive pour Olivier Giroud, le rappeur à ses heures perdues vient de lancer sa saison ainsi que celle de son équipe. À l’issue du match, son coach Stefano Pioli n’a pas hésité à remercier son numéro 17 : « Pour s’améliorer, il faut du talent et de l’intelligence, Rafa a les deux. » Le lendemain, la Gazzetta dello Sport affiche à sa une l’attaquant de 23 ans avec un titre élogieux : « StraLeão » , pour souligner le côté stratosphérique du garçon.
L’ancien Lillois a la Botte à ses pieds et ne cesse de martyriser les défenses italiennes. Peu importe le niveau de l’adversaire, que celui-ci évolue en bloc bas ou en bloc haut, le joueur formé au Sporting CP trouve toujours la solution. Avec quatre buts et sept passes décisives cette saison, il est impliqué dans 58% des buts de son équipe.
Mais alors, le Milan est-il trop dépendant de son ailier gauche virevoltant ? Difficile de le nier. Dès que Rafael Leão n’est pas à son meilleur niveau, les Rossoneri piétinent offensivement, comme lors des deux premières journées contre l’Udinese (4-2) et l’Atalanta (1-1). Des prestations jugées « nonchalantes » de la part de l’exigeant d’Arrigo Sacchi. Inutile de rappeler à l’ennemi du catenaccio que l’international portugais reste sur une saison à 3201 minutes jouées et peut se montrer moins en forme sur deux rencontres de début de championnat.
Reste que la dépendance au crack portugais est réelle pour Milan. Pas pour rien que lorsque Leão n’est pas présent sur le rectangle vert, la bande à Giroud se retrouve souvent sans inspiration, comme lors de la récente défaite face au Napoli (1-2). Quand il aligne son numéro 17, l’actuel 5e de Serie A affiche une moyenne de 2,3 points par match (70% de victoires) contre 1,8 lorsqu’il n’est pas là (moins de 50% de victoires).
Un talent devenu trop grand pour Milan ?
Indispensable à cette équipe lombarde, Rafael Leão ne cesse d’attirer les convoitises de toute l’Europe. Si bien que l’été dernier, les supporters rossoneri ont vu quelques gouttes de sueur couler sur leur front. De nombreux médias anglais et italiens s’avançaient alors sur une possible offre de 100 millions d’euros de Chelsea. Finalement, Rafael Leão restera bien chez le champion d’Italie en titre. Hasard du tirage au sort, l’AC Milan retrouve donc Chelsea dans son groupe de C1. En conférence de presse d’avant-match, Graham Potter n’a pas hésité à louer les qualités de Leão. « J’ai été impressionné par Leão à chaque fois que j’ai pu le voir jouer, c’est un top joueur, a glissé le nouveau tacticien des Blues, avant de lâcher un petit appel de phare. En ce qui concerne son avenir, il a les qualités pour évoluer en Premier League. »
Sous contrat avec l’AC Milan jusqu’en 2024, l’ancien coéquipier de Loïc Rémy laisse planer le doute concernant son avenir. Les négociations avancent lentement, et les deux parties peinent pour le moment à trouver un terrain d’entente. Pour cette prolongation de contrat, l’AC Milan aurait mis sur la table un contrat de cinq ans assorti d’un salaire annuel de six millions d’euros, alors que le principal concerné en demanderait sept.
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— Rafael Leão (@RafaeLeao7) May 23, 2022
Mais diverses problématiques viennent ralentir les négociations. En premier lieu, le litige juridique qui lie encore Rafael Leão (et le LOSC) et son club formateur du Sporting CP, qui réclamerait près de 19 millions d’euros à son ancien joueur et au club français. Le second frein se situe dans « les nombreux changements d’interlocuteurs », comme l’expliquait Paolo Maldini. En effet, selon la Gazzetta dello Sport, Rafael Leão aurait décidé de confier sa carrière à deux agents. Jorge Mendes n’est donc plus le seul à gérer la carrière sportive de son compatriote et doit faire équipe avec un avocat français. Ce serait même ce dernier qui serait devenu l’interlocuteur principal dans les discussions avec le club italien. Un changement de cap pas vraiment apprécié de la direction milanaise, qui préfère négocier avec Jorge Mendes. De plus, la Gazzetta dello Sport explique qu’une éventuelle prolongation de Leão coûterait près de 65 millions d’euros à l’AC Milan. Des négociations longues et loin d’être évidentes, mais qui n’ont pas l’air de tracasser l’ailier gauche du Milan, en totale confiance depuis plusieurs mois.
Que Bernardoni, Gaillard et Dupé se rassurent, Rafael Leão a depuis martyrisé d’autres gardiens. Sa prochaine victime s’appellera probablement Edouard Mendy ou Kepa Arrizabalaga. À moins qu’il ne « loupe son réveil comme c’est déjà arrivé au Sporting, car c’est un très gros dormeur » plaisante son ami Everaldo Mendes.
Par Tristan Pubert
Propos d'Everaldo Mendes recueillis par TP