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Rabesandratana : « Peu importe le score, je vais être satisfait »
Éric Rabesandratana, dit « Rabé », a été formé à Nancy avant de porter le brassard au PSG. Ce match, c’est un peu le sien, lui qui a été lancé en D1 à Nancy par Aimé Jacquet, connu Pablo Correa joueur avant de jouer des PSG-OM avec Fabrizio Ravanelli au marquage. Celui qui est aujourd’hui consultant pour France Bleu 107.1 en lieu et place de Pierre Ducrocq ne manque plus un match depuis qu’il a raccroché les crampons. L’ancien milieu présente le « Rabesandratana-ico ».
Éric, ce Nancy-PSG, c’est un peu votre derby…C’est un match pour lequel je suis partagé, d’autant que Nancy est dans le dur depuis le début de saison. Mais Paris, c’est aussi mon club de cœur. Peu importe le score, je vais être satisfait. Une victoire de Nancy, c’est le feu pour Paris. Une victoire de Paris et les Lorrains s’enfoncent…
Que vous inspire ce PSG ?
On ne peut pas dire que le début de saison est réussi, mais c’est normal, c’est une année de transition. Tout change : le coach, le staff, la méthodologie de travail, la manière de s’entraîner. Ça demande du temps. Après le Trophée des champions contre Lyon, où le PSG aurait pu gagner 8-0, c’était beau, ça allait vite vers l’avant, mais le rythme était intenable sur la durée. Unai Emery a voulu mettre en place sa vision du football en oubliant ce qui avait été construit avant. Dernièrement, les joueurs et Emery ont fait une réunion. L’Espagnol s’est adapté, c’est une preuve d’intelligence. Alors oui, le danger serait de donner trop de pouvoir aux joueurs, mais contre Bordeaux, on a vu un mix de la méthode de l’Espagnol et du PSG de l’an dernier. C’est un peu comme Ancelotti au Bayern, il assume publiquement le fait de prendre le relais du travail de Guardiola, il faut savoir profiter de ce dont on hérite. J’en ai parlé à Antoine Kombouaré il y a peu, il fait pareil à Guingamp. Il se sert des bases de Gourvennec et apporte sa touche, petit à petit.
À Nancy, il y a Pablo Correa que vous avez connu en tant que joueur…C’est Nancy qui a fabriqué Correa en France. Il a eu une carrière de joueur plus ou moins réussie, mais c’est surtout comme entraîneur qu’il s’est fait un nom avec l’ASNL. Ce club est marqué de son empreinte.
Nancy a-t-il changé depuis vos débuts en 1990 ?Le club a plus de moyens financiers, déjà. Je me souviens qu’à mon époque, avant l’arrivée de Jacques Rousselot, le club avait des problèmes financiers. Le président, Gérard Parentin, était même venu nous voir dans le vestiaire avant un match pour nous annoncer que les primes de match n’allaient pas être versées à cause d’un gros déficit. Mais c’était il y a plus de vingt ans, le club a plus d’expérience aujourd’hui et continue de former des joueurs. C’est l’ADN du club, avoir la moitié de son effectif formée au club et pouvoir survivre ainsi.
En vendant ses joueurs formés au club, Nancy survit. Un peu comme vous quand vous arrivez au PSG en 1997. Vous changez de monde…Je me suis surtout adapté. C’était un immense changement, mais je m’y étais préparé. Je savais qu’au début, je n’allais pas énormément jouer. Sur place, il y avait N’Gotty, Roche, Le Guen : que des internationaux. J’ai dû attendre la suspension de Paul Le Guen (suite à son tacle sur Charles-Edouard Coridon, ndlr) pour avoir du temps de jeu. J’en ai profité pour me montrer. Et puis Alain Roche s’est blessé, alors j’ai joué milieu puis défenseur. Quand tout le monde est revenu, j’étais dans une bonne passe et Ricardo, qui était coach, a fait évoluer son schéma tactique : on a joué à trois derrière : Roche, Le Guen et moi, Algerino et Domi pouvaient monter sur les côtés, on a bien terminé la saison avec un doublé Coupe de France-Coupe de la Ligue, ce n’était pas rien.
Votre première saison au PSG, c’est surtout le PSG-OM et le penalty sur Ravanelli…On en a fait des tonnes sur ce fait de match. C’est un souvenir mitigé, car c’est mon premier PSG-OM, l’ambiance était énorme, mais on perd le match et il y a ce penalty qui monopolise l’attention des médias.
Ravanelli, lui, prétend qu’il y a faute de votre part.
Ça fait dix-huit ans qu’on me pose la question et dix-huit ans que je dis la même chose : je ne le touche pas. Ravanelli a provoqué le penalty, il a gagné le match. Pourquoi en rajouter ? On a sorti des vidéos pour voir le croche-patte qu’il se fait, ma main sur l’épaule au début de l’action, les ralentis, ça a pris des proportions incroyables…
C’est le PSG, ça. Un an plus tard, vous allez avoir trois entraîneurs en une saison.Oui, on débute avec Alain Giresse, puis Jorge et on termine avec Bergeroo. Sans ma première saison dans la capitale, je n’aurais pas aussi bien géré cette saison. C’était le bordel. En début de saison, la charnière c’était Wörns-Goma, puis ça a explosé. La seule bonne note, c’est le PSG-OM de la fin de saison que l’on remporte sur la fin (2-1) dans une ambiance exceptionnelle. C’est le début du bon temps avec le PSG. L’année suivante, on termine deuxième du championnat et je suis élu dans l’équipe type de la saison, je me sentais bien.
Début 2000, c’est le PSG « banlieue » et vous êtes capitaine d’Anelka, Luccin et Dalmat.
Oui, je l’ai appris durant le stage d’avant-saison. Entre Bergeroo et Ali Benarbia, l’ancien capitaine, il s’est passé quelque chose, alors j’ai été désigné capitaine. C’était une belle fierté, mais il fallait encore bosser, l’équipe était jeune. Malgré la Ligue des champions au menu, cette saison sera aussi un fiasco. Dommage, car la Ligue des champions, c’est quelque chose. On a joué le Milan, le Bayern, Galatasaray, La Corogne, à chaque fois dans des ambiances folles, mais sur la saison, c’était compliqué, et on a encore changé d’entraîneur, puisqu’en décembre, Luis Fernandez arrive.
C’est en Ligue des champions, contre Göteborg, que vous marquez votre premier but avec le PSG. Vous étiez plutôt adroit devant le but.
À Nancy, je restais sur trente et un buts en trois saisons, j’ai toujours été efficace devant le but, et puis j’aimais ça. Plus jeune, je jouais à tous les postes, mais je me suis ensuite posé au milieu de terrain, c’est là que je m’épanouissais le mieux. Ce n’est qu’au PSG que j’ai reculé en défense centrale, je faisais mon job.
Revenons à Luis Fernandez. Son arrivée signifie votre départ…Je n’ai toujours pas compris pourquoi il m’a sorti de l’équipe. Je lui ai demandé trois fois, je n’ai jamais eu de réponse. Qu’il fasse des choix, aucun souci, mais qu’il explique pourquoi ! Qu’on travaille sur les choses à améliorer, etc. Ça n’a jamais été le cas avec Luis. Un jour, vous êtes titulaire à Galatasaray – un match important –, ensuite vous êtes remplaçant à Bastia, sans explication. Il n’y avait aucune logique dans son coaching. Et puis à l’été 2001, j’ai reçu une date de reprise différente, comme Luccin, Aliou Cissé et d’autres. On était mis à l’écart. Luis Fernandez ne voulait même pas que l’on se change dans le vestiaire des professionnels. C’était des gamineries. Alors je suis parti…
L’étranger, c’était une envie ?
Oui, et puis j’étais au PSG, je ne pouvais pas aller n’importe où en France. Alors je suis parti à Athènes, à l’AEK. Le coach de l’époque, c’était Fernando Santos, celui qui vient de gagner l’Euro avec le Portugal. Tout se passait bien au début et je me suis blessé sérieusement. Et là-bas, le président était un fou. C’était un mafieux local qui a fait de la prison pour trafic de magnétoscopes. Une fois blessé, il ne veut plus me payer. Alors je porte l’affaire devant la justice, ça dure six mois. Au final, je touche trois mois de salaire…
Puis retour en France.Je signe alors à Châteauroux, où je retrouve Jimmy Algerino. La première saison est superbe, on termine 4es et on rate la montée de peu. Je resigne et arrive Victor Zvunka durant l’été. Zvunka, c’est Luis Fernandez en plus vieux. Il voulait absolument Teddy Bertin, qui était un ami de pêche ; leurs femmes se connaissaient. Une fois Bertin dans le Berry, je ne joue plus, alors je tente l’aventure Mons, en Belgique. Sur place, le coach, c’est Sergio Brio, un ancien de la Juventus de Platini.
On est cramés au bout de six matchs à cause de la préparation physique intense et Brio se fait virer. Débarque alors un Flamand qui met la moitié de l’équipe à la cave, dont moi. Je m’entraîne avec la troisième équipe, c’est dire. Moralité, on termine derniers et on descend. Mais l’année suivante, on change tout et je rejoue au milieu, je fais une grosse saison avec 8 buts et 11 passes décisives, mais je me pète lors du dernier match, l’équipe est championne de D2 et remonte, mais je vais rater la préparation. Je ne vais faire qu’une demi-saison et l’équipe termine 9e. On est en 2007 et je décide d’arrêter.
Avec regrets ?Oui, ma fin de carrière est en eau de boudin. À partir de mon départ du PSG, je n’ai que des galères. J’ai fait dix-sept ans au haut niveau, mais je ne pensais pas que ça se terminerait comme ça. Le milieu du football m’a déçu, alors j’ai abandonné. Pourtant, je pouvais encore jouer. Malgré tout, j’ai toujours la passion de ce sport. Joueur, je ne regardais pas un match. Mais aujourd’hui, je regarde une rencontre tous les jours. Parfois plus. J’aimerais bien bosser dans un club, au niveau du recrutement, c’est un truc qui me botterait bien.
Propos recueillis par Mathieu Faure