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Qui veut la pelure de Mandanda ?
Autrefois intouchable, Steve Mandanda est aujourd'hui contesté jusque dans son propre camp ces dernières semaines. Capable d'exploits, mais aussi coupable sur plusieurs buts, comme celui encaissé à Angers où son inaction face à Bahoken était inquiétante, le gardien marseillais aux 500 matchs avec l'OM est-il vraiment bon à jeter ?
La bombe a été lâchée en début de semaine : l’OM chercherait un successeur à Steve Mandanda et ferait les yeux doux à Benjamin Lecomte pour l’attirer dès l’été prochain. Selon L’Équipe, le gardien montpelliérain de 27 ans serait la priorité des dirigeants phocéens, qui devront sortir entre quinze et vingt millions d’euros pour convaincre Laurent Nicollin de le laisser filer. Trop, sans doute, lorsque l’on sait qu’une ex-cible marseillaise à ce poste, Alban Lafont, a quitté Toulouse contre huit millions d’euros l’été dernier. Énorme pour un OM menacé par le fair-play financier et dont le propriétaire a rangé le chéquier. Mais, au-delà du prix, est-ce nécessaire ?
De moins en moins phénoménal
En coulisse, Steve Mandanda n’y va pas par quatre chemins : « Je n’ai jamais été aussi nul » , concède le portier marseillais à ses proches, toujours selon L’Équipe de vendredi. Dans les travées du Vélodrome et ailleurs, une grande partie des supporters marseillais partagent cet avis. Autrefois source de consensus, El Fenomeno est devenu un sujet clivant et irritant. Le fait est que le meilleur gardien du dernier championnat écoulé n’est plus aussi décisif. Pire, à défaut de faire gagner des points aux siens, il en coûterait de plus en plus, tandis que ses fautes de main sont devenues aussi récurrentes que ses blessures. Rien d’étonnant de voir l’OM finir 2018 à la 14e défense de Ligue 1. Après une séance de tirs au but sans un seul arrêt mercredi contre Strasbourg en Coupe de la Ligue – exercice dans lequel il n’a jamais excellé avec ses cinq arrêts contre 55 penalty encaissés –, Mandanda a de nouveau été pointé du doigt samedi soir à Angers.
La faute à un placement plus que discutable sur l’ouverture du score angevine. Sur cette tête de Stéphane Bahoken, Steve Mandanda ne couvre absolument pas son premier poteau. Résultat : il ne peut qu’admirer le ballon et s’attirer les foudres, logiquement. La caméra s’attarde sur son regard impuissant, désabusé, désarmé. « Je ne peux pas avoir le sourire quand j’encaisse un but. C’est aussi une prise de conscience de la situation, du match, forcément sur le terrain ça se ressent » , avançait-il justement cette semaine en conférence de presse. Le gardien olympien le sait, il ne réalise pas sa meilleure saison, loin de là, malgré une finale de Ligue Europa et un titre de champion du monde glané en tant que doublure. Mais de là à le chasser comme un malpropre ?
Un monument en péril
S’attaquer à Mandanda, ce n’est pas s’attaquer à n’importe qui. À 33 ans, le gardien formé au Havre a fêté à Angers son 500e match sous le maillot olympien, record absolu sur la Canebière. Un tel monument, ça se respecte, et surtout, ça ne vient pas de nulle part tant il a souvent maintenu l’OM en vie ces dernières années. Mais au-delà des chiffres et de la symbolique, Mandanda est loin d’être bon pour la retraite et sait encore se montrer décisif.
Car là est tout le paradoxe du Mandanda cuvée 2018, capable de coûter un but aux siens, mais d’en sauver trois autres dans la foulée. Et c’est exactement ce qu’il a fait à Angers en sortant miraculeusement plusieurs tentatives de Reine-Adelaïde et une frappe de Fulgini sur laquelle il s’est parfaitement étendu, et ce, alors que l’OM était mené et refaisait à peine surface dans le jeu. Concrètement : sans lui, Marseille aurait sombré. Autrement dit, si Thauvin a pu mener la fronde offensive et trouver Bouna Sarr pour sauver les siens en fin de match, c’est bien parce que Mandanda avait maintenu le navire à flot auparavant.
Ex-capitaine abandonné
Accuser le seul Mandanda, c’est aussi nier le cœur du problème : l’arrière-garde olympienne. Si l’OM est la dernière défense de Ligue 1 à l’extérieur, ce n’est pas l’unique faute de son ultime rempart, mais surtout celle d’une défense plus que poreuse. Certes, El Fenomeno n’est pas à son niveau, mais il n’est que l’un des nombreux cadres marseillais dans ce cas et loin d’être le pire : « Il y a pas mal de choses qui ne vont pas. On est plusieurs à ne pas être au niveau auquel on doit être. On est conscients de tout ça » , reconnaissait-il en début de semaine.
Cette saison, Steve Mandanda, c’est 17 buts sur 79 frappes subies, là où Anthony Lopes en a encaissé 19 sur 79. La différence étant que le Marseillais a subi ce total en douze rencontres contre seize pour le Lyonnais, ce qui témoigne de la surexposition de Mandanda, causée par la fébrilité défensive de son OM. Certes, il reste loin des 13 buts encaissés en 97 frappes subies de Benjamin Lecomte. De là à lui assurer un avenir dans les buts olympiens ? En tout cas, lui n’a pas prévu de quitter l’OM de sitôt : « Je suis très très heureux ici. J’ai la confiance du staff, de mes partenaires. Je me sens très bien ici. J’aimerais qu’on enchaîne plus de résultats positifs et qu’on se retrouve devant et beaucoup plus sereins. » Mais pour être devant et sereins, il faut commencer par l’être derrière.
Par Adrien Hémard