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Qui est Jean-François Vilotte, le nouveau DG de la FFF ?
La FFF s’est trouvé un nouveau directeur général en la personne de Jean-François Vilotte. Le profil du successeur de Florence Hardouin renseigne sur les intentions du comex : rien ne va changer.
La décision d’introniser Jean-François Vilotte comme nouveau directeur général s’avère tout sauf anodine. Tout d’abord parce qu’il s’agit d’un homme, dans une période où les fédérations doivent apprendre à composer avec l’impératif de la parité, imposée d’ailleurs par la dernière loi « sport et société ». Cette nomination survient dans un contexte où les affaires de harcèlement sexuel ou moral brisent légèrement la glace de l’omerta au sein de la FFF. Si la présence d’une femme dans la direction n’apporte certainement pas automatiquement de garanties en la matière (Florence Hardouin en est la démonstration), tous les spécialistes s’accordent pour souligner que la féminisation des postes de responsabilité demeure une condition sine qua non afin de lutter contre ces fléaux. Des candidates crédibles s’étaient pourtant présentées : Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre en charge du sport sous François Hollande, ou Charline Avenel, rectrice de l’académie de Versailles (issue de la même promotion de l’ENA qu’Emmanuel Macron, tout comme Amélie Oudéa-Castéra, actuelle ministre des Sports), très engagées dans la lutte contre les violences faites aux femmes. En optant pour Jean-François Vilotte, un honorable monsieur de 65 ans, la FFF a fait le choix d’un conservatisme pour le moins frileux.
Le changement, c’est pas maintenant !
Ce cadre senior affiche en effet un itinéraire rassurant. Passé un temps par le cabinet de Jean-François Lamour, lorsqu’il était ministre des Sports sous Nicolas Sarkozy, il s’est surtout fait un nom et un carnet d’adresses lorsqu’il occupa le poste de DG à la Fédération française de tennis (2007-2009, 2018-2021). Une expérience précieuse, puisque c’est là qu’il a côtoyé l’actuelle ministre des Sports. Un atout non négligeable afin d’arrondir les angles avec le ministère, qui avait pesé de tout son poids pour évincer Noël Le Graët et forcer le comex de la 3F à assumer ses responsabilités. Il s’impose désormais de mettre de l’huile dans les relations avec l’État, alors que l’ancien maire de Guingamp, qui continue de fréquenter assidûment le siège de la FFF et de conseiller ses amis toujours en place, n’entend pas renoncer à sa vendetta envers une femme dont il avait sous-estimé la proximité avec le président de la République. Seul nuage à l’horizon pour Vilotte : à l’instar d’Amélie Oudéa-Castéra, son passé à la FFT l’expose, par rebond, à se retrouver éclaboussé par les affaires qui commencent à émerger publiquement, et juridiquement, dans le monde de la petite balle jaune. (La Fédération française de tennis fait l’objet d’une plainte pour « détournement de biens publics » et « corruption », ainsi que d’un signalement de l’agence française anticorruption Anticor, NDLR.)
S’il est lui aussi énarque, Jean-François Vilotte est d’abord avocat et arbitre au Tribunal arbitral du sport (TAS). Une qualité qui renseigne sur les inquiétudes de la FFF par rapport à l’avenir, à la suite des affaires en cours, voire y compris concernant de nouveaux conflits qui pourraient s’inviter dans l’actualité. Un tel CV, affichant les compétences évoquées, assure de posséder les codes, les connaissances ainsi que les contacts nécessaires pour gérer au mieux les dossiers brûlants. Sans oublier sa fine maîtrise des problématiques autour des jeux en lignes, puisqu’il fut également président de l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL)… Cette nomination, en revanche, sur son versant politique, dessine encore davantage le visage d’une FFF qui s’éloigne de sa mission de service public, surtout vis-à-vis du foot amateur. Philippe Diallo, son président par intérim, qui a de fortes chances d’être reconduit jusqu’à la fin du mandat en juin prochain, est ainsi un « transfert » de l’Union des clubs professionnels de football. Issu du tennis, Jean-François Vilotte appartient à la caste de ces cadres seniors qui passent d’un sport à l’autre comme on change de multinationale dans l’agroalimentaire. Son amour du football, ou sa compréhension des difficultés du foot des districts, apparaît limité. De fait, le foot amateur constitue de moins en moins le cœur de métier de la culture « d’entreprise » de la FFF.
Par Nicolas Kssis-Martov