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- Présentation de Thomas Tuchel
Qui es-tu Thomas Tuchel ?
Pour succéder au gourou Jürgen Klopp, le BvB a fait dans la simplicité et a choisi l'homme qui lui avait déjà - presque - succédé à Mayence, accessoirement le coach le plus demandé d'Allemagne. Annoncé au Bayern et en équipe nationale, Tuchel n'a pourtant jamais connu que Mayence.
Le 4 août 2011, Mayence se rend en Roumanie, chez le Gaz Metan Medias, pour le retour du troisième tour de qualification à la Ligue Europa. À l’aller, les deux équipes s’étaient quittés sur un 1-1, et là rebelote, à chaque fois à cause d’un pion de Tha’er Bawab, obscur Jordanien passé dans sa jeunesse par le Real Madrid C et le FC Barcelona B. Tout se décide donc aux tirs au but. 3-3 pour commencer. Puis Sami Allagui et Elkin Soto ratent, tout comme Alin Litu pour le GMM. La balle de match est pour Bawab, qui ne tremble pas au moment de battre Christian Wetklo. Une élimination qui fait tâche alors que, quelques jours plus tôt, le Karnevalsverein avait déjà sacrément galéré à se défaire de Zweibrücken, modeste club de cinquième division, au premier tour de la DFB-Pokal. Tout le monde est un peu inquiet en Rhénanie-Palatinat qu’après une magnifique cinquième place, le club finisse dans le caniveau, incapable de se remettre du départ des deux tiers des Bruchweg Boys, Lewis Holtby et André Schürrle. Alors Thomas Tuchel va se creuse la tête, et dégaine du Michael Jordan à ses joueurs. Il leur montre une vidéo de « His Airness » , avec des actions réussies et ratés, et cette citation : « J’ai manqué plus de 9000 tirs dans ma carrière. J’ai perdu plus de 300 matchs. 26 fois, on m’a confié le tir de la gagne et j’ai manqué. J’ai raté, encore, encore et encore dans ma vie. Et c’est pourquoi j’ai réussi » . Trois jours plus tard, pour le premier match de Bundesliga de la saison, Mayence s’impose 2-0 contre le Bayer Leverkusen.
Joueur médiocre, entraîneur extraordinaire
Thomas Tuchel, c’est un déjà un peu ca, un mec qui a su trouver les mots, et rendu tout le monde accroc. Mais pas que. Comme la majorité des entraîneurs, le natif de Krumbach a été joueur professionnel. Problème : le défenseur n’était vraiment pas très bon. À son actif, une fin de formation à Augsburg en Bayernliga (quatrième div), huit matchs en 2. Bundesliga avec le Stuttgarter Kickers, avant de descendre d’un cran à Ulm, où il évolue sous les ordres de Ralf Rangnick, à qui il piquera beaucoup d’idées sur le jeu. Mais son véritable mentor, c’est à Stuttgart qu’il le rencontre. Après avoir arrêté sa carrière en 1998, le cartilage en bouilli, il rejoint le VfB en 2000 pour s’occuper des U19; et rencontre Hermann Badstuber, père de, décédé en 2009, à 53 ans. À l’époque, il est lui aussi entraîneur de jeunes. « Je n’ai jamais connu un coach qui avait autant de savoir tout en étant un penseur si créatif, qui se remettait en permanence en question, travailler si dur et rester pourtant si modeste. Il a eu une très grande influence à la fois personnellement et professionnellement. C’est devenu comme une figure paternelle sportive pour moi » . Toutes ces qualités, on les retrouve chez l’apprenti. Et ce n’est pas un hasard si, après un tour à Augsburg et un titre de champion avec les U19 de Mayence pour sa première saison, Tuchel est finalement nommé à la tête de l’équipe première à l’été 2009.
Pas qu’un clone de Klopp
Malgré l’incrédulité générale, TT fait des merveilles. Son Mayence presse énormément et attaque bien. « Il y a définitivement un style qui m’a été attribué, que nous avons apporté à Mayence : de la vitesse vers l’avant, un football offensif, expliqua-t-il à Die Zeit. Je préfère certaines qualités, un style de jeu actif, une défense audacieuse et des combinaisons rythmées en attaque » . Surtout, il s’adapte, notamment contre le Bayern, avec trois victoires en neuf matchs. Pour sa première rencontre avec le Rekordmeister, Tuchel aligne un 4-1-4-1 pour contrer le 4-3-3 de Van Gaal : boum, victoire 2-1. La saison suivante, il dégaine un 4-3-2-1, et s’impose 3-2. À ce moment-là, Heynckes déclare que son homologue est « destiné » à entraîner le Bayern un jour. C’est pourtant à Jürgen Klopp qu’on le compare. Les similitudes sont nombreuses: le passé, le club, la communication intensive avec les joueurs, la stratégie offensive et le pressing, les résultats.
Mais là où Jürgen éructe sur le banc de touche, ce grand échalas de Thomas garde son calme. Et si Klopp est un homme de médias, Tuchel préfère l’ombre : « Je suis une sorte de romantique du football. Ce que je pense être important, c’est l’atmosphère, un bon match sur le terrain et peut-être une saucisse lorsque je regarde. Je suis plus intéressé par ce qui me passionne, un match parfait ou une semaine d’entraînement parfaite, que de me mettre sous les projecteurs » . Heureusement, ses résultats parlent pour lui: 9e, 5e, 13e (après les départs de Schürrle et Holtby), 13e, 7e, pour deux qualifications en Ligue Europa et un titre d’entraîneur de l’année en 2011. Il a pourtant surpris son monde en annonçant son départ de Mayence à la fin de la saison 2014. Une année sabbatique plus tard, passé à perfectionner sa compréhension du foot et à discuter avec Guardiola, qu’il admire, Tuchel prend la succession de Klopp à Dortmund. Pour encore faire mieux ?
Par Charles Alf Lafon