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Qui es-tu, l’enfer turc ?

Par Émilien Hofman et Antoine Donnarieix
Qui es-tu, l’enfer turc ?

Mourinho l'avait résumé ainsi après une défaite de Chelsea contre Galatasaray : « Notre adversaire n'a pas joué avec 11 joueurs, mais avec 50 000. » Les soirées sont parfois chaudes en Turquie, comme ont pu l'expérimenter les Pays-Bas dimanche. Quelle est vraiment l'atmosphère de ces stades à la réputation torride ?

Le Chaudron, l’Enfer, les Flammes… Quand on parle des stades turcs, le champ lexical se fait brûlant. Chants étourdissants, tifos grandioses, supporters complètement dingues, la légende dit qu’il n’est jamais facile de venir jouer à Istanbul, même si Gianluigi Buffon a balancé après une élimination de sa Juve en Turquie qu’il n’avait jamais vu un supporter marquer un but. « Quand je suis arrivé, le groupe des supporters s’appelait Çarşı. On me disait qu’ils étaient les plus fous d’Europe. Mais voilà, j’avais connu Paris et Marseille, donc tu te dis que tu es habitué à tout ça. » Le jour où Édouard Cissé pose ses valises à Beşiktaş, il pense donc avoir fait le tour des stades bouillants. Eh ben non. C’est maintenant qu’il va vraiment voir ce que c’est, la chaleur. Dans une ville où on ne vit que pour son club, il va entrer dans un vrai bouillon. Cissé a ainsi l’occasion de faire la connaissance du capo. « C’est une tradition chez tous les supporters turcs. Il fait stopper les chants, demande le silence, puis il compte jusqu’à 3 avec tout le stade, et ça repart derrière. On peut comparer cette célébration au haka ! Après, t’entends plus rien sur le terrain et le match est lancé. Ça te galvanise… »

« Toujours avoir un ou deux maillots de Beşiktaş dans la boîte à gants »

L’ambiance des stades stambouliotes ne se limite pourtant pas au football. En basket également, les supporters turcs savent impressionner le visiteur. Le Galatasaray SK, un des grands clubs du pays et qui se distingue aussi régulièrement sur la scène européenne, accueille chaque semaine des fans complètement fous de leur club, dont l’influence est semblable à celle de leurs homologues footeux. « Indéniablement en basket, c’est plus confiné, concède Laurent Sciarra, l’ancien international français. Tu perds en affluence, mais tu gagnes en ambiance… Dans notre équipe, on avait Herman Reid, qui avait connu la NBA… Il nous a dit à la fin du match :« Les gars, j’ai jamais connu un truc comme ça ! » » Sur place, les joueurs sont vus comme de vrais dieux. Vu l’importance que le foot a dans la vie des supporters turcs, les footballeurs se doivent de représenter le plus dignement possible. Et si c’est le cas, l’enfer les emmène au paradis. Cissé s’est très vite rendu compte de cette situation, même en dehors des terrains. « Les membres du club m’ont dit : « Édouard, ce qui très important ici, c’est toujours d’avoir un ou deux maillots de Beşiktaş dans la boîte à gants. Tu verras, si jamais un jour tu es en retard ou coincé dans les bouchons, tu vas voir des flics, tu leur offres un petit maillot, et c’est réglé, ils t’escortent ! » » Même son de cloche du côté de Sciarra. « Ce sont des gens qui sont fiers de leurs couleurs, que ce soit l’Efes Pilsen, Fernerbahçe… Ils sont à fond derrière leur club. En deux mots, j’assimile ça à l’engouement et au supportérisme (sic)… Voire au fanatisme. »

Quand Bilba traverse une porte vitrée

Ça, c’est quand on se trouve du bon côté… Car les antres stambouliotes peuvent aussi se révéler être démentes pour leurs adversaires. En 2010, Stéphane Dumont, alors sociétaire du LOSC, découvre l’ambiance Fenerbahçe lors du 16e de finale retour de la Ligue Europa. « Quand ils marquent, on sait qu’à ce moment du match, on est éliminés. Il fallait laisser passer l’orage et faire le dos rond jusqu’à la mi-temps, car l’ambiance était folle. » Heureusement pour le Lillois, ils parviendront à égaliser et à passer au tour suivant sans encombre. Mais ce n’est pas toujours aussi facile. Retour au basket : en 1997, Villeurbanne se déplace à Istanbul pour y affronter Efes Pilsen en quart de finale de l’Euroligue. Vainqueurs 57-62, les Français pensent pouvoir fêter ça tranquillement, mais ils commencent à recevoir des projectiles dans la tronche dès la fin du match. Pris dans la cohue alors qu’il court vers les vestiaires, Jim Bilba ne peut éviter une porte vitrée qui éclate littéralement. Passé pas loin d’une fin de carrière prématurée, le Français s’en sortira avec une rupture des ligaments du pouce.

Mais les débordements ne se font pas qu’après la rencontre, Laurent Sciarra se souvient d’un match d’Euroligue avec Trévise. « On arrive dans une salle plongée dans le noir, on annonce nos numéros, ça siffle… Toujours dans le noir. À un moment, j’entends Željko Rebrača qui hurle. Il revient au banc pour constater les dégâts : il s’était fait entailler le front par le jet d’une bouteille d’eau en plein dans la gueule… C’est beaucoup d’intimidation, mais si tu remarques, l’équipe turque fait toujours des gros résultats à domicile. » Et comment passer à côté de la mésaventure des joueurs de Manchester United lors de leur visite à Galatasaray en 1993 ? « On nous jetait des trucs dessus alors qu’on était dans le bus. Les fans ont chanté toute la nuit à la porte de notre hôtel pour s’assurer qu’on ne puisse pas dormir, des gens téléphonaient dans nos chambres. Et quand le coach nous a dit d’aller tester l’atmosphère sur la pelouse… Les supporters étaient là depuis des heures, les chants passaient d’un côté à l’autre du stade. » Incapable de marquer, Man U se fera jeter avant même les phases de poules de la Ligue des champions.

« Il faut le vivre au moins une fois dans sa vie »

Quel que soit le camp qu’on représente, il faut de toute façon un sacré caractère pour résister à l’ambiance des stades de la cité turque. « Je pense que si tu arrives dans ce climat à 22 ans, tu peux être inhibé et y a de quoi péter les plombs » , estime Édouard Cissé, débarqué en Turquie à 30 ans. En basket, c’est pareil : pas question de décoller dans un club d’Istanbul si tu n’as enchaîné que des matchs au Havre et à Antibes. « Tu es dans un endroit inhabituel, et si tu n’es pas préparé à ça, tu exploses littéralement » , prévient Sciarra. Loin d’être exagérée, la réputation des stades turcs, en plus de faire office de 30 000e homme, fait frémir quiconque doit affronter l’équipe locale, au risque de lui foutre carrément les jetons. À Sciarra la conclusion : « Il n’y a que ceux qui ont vécu l’expérience qui peuvent comprendre cela. Il faut le vivre au moins une fois dans sa vie. Les gens peuvent dire qu’il s’agit uniquement d’un mythe… Un mythe de rien du tout ! Allez demander à Jim Bilba… »

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PS : article actualisé, préalablement publié en février 2014

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