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Quelle sélection pour Adnan Januzaj ?
Adnan Januzaj a de la chance. Déjà promis au plus bel avenir du côté de Manchester United, il va désormais pouvoir choisir sa sélection comme on opte pour un club. Au choix : Belgique, Albanie, Angleterre, Turquie, Kosovo, Serbie ou Croatie. Mode d'emploi.
Prenons les choses dans l’ordre. Adnan Januzaj est né le 5 février 1995 à Bruxelles de parents albanais nés au Kosovo. Il possède donc les nationalités belge et albanaise. Sans oublier que ses grands-parents sont originaires de Turquie et que ce brave Adnan joue à Manchester United depuis 2011 et réside donc en Angleterre depuis cette date. S’offre ainsi à lui un panel de sélections complètement fou : Belgique, Albanie, Angleterre, Kosovo, Turquie, Serbie et Croatie. En épousant l’une de ces nations, il se dessinera un récit de vie au choix : l’adopté, le fils prodige sur le retour, l’assimilé, le message de paix, l’enfant du monde, le joueur le plus européen de l’histoire, le scénario de film hollywoodien ou l’apatride. Et il va bien falloir choisir. Pas une mince affaire.
Opération séduction
Même s’il s’est déjà entraîné deux ou trois fois avec les U20 belges, Adnan Januzaj n’a jamais joué pour cette équipe. Son père lui aurait pour le moment demandé d’attendre d’être titulaire indiscutable dans un grand club avant de choisir. Ce qu’a confirmé le responsable des jeunes d’Anderlecht, Jean Kindermans : « Adnan ne veut pas brûler les étapes. Il ne veut pas être international avant d’être titulaire dans un club comme Manchester. » Même son de cloche chez Marc van Geersom, le coach des jeunes Belges qui explique que le joueur a refusé plusieurs convocations parce qu’il préfère jouer pour… l’Albanie. Aux dernières nouvelles, Marc Wilmots aurait relancé une opération séduction : « Je vais bientôt lui parler et ce sera à lui de décider. Il n’a jamais joué pour les Diables rouges, même pas avec les jeunes, il a toujours refusé. » La semaine dernière, le processus s’est même accéléré puisqu’il a fait appel à lui après la blessure de Vincent Kompany en vue des matchs en Croatie et face au pays de Galles. Avec toujours la même réponse : « Manchester United m’a indiqué qu’il n’avait pas encore effectué son choix quant à une équipe nationale. Pour personne » , a précisé le sélectionneur belge.
Pendant ce temps, le pays d’origine de ses parents tente lui aussi par tous les moyens de s’attirer ses services. « Il y a des émissions de télévision qui lui sont entièrement consacrées pour le convaincre de choisir l’équipe nationale albanaise » , raconte son agent Dirk Kriese. Pour le moment, l’Albanie aurait donc sa préférence. Aurait. Car récemment, Ilur Shulku, le secrétaire général de la Fédération albanaise, s’est exprimé dans le journal kosovar Gazeta Express en ces termes : « Januzaj n’aime pas l’Albanie. » Avant d’ajouter : « Il y a peu de chances qu’il joue avec l’Albanie. Nous n’avons pas parlé encore avec le joueur lui-même, mais les discussions avec sa famille ont montré qu’il n’était pas intéressé. Officiellement, il n’a cependant pas encore fait son choix. » L’histoire d’Adnan Januzaj avec les sélections nationales se résume donc pour le moment à des refus, quelques convocations, pas mal de conditionnel et beaucoup de séduction. En vrai, au milieu de ce poker menteur et, disons-le, de ce foutoir, le joueur pourra encore changer d’avis… tant qu’il joue en sélection de jeunes. Depuis 2009 et le congrès de la FIFA à Nassau, un joueur disposant de la double nationalité peut changer d’équipe nationale sans limite d’âge s’il n’a été sélectionné qu’en catégories de jeunes.
Angleterre, Turquie, Serbie, Croatie et… le Kosovo
Derrière la Belgique et l’Albanie, dans la liste des poursuivants, l’Angleterre, où le garçon explose, s’est également positionnée. Car son talent ne laisse pas insensible Roy Hogdson : « Il est à Manchester United depuis longtemps, il faudra sérieusement se poser la question. Il n’y a aucun doute que c’est un vrai talent, on le suit, mais il y a beaucoup de choses à discuter en amont. » Seulement, si Januzaj choisit de jouer pour les Three Lions, il ne sera habilité à le faire qu’en 2018. En accord avec les lois de la FIFA, pour porter le maillot de son pays d’adoption, il faut y avoir vécu au moins cinq ans après avoir fêté son 18e anniversaire. À 23 ans, Adnan Januzaj aura déjà laissé passer une Coupe du monde et un Euro. Sûrement deux compétitions de trop qui réduisent les chances anglaises d’emporter la mise. En fin de contrat cet été, il pourrait même en cas de transfert dans un club italien, espagnol, allemand ou français envisager de jouer pour une autre grande sélection européenne. Beaucoup plus hypothétique. D’autant que Manchester United ne le laissera sans doute pas partir après avoir laissé filer Paul Pogba.
Reste la Turquie, le pays de ses grands-parents, et la Croatie qui apparaît déterminée, à en croire l’entraîneur des espoirs Ivo Susak, qui s’est exprimé en ces termes dans La Dernière Heure : « Son nom est dans notre carnet depuis six bons mois. C’est un entraîneur croate d’origine albanaise qui a attiré mon attention. D’après nos informations, sa mère est d’origine croate. Nous n’avons pas encore eu de contact avec Adnan, mais nous pourrons le faire rapidement. Ce ne sera pas facile de le convaincre, mais de nombreux Albanais du Kosovo ont tendance à pencher vers la Croatie… » Ont tendance… Le plus fou dans cette histoire, c’est que le garçon pourrait tout aussi bien décider d’envoyer balader tout ce beau monde et de ne jouer aucune compétition officielle avec l’équipe du Kosovo, pas encore reconnue par la FIFA. Un choix qui serait complètement irrationnel. Mais pas le moins beau.
Par Antoine Mestres