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Quelle est la recette du succès de Galatasaray, seule équipe européenne invaincue ?
À l’aube de son déplacement ce jeudi soir sur le terrain de l’AZ Alkmaar (18h45), le Galatasaray Spor Kulübü reste la seule équipe engagée en Coupe d’Europe à être toujours invaincue cette saison, championnat national et compétition continentale confondus. Si chaque sortie des Jaune et Rouge est l’assurance d’une rencontre haute en couleur, quels sont les secrets de fabrication du chef Okan Buruk pour une telle explosion de saveurs ?
Puisqu’il ne faut que deux heures à peine pour relier Istanbul à Amsterdam via la Turkish Airline, la délégation de Galatasaray avait décidé d’attendre mercredi pour rejoindre Alkmaar, ville hôte du duel entre l’AZ et les doubles champions de Turquie pour la cinquième journée de Ligue Europa. L’occasion pour les joueurs stambouliotes de profiter de leurs familles, mais peut-être aussi de jeter un œil au multiplex de la C1 mardi soir : quoi qu’il en soit, il n’aura échappé à personne que la cinglante défaite du Sporting Portugal à domicile face à Arsenal (1-5) fait désormais de Galatasaray la dernière équipe invaincue parmi les 108 équipes engagées en Coupe d’Europe, elle qui n’a pas encore goûté à la défaite en 12 matchs de championnat et 4 de Ligue Europa.
Disons-le tout de suite, cette belle statistique se doit d’être tempérée, car le club le plus titré de Turquie a bel et bien chuté à la fin de l’été, et plutôt deux fois qu’une : alors que les rives du Bosphore étaient encore bondées d’aoûtiens désireux de profiter des dernières heures de vacances, les Young Boys sont venus à Istanbul crucifier les rêves de Ligue des champions du Gala, vainqueurs au match retour (0-1) d’un barrage de C1 que les Suisses avaient déjà pris par le bon bout une semaine plus tôt à l’aller (3-2). Reversés en Ligue Europa et désireux d’allier un beau parcours européen à une éventuelle troisième couronne nationale consécutive, Galatasaray a aussitôt repris sa marche en avant, tel un rouleau compresseur, et pointe actuellement en tête de la Süper Lig turque et à la troisième place du classement de C3, à la faveur de ses 14 victoires et 2 matchs nuls pour aucune défaite toutes compétitions confondues.
Une bonne pincée de fougue, un zeste d’expérience
Okan Buruk (51 ans) n’a jamais été réputé pour ses talents de buteur, en dépit de ses 8 pions en 56 capes pour la sélection turque, dont il faisait partie lors de l’épopée historique du Mondial 2002. Pourtant, c’est peu dire que l’ancien milieu de terrain, aujourd’hui entraîneur de Galatasaray, prône une philosophie de jeu éperdument tournée vers l’offensive et la recherche du but à tout prix. Une recette qui marche en matière de statistiques, en témoignent les 46 buts inscrits par le Cimbom en seulement 16 rencontres. Ces chiffres confirment l’impression visuelle dégagée par les Stambouliotes sur le terrain, dominateurs et ultra-offensifs à chaque sortie. Le 3-5-2 déployé par Boruk depuis le début de saison y est pour beaucoup, et fait la part belle aux nombreuses armes à la disposition du coach sur le front de l’attaque.
De fait, les options offensives sont nombreuses et peuvent faire pâlir plus d’une grosse écurie occidentale : Osimhen, Ziyech, Mertens, Batshuayi et Icardi ont tous connu les joutes des grandes soirées européennes et partagent aujourd’hui toute leur expérience avec leurs jeunes coéquipiers, moins expérimentés. Si Mauro Icardi, meilleur buteur du dernier championnat et icône de l’attaque stambouliote, ne rejouera pas avant la fin de saison, la faute à une vilaine rupture des croisés le mois dernier, Victor Osimhen semble être capable de tenir la baraque à lui tout seul. Sur un nuage depuis son arrivée surprise début septembre, le Nigérian prêté par le Napoli empile les buts comme des dürüms, au plus grand plaisir d’un Rams Park (ex Türk Telekom Arena) rugissant de plaisir à chaque coup de casque du buteur masqué. À ses côtés, Michy Batshuayi semble être le grand bénéficiaire de la blessure de l’ex-futur mari de Wanda, lui qui reste sur deux buts en deux matchs, face à Samsunspor (3-2) puis Bodrum (0-1) samedi dernier. Son compatriote et coéquipier Dries Mertens, du haut de ses 37 printemps, continue lui de distribuer des galettes à Osimhen en souvenir du stade San Paolo, au contraire d’Hakim Ziyech, davantage préoccupé par ses embrouilles diplomatiques avec le roi du Maroc que par la conclusion de buts immanquables.
Si, derrière eux, le milieu est partagé par le créateur brésilien Gabriel Sara (18 millions d’euros claqués cet été par le GSK, record du club) et le roquet uruguayen Lucas Torreira, la clé de voûte du système de Galatasaray repose sur les ailes et ce que la hype désigne désormais comme des « pistons ». Censés apporter toute leur vitesse et le surnombre dans la moitié de terrain adverse, ces arrières latéraux offensifs – ou ailiers défensifs, c’est selon – se muent en réalité en véritables attaquants dans le 3-5-2 du chef Buruk. Et cela tombe bien, car les jeunes titulaires du poste, Yunus Akgün et Barış Yılmaz (24 ans tous les deux), sont avant tout des offensifs de formation, et ça se voit : courses effrénées vers l’avant, dribbles chaloupés et provocation balle au pied sont autant de qualités mises en avant par les deux pépites turques, pas en reste non plus lorsqu’il s’agit d’envoyer des bastos de loin, en témoignent leurs bangers respectifs en Ligue Europa cette saison, face à Tottenham pour Akgün et contre Elfsborg pour Yılmaz.
Oh le but SUBLIME de Yunus face à Tottenham 🤯#GALTOT| #UEL pic.twitter.com/L1NZwvTevK
— CANAL+ Foot (@CanalplusFoot) November 7, 2024
Attention à l’indigestion défensive
Si les ultrAslan, comme les autres fans de Galatasaray, espèrent un parcours européen des plus magiques en souvenir du titre de 2000 en Coupe de l’UEFA, il manque toutefois quelques ingrédients pour que la mayonnaise puisse prendre pleinement lorsque les matchs risquent de s’intensifier face à des cadors européens. Car ce dispositif ultra-offensif a évidemment son penchant négatif : si un boxon perpétuel est apporté par les joueurs turcs balle au pied, les espaces sont légion à la perte de balle dans le dos des pistons. Et si le Gala marque beaucoup, il encaisse également beaucoup (trop) de buts pour une équipe aussi dominante.
Avec 19 buts encaissés en 16 matchs toutes compétitions confondues, les Jaune et Rouge peinent à être imperméables, laissant bien souvent l’expérimenté, mais pas magicien Fernando Mulsera (38 ans) démuni face aux assauts adverses. Les buts encaissés lors de la victoire de prestige face à Tottenham (3-2) symbolisent le manque de couverture défensive des Stambouliotes, autant que certains résultats loufoques du Gala cette saison : victoire 8-3 face à Erokspor, match nul 3-3 face à Kasımpaşa après avoir pourtant mené 3-0, victoire dans la douleur face à Elfsborg en Ligue Europa (4-3) après avoir mené 3-0… Une défense poreuse mais pourtant expérimentée, menée par les deux internationaux turcs Abdülkerim Bardakcı (12 sélections) et Kaan Ayhan (68 sélections), mais également par l’ex-Spur Davidson Sánchez, malheureusement connu dans le nord de Londres pour sa propension à la boulette. Si, à ce stade de la saison, les balbutiements défensifs ne semblent pas empêcher le Galatasaray SK de rouler sur la concurrence, les champions de Turquie seraient bien avisés d’ajouter un brin de solidité à la recette s’ils veulent apposer la cerise sur le gâteau européen en fin de saison. Et ça commence ce jeudi soir, face à l’AZ.
Par François Goyet