- Coupe du monde 2014
- Groupe G
- Portugal/Ghana
Quel avenir pour le Portugal ?
Après un Euro 2012 convainquant, le Portugal n'a pas su confirmer. En tout cas pas pour le moment. En cause, l'entêtement de Paulo Bento à utiliser des cadres âgés et usés alors qu'une ribambelle de jeunes frappe à la porte de la sélection. De quoi être optimiste pour l'Euro 2016 à défaut d'espérer grand-chose pour la suite du Mondial. Sauf si Bento ne les lance pas de le grand bain...
« Si le Portugal ne se qualifie pas pour les huitièmes de finale, je mettrai mon poste de sélectionneur à disposition. » Comme Prandelli et Lamouchi avant lui, Paulo Bento pourrait bien partir… En fait non. Le coach portugais a fait volte-face la veille du dernier match de poule de la Selecção et a promis qu’il « ne démissionnerait pas en cas d’élimination » . C’est que le lascar se sent bien dans son fauteuil. Et puis de toute façon, s’il avait présenté sa démission, l’aurait-on acceptée ? Pas sûr. Car du côté de la Fédération portugaise de football, on ne voit « aucune raison de ne pas envisager le futur avec lui » , dixit Humberto Coelho, son vice-président. Sans oublier que le Portugal n’est pas encore éliminé, même si le miracle a peu de chances d’arriver. Et s’il doit avoir lieu, il passera par une révolution générationnelle inévitable. Reste à savoir si Paulo Bento l’a compris après deux matchs décevants au Brésil ou s’il n’a pas suffisamment de recul pour admettre que ses soldats – Raul Meireles, Hélder Postiga, Hugo Almeida, Bruno Alves – ne sont plus que l’ombre de ce qu’ils étaient pendant leur jeunesse. Il y a plus de talent et d’ambition sur la touche et c’est un fait. Le Portugal d’aujourd’hui en est au même stade que la France de 2012. À lui de négocier ce virage serré aussi bien que les Bleus. Avec, ou sans Paulo Bento. Les différents résultats des sélections de jeunes ainsi que les quelques génies sortis des différents centres de formation portugais (Bruma, Carlos Mané, Ivan Cavaleiro) laissent présager le meilleur. Mais renouveler ne veut pas dire faire table rase. Il faut garder des cadres, des guides. De ce côté-là, et au vu de l’attachement de Bento à ses vieux, il ne devrait pas y avoir de soucis.
Cristiano Ronaldo doit encore évoluer
Le premier d’entre eux est évidemment Cristiano Ronaldo. Le capitaine portugais réalise un Mondial indigne de lui à cause des blessures, malgré quelques éclairs de génie comme son amour de centre pour Silvestre Varela. Mais cette Coupe du monde n’en reste pas moins riche en enseignements sur le rôle qu’aura à jouer le numéro 7 du Real en Selecção dans le futur. Face aux États-Unis, il a démontré qu’il était capable de s’appuyer sur autre chose que ses qualités physiques irréelles en décrochant, en jouant bas, en remise, bref, en jouant en équipe. Ce n’est pas encore Zizou mais ce match prouve qu’évoluer n’est pas un problème pour celui qui est passé de tricoteur à cyborg en un éclair. Il ne serait pas impossible de retrouver le Portugais dans un rôle de meneur de jeu excentré, voire même axial en 2016. Une telle configuration présenterait l’avantage de rétablir l’équilibre entre les ailiers et les milieux axiaux, les premiers étant beaucoup plus nombreux que les seconds. Avec Nani – qui peut retrouver un niveau de jeu raisonnable en se barrant de Manchester -, Rafa Silva, Bruma et Carlos Mané pour ne citer qu’eux, les côtés devraient rester l’axe fort du jeu portugais.
Au milieu, Miguel Veloso et Moutinho seraient mis en concurrence avec William Carvalho, immense contre les USA, et Adrien Silva (né à… Angoulême), son coéquipier au Sporting, grand absent du groupe de Paulo Bento avec Ricardo Quaresma. Les deux derniers cités permettraient, en plus d’apporter une certaine maîtrise technique, de muscler un milieu de terrain actuellement très friable physiquement. Des Moutinho, Veloso et Meireles, ont beau être des chiens enragés, ils possèdent des gabarits très limités pour faire mal à des équipes athlétiques comme l’Allemagne ou la France, dont l’entrejeu est quasiment aussi costaud que la charnière centrale. Derrière, Pepe n’a que 31 ans et a encore au moins un Euro dans les pattes. Luis Neto devrait s’associer à lui pour former la nouvelle défense centrale lusitanienne, épaulée par Fábio Coentrão (seulement 26 ans) et João Pereira, mis en concurrence avec Cédric Soares, en attendant l’éclosion du très prometteur João Cancelo, ami des fins connaisseurs de Football Manager. Enfin, en attaque, Nélson Oliveira mérite bien une nouvelle chance vu toutes celles que Bento accorde à Postiga et Almeida, en attendant Cavaleiro – qui compte déjà plusieurs capes chez les A – et Gonçalo Paciência, le fils de Domingos..
Paulo Bento doit changer de jeu
Avoir de bons joueurs à tous les postes, c’est bien, mais il faut aussi une bonne tactique, une stratégie. Le nouveau Portugal devra avoir un plan de jeu adaptable à ses adversaires et pas seulement un vague schéma qui consiste à jouer long ou court sur Ronaldo, Nani et les latéraux pour que ces derniers centrent ou tirent. Quelque chose de suffisamment solide pour emmerder ses adversaires même quand les chiens teigneux du milieu de terrain sont moins en jambes. Car le constat est là. La Selecção de Paulo Bento n’a réussi en 2012 que grâce à son attitude, à sa grinta, comme le disent les Sud-Américains. Il n’y a pas vraiment de mise en place en position défensive ni de projet de jeu.
Pourtant, et vu le réservoir de joueurs doués d’une technique au-dessus de la moyenne, le Portugal a plusieurs options qui s’offrent à lui. Du jeu de possession court à un jeu au sol plus rapide et vertical, du 4-3-3 au 4-4-2 expérimenté face à la Grèce en amical, il y a de quoi créer. C’est à Bento d’oser, surtout s’il reste. Surtout s’il veut espérer se qualifier pour les huitièmes de finale. Surtout s’il ne veut pas rater l’Euro 2016. Car si cela arrive, il n’y aura plus d’amitiés à la FPF. Car si cela arrive, il aura seulement fait perdre du temps à la Selecção et prendra inévitablement la porte. À lui de choisir.
Par William Pereira