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Quel accueil pour Mario Götze ?
Après avoir raté la DFL-Supercup sur blessure, l'ancienne idole du BVB revient aujourd'hui pour la première fois avec le Bayern à Dortmund. Un retour au Westfalenstadion qui ne devrait pas être des plus calmes, tant son départ a été vu comme une trahison de la pire espèce.
Le 23 avril 2013, à quelques heures de la demi-finale aller de Ligue des champions contre le Real Madrid, on apprend que Mario Götze va rejoindre à la fin de la saison les rangs du Bayern Munich, qui a fait sauter sa clause libératoire de 37 millions. Götze veut passer un cap, évoluer sous les ordres de Pep Guardiola, gagner des titres. Mais il va surtout glaner un statut de pestiféré. On ne passe pas à l’ennemi comme ça. Surtout quand on est autant aimé par les supporters d’un club où on est arrivé à huit ans. Et surtout qu’on a annoncé ne jamais vouloir quitter. Quand on est l’espoir de tout un peuple de mettre fin à l’hégémonie bavaroise. Dès lors, les maillots de l’ancien enfant chéri barrés d’une croix au scotch vont se multiplier dans les tribunes. On est cruel avec ceux qu’on aime. Presque heureusement pour lui, Mario se blesse lors du retour au bout de 13 minutes, et ne reportera plus jamais cette tunique qui était sa seconde peau. Quelques mois plus tard, une nouvelle blessure le dispense de DFL-Supercup : c’est des tribunes qu’il assiste à la victoire 4-2 de ses anciens camarades contre les nouveaux. Mais aujourd’hui, Mario n’a aucune excuse. Il va falloir revenir sur les lieux du crime. Probablement dans la peau d’un titulaire, compte tenu de l’absence de Franck Ribéry, même si on ne sait jamais ce que peut inventer Pep. Et il va falloir être costaud pour affronter le mur jaune.
Même pas peur
En tout cas, le Wunderkind a la confiance. « Je n’ai pas peur de retourner là-bas, a-t-il expliqué à Sport Bild.Néanmoins, je comprend les fans qui préféreraient me voir avec le maillot de Dortmund. Pour moi, c’est juste la confirmation de ce que j’ai accompli avec le club. Nous avons gagné des titres ensemble et même atteint la finale de la Ligue des champions. Quand je reviens maintenant, je dois accepter le fait que toutes les réactions dans le stade ne seront pas positives, mais ça fait partie du football. J’ai grandi à Dortmund, été à l’école là-bas et j’y ai touché mes premiers ballons, jouant de nombreux matchs pour le Borussia. J’y ai beaucoup de bons souvenirs, Dortmund est une grand part de mon passé et j’ai hâte d’y retourner. » Néanmoins, Michael Zorc (le directeur sportif) et Hans-Joachim Watzke (le président) ont beau tenter de calmer les esprits, tout le monde sait qu’il ne sera pas accueilli les bras ouverts. Et lui le premier. « C’est l’un des pires moments de ma carrière » , a-t-il balancé à Kicker. Alors Jens Lehmann, qui a joué pour Schalke et Dortmund (ce qui est bien pire), a tenté de lui donner deux trois conseils : « L’accueil ne sera pas fait avec des fleurs et n’aura rien d’agréable. Il ne devra faire aucune objection, ne tirer aucun corner et rester principalement dans le rond central – et amener des boules Quiès. » En effet, il suffit d’un petit tour sur les forums de fans pour comprendre que Mario va vivre un enfer, même si certains appellent à la modération et au bon souvenir. Le quotidien munichois Abendzeitung a interrogé certains d’entre eux, et ils sont tout sauf tendres. « Ça va être un véritable concert de sifflets, avec tout ce que cela implique » , « Il sera hué sans pitié pour être allé au Bayern » , « S’il avait eu des couilles, il serait parti à l’étranger » , « J’ai fait refloquer mon maillot après son départ. Je ne lui pardonnerai jamais » .
La Haine
Que le Golden Boy 2011 se rassure, il ne sera pas le premier à subir les foudres de son ex. Il pourra toujours se renseigner auprès de son coéquipier Manuel Neuer, giflé par une fan de Schalke en 2011 alors qu’il fêtait la Coupe d’Allemagne remportée avec les Knappen, reçu à Gelsenkirchen avec des affiches le montrant en prostitué ou une notice nécrologique. Ou se tourner vers Jens Jeremies, passé du 1860 Munich au Bayern en 1998 et surnommé depuis « Judas Jeremies » . Mais la référence outre-Rhin reste Lothar Matthäus, transféré à l’été 1984 d’un autre Borussia, celui de Mönchengladbach, au Bayern. Pour son dernier match avec Gladbach, la finale de la Coupe, Matthäus est le premier tireur de la séance de pénalty et rate, ce qui débouche sur la défaite de son équipe. L’adversaire ? Le Bayern… Le Ballon d’or 1990 en a tiré un mantra : « Utiliser leur haine comme motivation. » Une leçon que ferait bien d’appliquer Götze s’il veut sortir vivant du Westfalenstadion. Parce que, pour la première fois, il y marchera seul.
Par Charles Alf Lafon