- Écosse – Third Division
- Queen’s Park FC/Glasgow Rangers
Queen’s Park/Rangers, l’autre derby de Glasgow
Condamnés cette saison à évoluer dans les bas-fonds du foot écossais à cause de graves problèmes financiers, les Rangers y retrouvent un très vieux rival de Glasgow : le Queen’s Park FC, mythique club à succès au XIXe siècle, au parcours pour le moins atypique. Les deux formations s’affrontent ce soir à Hampden Park.
« The original Glasgow derby » . C’est ainsi qu’a été nommée la confrontation entre le Queen’s Park FC et les Rangers. Et pour cause, le premier match entre les deux clubs date de 1879, à une époque où le Celtic n’avait pas encore été créé. Nous n’en sommes encore à ce moment qu’à la préhistoire du football, un sport qui ne se pratique sous sa forme moderne que depuis quelques années chez le voisin anglais. Le tout premier club à voir le jour là-bas est le Sheffield FC en 1857. Dix ans plus tard, une bande d’amis de la bourgeoisie de Glasgow décide aussi de se structurer en équipe. L’association Queen’s Park FC est née, devenant pour toujours la plus vieille d’Écosse. Étant donné le peu de concurrence des premières années, les débuts du club sont du genre flamboyants. À tel point qu’en 1872, quand est organisé le premier match international de l’histoire du football entre l’Angleterre et l’Écosse, cette dernière sélection est composée dans sa totalité de joueurs des Queen’s Park ! Du coup s’agissant du maillot, la Fédération ne s’emmerde pas et décide de refiler aux 11 premiers internationaux écossais une liquette bleu marine et un short blanc, comme ils en ont l’habitude en club. Ces couleurs restent encore aujourd’hui celles de la sélection écossaise, tandis que celles du club ont assez vite évolué vers un motif zébré noir et blanc horizontal, histoire de ne pas confondre les deux formations certainement…
« Ludere Causa Ludendi »
Les « Spiders » , comme on les surnomme à partir de cette époque, conquièrent 10 des 20 premières Coupes d’Écosse attribuées entre 1874 et 1893. La domination du club de Glasgow sur le territoire national est telle qu’il décide de s’exporter plus au sud pour disputer la FA Cup anglaise, déjà bien plus prestigieuse. Par deux fois en 1884 et 1885, il va atteindre la finale de l’épreuve, se heurtant ces deux années au même dernier obstacle : Blackburn. L’année suivante en 1886, la fédé anglaise interdit l’inscription aux formations écossaises… C’est dans ces mêmes années qu’est créée la Scottish Football League, qui structure l’organisation des compétitions de football et autorise la professionnalisation des joueurs. Quasi tous les clubs d’Écosse acceptent de bon cœur la formule, sauf Queen’s Park, qui a, depuis ses débuts, l’amateurisme et ses valeurs chevillés au corps. « Ludere Causa Ludendi » est ainsi inscrit sur le blason, du latin qui signifie en gros : « Jouer pour l’amour du jeu » . Une philosophie sacrément belle, mais aussi sacrément datée, et ce, dès la fin du XIXe siècle. Farouchement accroché à cette utopie originelle, le premier club de Glasgow laisse passer le train du professionnalisme et du haut niveau.
Highlander du foot écossais
Pendant la première moitié du XXe siècle, le Queen’s Park FC parvient néanmoins à vivoter épisodiquement parmi l’élite. Sa dernière saison à évoluer en championnat avec les Rangers, le Celtic et autres grands clubs d’Écosse remonte à 1958. À cette époque, l’équipe compte dans ses rangs un très jeune attaquant prometteur qui fait ses débuts avec les seniors, un certain Alex Ferguson… Mais limité par son indéboulonnable statut d’amateur, le club ne peut retenir longtemps ses meilleurs espoirs. Depuis un demi-siècle, le QPFC est donc condamné – s’est condamné tout seul, a-t-on envie de dire – à évoluer à l’ombre de l’élite. Sur l’ensemble des quatre divisions qui structurent le foot écossais, il est le seul club avec le statut d’amateur. Un statut revendiqué qui permet d’entretenir la légende. Queen’s Park est le témoin vivant d’un football d’un autre âge, un Higlander qui, malgré ses pauvres résultats sportifs, est resté le gardien d’un stade tout aussi mythique : Hampden Park. L’enceinte de l’équipe nationale, qui fut avant-guerre la plus grande du monde – avant de se faire dépasser par le Maracanã – accueille tous les 15 jours depuis plus d’un siècle les matchs de championnat du Queen’s Park, devant une affluence peinant à dépasser les 500 spectateurs. En recevant les voisins et vieux rivaux des Rangers ce soir, il devrait certainement y en avoir un peu plus. Comme au bon vieux temps du XIXe siècle.
Par Régis Delanoë