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Queen Henry II

Par Lhadi Messaouden // Tous propos recueillis par LM
5 minutes
Queen Henry II

Sélectionnée par l'UEFA parmi les trois meilleures joueuses de la saison 2014-2015, Amandine Henry a réalisé une saison exceptionnelle. Étincelante avec l'Olympique lyonnais, la milieu de terrain s'est révélée au grand public lors du Mondial au Canada. Laissée un temps sur le bord de la route, Amandine Henry est aujourd'hui la meilleure joueuse française. Portrait d'une jeune femme qui pèse dans le foot féminin.

Puissante et précise. Alors que la France déroule lors de son troisième match du Mondial canadien contre le Mexique, une milieu de terrain de 25 ans décide d’étaler sa classe et son audace à la planète toute entière. Et ça n’a pas loupé. À la 80e minute de cette rencontre, la joueuse s’empare du cuir aux 25 mètres et décoche une monstrueuse frappe qui se loge dans la lucarne adverse. Ce 17 juin, la gardienne mexicaine a encaissé quatre autres buts, mais celui-ci restera longtemps dans la mémoire collective. C’est le premier coup d’éclat sur la scène internationale d’une blonde dont le patronyme renvoie au meilleur buteur de l’histoire des Bleus. Cette jeune femme se nomme Amandine Henry et c’est l’une des trois meilleures joueuses européennes. Mais avant d’en arriver là, Amandine a dû prendre son mal en patience. Et pas qu’un peu.

Un parcours atypique

S’il fallait titrer la carrière d’Amandine Henry par le nom d’un très mauvais film, ce serait sans aucun doute La revanche d’une blonde. Baignée dans le monde du football depuis son plus jeune âge en raison d’une famille d’amoureux du ballon rond, Amandine a commencé à taper dans le cuir à 5 ans dans sa région natale lilloise. Contaminée par le virus foot, elle connaît ses premières aventures à l’OSM Lomme. David Vanlerberghe, son coach en poussin, se souvient encore d’elle. « On sentait qu’elle avait le football dans le sang. À un si jeune âge, c’est difficile de parler de talent, mais on voyait qu’elle avait un truc en plus, notamment au niveau de la technique. »

Après cette première expérience, elle connaît deux autres clubs : Lambersart et Hénin-Beaumont, la meilleure équipe féminine du Nord du moment. Grâce à des prestations intéressantes, elle obtient un sésame pour l’endroit où se retrouvent toutes les footeuses à gros potentiel : Clairefontaine. En intégrant le fleuron de la formation française, Amandine améliore l’ensemble des qualités qui sont déjà les siennes : la puissance, la technique, l’intelligence de jeu et la frappe de balle. Des caractéristiques rares chez les filles qui attisent la convoitise de certains clubs, notamment l’Olympique lyonnais. Désireux de lancer définitivement sa section féminine, l’équipe rhodanienne engage Henry en 2007. Le début de la galère pour elle.

« On a pensé qu’elle ne pourrait plus jouer »

Pendant trois saisons, elle poursuit tranquillement sa formation et n’oublie pas de marquer les équipes de France de jeunes de son empreinte. En progression constante, elle finit par frapper aux portes de la sélection nationale et se retrouve dans le groupe qui participe au championnat d’Europe 2009 en Finlande. Quelques mois après cette compétition, son genou l’handicape de plus en plus, au point de devoir subir une greffe de cartilage. Au courant de ce problème à son arrivée en 2010, le nouveau coach de l’OL, Patrice Lair, s’est immédiatement concentré dessus. « On était avec le médecin du club et Amandine. On a mis en place un plan de travail précis pour la remettre sur le terrain. Pendant un temps, on a pensé qu’elle ne pourrait plus jouer au foot » , explique-t-il. À force de courage et d’abnégation, la milieu de terrain se rachète une condition physique et fait à nouveau des ravages. « Elle a été essentielle dans la conquête de nombreux titres » , argumente Patrice Lair. Pourtant considérée comme l’une des meilleures à son poste, l’équipe de France ne fait plus appel à ses services pendant près de deux ans et demi.

Le sélectionneur de l’époque, Bruno Bini, a fait le choix de se priver d’elle. « L’entraîneur avait ses raisons de ne pas la prendre. C’était son choix, il fallait le respecter » , explique poliment Sonia Bompastor, ancienne coéquipière d’Amandine chez les Bleues et à Lyon. Interrogé à de nombreuses reprises sur l’absence du milieu de terrain, Bini se montre énigmatique, évoquant de manière ambiguë la « dangerosité » qu’Amandine représente pour le groupe France. Un argument difficilement compréhensible pour Patrice Lair. « C’est surprenant. C’est une fille très simple à gérer avec un excellent état d’esprit et qui donne tout lors des entraînements. Bruno Bini avait fait un choix, tout simplement. » Privée des Bleues, Amandine vit très mal cette exclusion, mais fait tout pour que cela n’influe pas sur ses performances avec Lyon. Une force de caractère impressionnante qui finit par être récompensée. Après un Euro 2013 décevant et une élimination en quarts, Bruno Bini quitte son poste et se fait remplacer par Philippe Bergeroo. La porte équipe de France est à nouveau ouverte pour Amandine.

Une joueuse peu commune

Appelée dès les premières listes de Philippe Bergeroo, Amandine s’impose au fur et à mesure comme une taulière de cette nouvelle équipe de France. Très technique, puissante et dotée d’une frappe de balle impressionnante, elle relègue petit à petit la concurrence sur le banc et fait régner la loi au milieu de terrain. « Elle a des qualités que l’on ne voit pas beaucoup dans le football féminin. Elle peut effacer une ligne adverse juste sur une prise de balle ou une transversale bien sentie » , commente Patrice Lair. Sonia Bompastor pense même qu’elle peut encore progresser. « Amandine fait des choses peu communes. Mais je pense qu’elle doit encore améliorer des aspects de son jeu, notamment dans le domaine tactique. » Un petit bémol, certes, mais qui ne l’empêche pas de faire partie des meilleures.

Auteur d’une saison 2014-2015 toujours aussi remarquable avec Lyon, Amandine a aussi été élue Ballon d’argent de la Coupe du monde au Canada. Une reconnaissance méritée tant son influence a été impressionnante dans le jeu des Bleues. La native de Lille a même été sélectionnée parmi les trois meilleures joueuses européennes par l’UEFA, mais elle a dû laisser filer le titre à l’Allemande Célia Šašić. Ce n’est sans doute que partie remise. Forte d’une expérience réussie sur la scène mondiale, Amandine va poursuivre sa progression. À 25 ans, elle possède déjà un palmarès savoureux : huit championnats de France, quatre Coupes de France et deux Ligues des champions. Il ne lui manque plus qu’un titre avec les Bleues. Ça tombe bien, les Jeux olympiques de Rio approchent à grands pas. Il ne lui reste plus qu’à guider la France vers le sacre, comme toute reine qui se respecte.

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