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Quand RDA et URSS se partageaient le bronze

Par Côme Tessier
4 minutes
Quand RDA et URSS se partageaient le bronze

Aux JO de 1972, à Munich, le tournoi de football s'est terminé d'une drôle de manière. Pendant la prolongation du match pour la troisième place, URSS et RDA ont fait le choix de ne pas se départager. Elles auront ainsi toutes deux une médaille de bronze, au nom de l'amitié entre les peuples et surtout du gagnant-gagnant.

L’image est étrange. Quatre équipes de football sur un podium olympique. Elle n’a eu lieu qu’une seule fois, en 1972. Une faille du règlement de la FIFA a suffi à l’URSS et la RDA pour s’engouffrer dans la brèche. Avant les Jeux olympiques de Munich, un changement des règles du tournoi précise qu’à la fin de la prolongation, aucune séance de tirs au but n’est à prévoir. En fait, ce cas précis provoquerait un partage de la médaille, qu’elle soit d’or ou de bronze. Alors, à la fin du match pour la troisième place à l’Olympiastadion, alors que le score est de 2-2, l’URSS et la RDA n’attaquent plus. Le pacte de non-agression n’est pas clairement établi, mais dans l’esprit, c’est net : les deux sélections n’ont pas envie de prendre le risque d’attaquer.

Le calcul est simple. En marquant un but, c’est la même médaille au bout ; en encaissant un but, c’est la perte de toute médaille olympique. Reinhardt Häfner, ancien joueur de cette sélection et idole au Dynamo Dresde, confirme que la règle est connue et prise en compte. « On le savait bien avant le match. » Alors la prolongation s’est terminée comme elle avait commencé : à 2-2, avec la certitude qu’à la fin, les deux équipes auraient leur médaille pour signer un 4/4 des « pays de l’Est » au palmarès de cette olympiade.

L’Est souverain

Dès les qualifications, la mainmise du football à l’est du rideau de fer est évidente. En dehors du pays d’accueil, qualifié d’office, seul le Danemark parvient à créer la surprise en éliminant la Roumanie. Les autres sont tous des pays satellites (RDA, Pologne, Hongrie – tenante du titre) et la maison-mère, l’URSS. Il y a un avantage certain pour ces pays, dans la formule alors réservée aux JO pour le football. Seuls les joueurs amateurs peuvent participer. « Il n’y avait pas de professionnels dans les équipes d’Europe de l’Est, précise Häfner. C’est la raison première pour laquelle ces pays étaient plus forts. Ils pouvaient sélectionner tous les joueurs à leur disposition. » Les pays communistes mettent à profit le système et squattent les places d’honneur sans problème.

Dans ce tournoi à deux phases de poules pour sortir directement en finale ou match pour la troisième place, les nations de l’Est prennent les deux premières places sans trop de soucis. Hongrie et Pologne se disputeront l’or. La Russie termine derrière les Polonais. Pour la RDA, toutefois, il faut un match couperet contre la sœur de l’Ouest pour avoir la qualif, dans la dernière rencontre de la deuxième phase de poules. En cas de défaite, c’est la République fédérale qui affrontera l’Union soviétique pour le bronze. Les jeunes Hoeneß et Hitzfeld, malgré leurs buts, s’inclinent sur le fil 3-2 contre une équipe qui ressemble fortement à celle qui viendra, deux ans plus tard, s’offrir une victoire de prestige au Mondial, 1-0. La RDA s’offre ainsi une chance de médaille.

Armistice footballistique

Plusieurs éléments expliquent le comportement des équipes dans l’emballement final. Il y a bien entendu l’aspect géopolitique. Aujourd’hui, Reinhardt Häfner réduit cependant l’importance du caractère politique de ce partage de médaille. « À 2-2, les deux équipes n’ont plus vraiment fait d’efforts. Mais de mon point de vue, cela n’avait pas d’arrière-fond politique. C’était simplement parce que la règle permettait d’avoir la médaille de bronze en cas de nul. » Surtout, même si 80 000 spectateurs sont bien présents dans l’enceinte munichoise, il est 10h lorsque la RDA et l’URSS s’affrontent. Le silence règne. L’atmosphère n’invite pas à une lutte à tout prix et à chercher une victoire au bout des efforts. « Pendant le match, l’ambiance n’était pas très bonne… » Cette impression à froid de Reinhardt Häfner est largement confirmée par les images du match. Pas de chants, pas de cris. Seuls les buts soviétiques permettent d’entendre des applaudissements polis de la part des spectateurs de l’Olympiastadion. En trente minutes, l’URSS mène alors 2-0. Hans-Jürgen Kreische réduit le score sur penalty avant la pause et plus rien ne bouge… jusqu’à la patate à distance d’Eberhard Vogel, seulement trois minutes après son entrée en jeu.

Grâce à cette égalisation, le 2-2 est en place, et chacun comprend qu’attaquer est vain. Le buteur est-allemand se souvient dans des propos recueillis par la DFB en 2012 d’un « quasi-armistice » , sous-entendu entre les joueurs, et surtout de la réaction du public lorsqu’il comprend que la fin de son match va être totalement biaisée. « Les dernières minutes ont été jouées sous un concert de sifflets. » Ceux-ci sont surtout destinés aux longues possessions stériles des Rouges. Et si l’annonce d’une prolongation nécessaire par le speaker est accueilli de quelques hourras, le silence reprend vite le flambeau. Le final se résume par des dribbles improbables et des frappes molles et lointaines. Le mauvais règlement a frappé. Quatre ans plus tard, il ne sera plus question de partage pour la RDA. Le football est-allemand remportera alors son seul titre : l’or olympique aux JO de Montréal.

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Par Côme Tessier

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