- International
- Amical
- France-Italie
Quand l’Italie désaoulait…
Il y a presque dix ans jour pour jour, la France et l'Italie s'affrontaient au Stade de France pour un revival de la finale de Coupe du monde disputée quelques semaines plus tôt. Le meilleur moment pour taper une Nazionale complètement groggy.
« Heureusement que Materazzi était suspendu, je n’ose même pas imaginer comment ça se serait terminé. » Franco Semioli possède seulement trois sélections avec l’équipe d’Italie, deux matchs amicaux et une seule rencontre officielle, ce France-Italie. Moins de deux mois après la finale de la Coupe du monde, les deux ennemis se retrouvent pour un match de qualifs de l’Euro 2008 dans un Stade de France blindé et chauffé à blanc. Zidane n’est plus là, car retraité, Matrix, lui, a écopé de deux matchs de suspension pour la fameuse insulte (un de moins seulement que l’auteur du coup de boule), un cas unique dans l’histoire du football. Les joueurs italiens décuvent encore et ne seront jamais dans le match. La France prend sa « revanche » , mais avec de gros guillemets.
Pas de Totti ni de Juventini
« Avec Marchionni et Bonera, je faisais partie des réserves, nous sommes restés avec le groupe jusqu’à la veille du premier match. J’avais compris comment cette compétition se terminerait. Techniquement et humainement, laNazionaleétait au top. » L’ailier droit évolue alors au Chievo, à vingt-six ans, il vit ses meilleures années, si bien qu’il est de suite rappelé. « Donadoni avait pris la place de Lippi, il y avait cet amical contre la Croatie à la mi-août, les champions du monde étaient tout juste revenus de vacances et il n’y avait pratiquement que des néophytes. Le coach ne l’a pas dit clairement, mais la volonté était de renouveler l’effectif. » Amelia, troisième gardien en Allemagne, est le seul « rescapé » . Parmi les joueurs alignés, seuls Di Natale et Chiellini intégreront la sélection sur la durée. Il n’y a aucun automatisme et c’est un revers logique 2-0. Deux semaines plus tard, Cannavaro présente le trophée au San Paolo de Naples, les héros de Berlin sont de retour, sauf Totti qui a décidé de prendre sa retraite internationale, tandis que les joueurs de la Juve ont la tête ailleurs suite à la relégation administrative en Serie B. Au fond, le bon Roberto regrette presque déjà d’avoir accepté la faveur de son pote Albertini, vice-président de la fédé. L’environnement est malsain, voire hostile, difficile de bosser dans ces conditions. Il faut un but d’Inzaghi pour arracher un nul face à de modestes Italiens.
Jambes et cerveaux vidés
Le match contre la France tombe au pire moment. « Le championnat n’avait même pas encore commencé, j’étais un des seuls qui avaient disputé une rencontre officielle avec les préliminaires de la Ligue des champions. Nous n’étions pas du tout prêts physiquement. D’ailleurs, on se retrouve menés au bout d’une seule minute de jeu » , remarque Semioli. Une minute et huit secondes, Govou reprenant d’une demi-volée un centre de Gallas. Le Stade de France exulte comme un seul homme et évacue un peu de cette frustration accumulée depuis deux mois. « C’était spectaculaire, je dois l’avouer. On s’attendait à un accueil exécrable, mais ça aurait franchement pu être pire. Je crois que les supporters français étaient plus occupés à soutenir les leurs qu’à nous poudrer. » Disons que le décès de Giacinto Facchetti deux jours plus tôt a permis d’éviter une ambiance délétère. La mémoire de l’ancienne gloire de la Nazionale et de l’Inter est respectée, tout comme l’hymne italien. En revanche, pas de pitié pour les Bleus qui en plantent un second par Thierry Henry dès le quart d’heure de jeu. En plus du manque de condition, le 4-4-2 concocté par Donadoni ne tient pas forcément la route : « Ce n’était peut-être pas le meilleur match pour faire des essais. J’étais très tendu. On attendait probablement trop de moi. » Après la réduction du score de Gilardino, Govou s’offre un doublé en début de seconde période. L’Italie est à terre.
Neuf champions du monde sont pourtant présents, la défense titulaire avec seulement Barzagli à la place de Matrix, le trio Gattuso, Pirlo, Perrotta au milieu et donc le joueur de violon. S’y ajoutent notre Semioli et Cassano : « Les mecs n’avaient pas changé depuis que je les avais quittés, mais j’ai bien perçu qu’ils avaient moins la dalle. Ils venaient de remporter le Mondial, c’est presque normal. Ça se voit dans les petits détails, les repas, la vie de groupe tout ça. Les motivations étaient différentes. » Et la Nazionale le paye cher face à une équipe remontée à bloc. « Une sale défaite, on n’avait presque rien créé. C’était le match le plus compliqué pour faire mes débuts en match officiel, j’ai traîné ça pendant quelques mois. » On ne le reverra plus qu’une fois en sélection. En attendant, l’Italie a pris un petit point en deux matchs dans un groupe qui comprend également l’Ukraine et l’Écosse. Elle risque gros. Seuls les deux premiers passent, pas de barrage au programme. Elle enchaînera par neufs victoires et un nul pour terminer première de sa poule. Le hasard du tirage au sort opposera de nouveau les ennemis intimes lors du dernier match de poules de l’Euro. Le vainqueur passe en quarts et sort son adversaire. Cette fois, ça ressemble un peu plus à une revanche. Loupé.
Par Valentin Pauluzzi