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Quand Lens gagnait le titre 1998 à Auxerre
Il y a 17 ans, Lens se déplaçait à Auxerre pour valider son premier et unique titre de champion de France. Ce vendredi, les deux équipes s'affrontent pour exister en Ligue 2. Nostalgie.
« Ce n’était pas Fabien Cool dans les buts ? Vous êtes sûr ? Je ne m’en souviens pas du tout, je devais déjà être focalisé sur la Coupe du monde. » Lionel Charbonnier est un exemple de mémoire sélective. Deux mois avant d’être champion du monde comme troisième gardien de l’équipe de France, il était bien dans les bois de l’AJ Auxerre pour la dernière journée de championnat et la rencontre face au Racing Club de Lens. Les Artésiens peuvent alors s’adjuger le titre contre Metz à condition de ne pas perdre, quand les Bourguignons doivent s’imposer pour accrocher le wagon européen. « J’ai le souvenir qu’on gagnait 1-0, mais plus le match avançait, plus on perdait la maîtrise du jeu » , avance Lilian Compan, remplaçant pour l’AJA ce jour-là. « Notre ailier n’a pas suivi Yoann Lachor qui a égalisé pour Lens, mais ce résultat était mérité, comme leur titre. » Côté lensois, on était bien décidé à ne pas laisser filer un sacre si proche, après avoir perdu le week-end précédent la finale de Coupe de France contre le PSG. « On n’était pas abattus, plutôt ultra-motivés, se souvient Daniel Leclercq, l’entraîneur des Sang et Or. À l’entraînement, il y avait de l’intensité et de l’implication. » Et le jour J, les deux techniciens tentent d’influencer le destin jusqu’au dernier instant : « Guy Roux nous avait prévenus que leur motivation serait grande » , assure Compan, quand Frédéric Déhu, alors taulier lensois, se souvient que Leclercq « nous a dit que ce qui devait arriver arriverait, mais qu’on devait faire les efforts pour n’avoir aucun regret » . Le Druide a le succès modeste : « Je leur ai dit que j’étais fier de les avoir dirigés pendant ces 37 premières journées, et que s’ils maintenaient l’effort, le meilleur était à venir. »
Fred Déhu : « On n’était même pas outsiders à la base. »
Au final, le Racing arrache le nul et un titre au goal average devant le FC Metz de Robert Pirès. La consécration d’une saison exceptionnelle bâtie sur les cendres d’un exercice 1996-1997 cauchemardesque. Fred Déhu : « On sortait d’une saison délicate, on avait failli descendre avant que Roger Lemerre et Daniel Leclercq ne reprennent l’équipe. La saison suivante, Lemerre étant reparti à la DTN, Leclercq devient seul maître à bord. » Et il impose ses ambitions, en affirmant à l’ensemble du club qu’il vise le haut de tableau. Aidé par quelques recrues de poids comme Stéphane Ziani et Anto Drobjnak, son équipe renverse des montagnes. « On n’était même pas outsiders à la base, mais au fil des matchs, on a compris que l’on pouvait faire quelque chose » , assure Déhu. Aidé par le public de Bollaert, les Artésiens comprennent que leur destin est de remporter le titre après une dernière confrontation contre Metz : « Les gros n’arrivaient pas à suivre le rythme, et on s’impose à Saint-Symphorien, plus rien ne pouvait nous arriver. » Sans avoir une équipe de rêve, Lens devient le tube de l’année, « parce qu’on se basait sur des valeurs humaines. Pas mal de nos joueurs comme Jean-Guy Wallemme ou Cyrille Magnier n’étaient pas reconnus à leur juste valeur, mais quand ces garçons sont partis, on a senti que c’était plus difficile » , assure Leclercq.
Standing ovation de l’Abbé-Deschamps
Ce titre de champion de France pour Lens, c’est aussi la victoire d’une certaine vision du football alors que la France s’apprête à gagner la Coupe du monde. D’où les applaudissements de l’Abbé-Deschamps pour les Lensois, quand bien même ceux-ci ont mis fin à leurs ambitions européennes. « C’était beau, malgré notre déception, de voir le public applaudir Lens, même si on a perdu, on a pu vivre une finale par procuration grâce à ce match » , se souvient Compan. Pour le coach vainqueur, cet hommage tenait à la ressemblance entre les deux clubs, familiaux et champions à deux ans d’intervalle. Mais pour Fred Déhu, une telle réaction de fair-play ne serait plus forcément possible en 2015 : « Les mentalités ont évolué. À l’époque, les Auxerrois se reconnaissaient sûrement dans le RC Lens. » Aujourd’hui, elles ne sont pas si loin, croisant toutes deux le fer en Ligue 2.
Par Nicolas Jucha // Tous propos recueillis par NJ