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Quand le Genoa portait le coup fatal à Ranieri

Par Éric Maggiori
6 minutes
Quand le Genoa portait le coup fatal à Ranieri

En 2011, Claudio Ranieri avait démissionné de son poste d'entraîneur de la Roma après une défaite face au Genoa. Et quelle défaite...

Debout devant son banc de touche, Claudio Ranieri a le regard hagard. Capuche sur la tête, il regarde Alberto Paloschi célébrer devant la Curva des tifosi du Genoa, les mains sur les oreilles, comme pour dire : « Je ne vous entends pas. » Mais Ranieri, lui, n’entend rien. Le stade Luigi Ferraris a beau être en ébullition, pour lui, c’est le silence. Le black-out. Il sait qu’il est en train de vivre ses dernières minutes sur le banc de la Roma. Car il ne pourra pas se remettre de ce qu’il est en train de vivre. De ce que son équipe est en train de vivre. Alors, dans sa tête, il cherche les mots. Les mots qu’il pourra prononcer dans le vestiaire. Les mots qu’il pourra prononcer face aux journalistes. Perdre 4-3 sur la pelouse du Genoa est une chose. Mais perdre 4-3 sur la pelouse du Genoa lorsque l’on menait 3-0 à la 52e minute, c’en est une autre, résolument plus difficile à surmonter.

« Je tentais d’expliquer aux joueurs qu’ils étaient attendus »

Il faut, d’abord, replacer le contexte. Claudio Ranieri débarque sur le banc de la Roma, son club de cœur, au début de la saison 2009-10. La Roma a débuté son championnat par deux défaites, et Luciano Spalletti, en fin de cycle, préfère arrêter là. C’est donc Ranieri, romain, né à Rome et romanista, qui reprend le flambeau. « Rome, c’est chez moi. J’en suistifoso, tout ça, tout ça. J’ai été joueur, et là, je devenais entraîneur de cette équipe dont je suis supporter depuis toujours » , racontait-il dans les colonnes de So Foot en janvier 2013. À la surprise générale, la Roma enchaîne les victoires, grimpe les marches au classement, et vient, à la fin de l’hiver, se frotter à la lutte pour le titre avec l’Inter de Mourinho. Les Giallorossi virent même en tête au mois d’avril, mais se font hara-kiri à quelques journées de la fin, en s’inclinant 2-1 à domicile face à la Sampdoria. Un match resté dans les mémoires, comme en témoigne Ranieri. « Tout le monde me parle toujours du match perdu contre la Sampdoria. Je ne suis pas d’accord avec ça. Nous, nous avions fait plus de vingt matchs sans perdre. À un moment donné, tu peux rater un match, cela arrive. La Sampdoria se battait à ce moment-là pour se qualifier pour la Ligue des champions, ce n’était donc pas n’importe qui. En première mi-temps, nous aurions dû inscrire au moins trois ou quatre buts. En deuxième période, Cassano et Pazzini ont inventé deux buts. Bon, c’est comme ça, c’est comme ça. »

Déçue, mais désormais consciente de sa force, la Roma aborde donc la saison 2010-11 avec des ambitions de Scudetto. Pourtant, Ranieri sent que quelque chose s’est brisé pendant l’été : « Dès l’été, j’ai senti qu’il n’y avait pas la motivation nécessaire. J’en parlais aux joueurs, je tentais de leur expliquer qu’ils étaient attendus. » Pour cause, la Roma ne prend que deux points lors des quatre premières journées, avec notamment une claque reçue sur la pelouse de Cagliari, 5-1. Ranieri tape du poing sur la table, et son équipe parvient à redresser la barre. Fin janvier, le club s’est repositionné à la quatrième place. Mais le début du mois de février est terrible. Après un nul 1-1 concédé à domicile contre Brescia, la bande à Totti s’incline face à l’Inter (5-3) et le Napoli (0-2), retombant ainsi à la sixième position. Sa Roma désormais au pied du mur, Ranieri n’a plus le choix : il faut venir s’imposer sur la pelouse du Genoa. Coûte que coûte.

Palacio, Paloschi et démission

Ce 20 février 2011, son équipe prend le match par le bon bout. Dès la sixième minute, sur un corner de Totti, Philippe Mexès ouvre le score de la tête. Un, puis deux. Sur un nouveau coup de pied arrêté de Totti, c’est cette fois-ci Burdisso qui vient placer son crâne. Le Genoa est assommé, et n’arrive pas à réagir. 2-0 à la pause. Davide Ballardini, le coach du Griffon, tente de motiver ses troupes, mais la troupe du sergent Claudio a une emprise totale sur la rencontre. Et en tout début de deuxième période, une contre-attaque menée de main de maître par Totti et Borriello fait mouche, avec le Capitano à la conclusion. 3-0 à la 50e minute. Rideau… Pense-t-on. Mais l’improbable va alors se produire. Une minute après le troisième but de Totti, une mésentente entre Mexès et son gardien Júlio Sérgio permet à Palacio de réduire l’écart. Puis à la 68e minute, c’est au tour de Paloschi de relancer totalement le match. À 3-2, la Roma tremble, et à un quart d’heure du terme, Palacio, encore, trompe Júlio Sérgio d’une tête lobée. 3-3. La folie.

Mais ce n’est pas terminé. Ranieri a fait entrer Ménez pour redonner de la vitesse à son équipe. Et ça fonctionne : le Français s’offre un déboulé sur son aile gauche, se présente seul face au gardien du Genoa, et à l’intelligence de servir Totti, seul au point de penalty. Le but est vide, mais, incroyablement, Totti tire sur le seul défenseur du Genoa revenu se positionner sur sa ligne. C’est le tournant. D’un possible 3-4, la Roma va plonger dans un cauchemar quand, à la 86e minute, Palacio offre à Paloschi le but du 4-3, celui qui fait chavirer Marassi.

C’est la défaite de trop pour Ranieri. Quelques heures plus tard, le technicien présente sa démission, avec un bilan de 47 victoires, 16 nuls et 21 défaites toutes compétitions confondues. Pour So Foot, il était revenu sur cette décision. « Pourquoi je suis parti ? Parce que je souffrais plus que les joueurs qui allaient sur la pelouse. Et ça, ce n’était pas possible. En tant que supporter, je souffrais des mauvais résultats du club. Pour moi, cette équipe-là devait donner beaucoup plus, sachant que l’année précédente, nous sommes arrivés à un point, ou plutôt à un quart d’heure du Scudetto. L’année suivante, nous aurions donc dû faire mieux. C’est comme ça que je fonctionne. La première année, ce sont les bases, et l’année qui suit, l’équipe doit compter au minimum un point de plus. C’est ma façon de travailler et de concevoir le football. Je ne suis jamais vraiment satisfait, et je voudrais transmettre cette volonté à mes joueurs. Mais j’ai échoué, alors je suis parti. » En mai dernier, pendant que Ranieri fêtait un hallucinant titre de champion d’Angleterre avec Leicester, la Roma de Spalletti était venue s’imposer 3-2 sur la pelouse du Genoa. Après avoir été menée 2-1 à la 75e minute.

Dans cet article :
Milan n’y arrive pas contre le Genoa
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Par Éric Maggiori

Propos de Claudio Ranieri recueillis par EM

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