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- But d'Asmir Begovic
Quand le gardien devient buteur
Un gardien est payé pour ne pas prendre de but (ou pour en prendre, c'est selon). Parfois, l'homme dans les bois outrepasse sa fonction et fait trembler les filets adverses. Chanceux, héroïques, symboliques, ridicules ou tout ça à la fois, les buts de gardiens ont toujours une histoire.
Le plus récent : Asmir Begović pour Stoke contre Southampton
Un dégagement, du vent, beaucoup de vent, de la chance, beaucoup de chance, et un gardien adverse dans la lune. Voilà les ingrédients qui ont permis à Asmir Begović de devenir la mini-star du week-end de la planète football et à Erik Pieters, l’auteur de la passe en retrait, de se retrouver passeur décisif… À noter que Begović n’est pas le premier goalkeeper anglais à marquer en Premier League. Avant lui, Peter Schmeichel, Brad Friedel, Paul Robinson et Tom Howard ont poussé la balle au fond du but adverse.
Le plus décisif : Andrés Palop contre le Shakhtar Donetsk en huitième de finale de Coupe UEFA
Après avoir fait match nul 2-2 au match aller à Sánchez-Pizjuán, les hommes de Juande Ramos sont en difficulté sur la pelouse du Shakhtar. Menés 2 à 1 à deux minutes de la fin de la rencontre, ils parviennent à arracher un corner. Andrés Palop monte et égalise d’une tête rageuse. En prolongation, c’est finalement Javier Chevanton qui offrira la qualification aux Nervionenses. Formidable en huitièmes de finale, Palop deviendra l’idole de tout un peuple en finale contre l’Espanyol Barcelone. Ce héros arrêtera trois tirs au but.
Le plus improbable : La volée de Björn Akesson
Björn Akesson n’est que l’obscur gardien de l’obscur club de l’IFK Värnamo qui évolue au sein de l’obscure seconde division suédoise. A priori, cet homme a peu de chance de connaître un jour le feu des projecteurs, sauf à marquer le but de la victoire d’une reprise de volée dans les ultimes instants d’un match. Visez plutôt :
Le plus rétro : Jean-Claude Hernandez avec l’AS Monaco contre Valenciennes. En 1963…
Blessé à l’épaule et ne pouvant pas être remplacé (le championnat de France n’autorise le remplacement d’un joueur qu’à partir de 1967), le guerrier demande à son coéquipier Jean-Marie Courtin de le remplacer dans les bois, tandis que lui va tenter sa chance dans le champ. À la 84e minute, le coquin marque, de la tête ou d’une reprise de volée (les sources divergent) et devient par là même le premier gardien buteur dans le jeu du championnat de France de football.
Le plus statistique : Le triplé de José-Luis Chilavert avec Velez
La compétition est rude dans la catégorie des fantasques et buteurs gardiens sud-américains. Si « el Loco » René Higuita et surtout Rogério Ceni sont assurément de grands spécialistes (respectivement 44 et 112 buts dans leur carrière), José Luis Chilavert les dépasse d’un cran. En 1999, lorsqu’il évolue à Velez, le Paraguayen plante trois pions sur trois coups francs contre Ferro Carril Oeste. Une performance que tous les joueurs de champ aimeraient égaler.
Le plus symbolique : Jens Lehmann lors du derby de la Ruhr
Comme souvent, il y a une histoire de score serré, de corner de la dernière chance et de tête victorieuse. Sauf que comme Jens Lehmann a toujours eu un ego plus gros que les autres, il s’est payé le luxe de jouer les sauveurs contre le Borussia Dortmund, ennemi juré de son Schalke 04. Alors que le temps additionnel file, les Bleus sont menés 2 à 1, car Lehmann s’est incliné deux fois sur coup franc. Humilié et remonté, le grand Jens monte sur le corner, place un coup de casque surpuissant sous la barre et entre dans la légende du Revierderby.
Le plus héroïque : Le penalty de Ricardo, en quart de finale de l’Euro 2004 contre l’Angleterre
Euro 2004, la Seleção joue à la maison avec la pression des attentes de tout un peuple. Lors des quarts de finale, les équipes de Scolari et d’Eriksson sont à égalité deux partout à la fin de la prolongation. S’ensuit une séance de tirs au but mythique qui débute par le fameux loupé « motte de terre » de David Beckham. À cinq partout, Darius Vassell se présente face à Ricardo. Le Portugais a alors un geste totalement dingue : il enlève ses gants pour impressionner son vis-à-vis. À mains nues, il stoppe la frappe de Dazza. Conscient de l’état de grâce de son joueur, Scolari le désigne alors comme ultime tireur. Ricardo pose la balle, s’élance et envoie sa sélection en demies d’une frappe sèche. L’ancien joueur du Sporting deviendra une bête noire pour l’Angleterre. Lors de la Coupe du monde 2006, en quart de finale et aux tirs au but à nouveau, il stoppera les tentatives de Lampard, Gerrard et de Carragher.
Le plus spectaculaire : La bicyclette de Jorge Campos
Jorge Campos a prouvé que le poste de goal volant n’était pas qu’une invention de cours de récréation. Poids plume — 1m74, une soixantaine de kilos — à l’agilité impressionnante dans les cages, le légendaire gardien mexicain aux 130 sélections et aux tenues fluorescentes avait un péché mignon : disputer la fin des matchs dans le champ, au poste d’attaquant, si possible. Une habitude qui lui a permis de marquer le plus beau but jamais inscrit par un gardien de métier à l’époque où il portait la liquette du CF Atlante : une volée en ciseau. Une perle.
Le plus théâtral : Jimmy Glass, le sauveur de Carlisle United
À la fin des années 1990, Carlisle United végète en Football League One. En 1999, le club est même relégable avant la dernière journée de championnat et le match qui doit l’opposer à Plymouth. Seule une victoire lui assurerait le maintien. Alors que la partie se termine et que le tableau d’affichage est bloqué à 1-1, Carlisle obtient un corner. Jimmy Glass, anonyme gardien prêté en urgence quelques jours plus tôt par Swindon Town, monte sans y croire vraiment. Le corner est tiré, après plusieurs coups de billard dans la surface, la balle arrive sur ce brave Jimmy qui la pousse au fond. Liesse dans le stade, envahissement du terrain et maintien assuré. Le pire, c’est que Jimmy Glass quitte le club juste après. Et devient un héros en n’ayant disputé finalement que trois matchs pour Carlisle.
Le plus crétin : Le penalty de Butt contre Schalke 04…
Hans-Jörg Butt s’est fait spécialiste dans l’art de tirer les penalties. À la fin de sa longue carrière, l’international allemand avait inscrit la bagatelle de 26 buts, tous sur penalty. S’il peut tirer une certaine gloire de ce chiffre, celui dont le patronyme le prédestinait au ballon rond a sans doute rapidement voulu oublier celui qu’il marqua face à Schalke en 2004 lorsqu’il portait le maillot du Bayer Leverkusen. Alors que le portier retournait tranquillement dans ses buts en faisant un câlin à chacun de ses potes, les filous de NullVier jouaient le coup d’envoi et marquait de loin. Trop bon trop con, comme on dit.
Par Pablo Garcia-Fons