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Quand Klopp donnait la leçon à Mourinho

Par Romain Duchâteau
Quand Klopp donnait la leçon à Mourinho

C'est arrivé au cours d'une soirée étoilée et mémorable, le 24 avril 2013. Ce jour-là, le Borussia Dortmund de Jürgen Klopp terrassait avec brio le Real Madrid de José Mourinho (4-1) en demi-finale aller de C1, mettant ainsi fin au rêve du Portugais de soulever la Décima. Ce samedi, Klopp et Mourinho ont changé d'équipe, mais le manager allemand pourrait, encore une fois, provoquer la chute du Special One.

Sourire de rigueur, décontraction naturelle et l’aplomb voilé derrière une pointe d’humour, Jürgen Klopp vient de réussir avec brio son entrée sur la scène anglaise. Ce 9 octobre 2015, l’inénarrable Allemand est officiellement intronisé en tant que manager de Liverpool à la place de Brendan Rodgers. Et parce qu’il n’a jamais dissimulé sa part de singularité, la formule pour se présenter à ce nouveau parterre de spectateurs détonne. « Je suis un homme tout à fait normal. Je viens de la Forêt-Noire. Ma mère est peut-être devant la télévision et regarde cette conférence de presse et elle n’a dit aucun mot. Mais elle est très fière. Je suis un gars normal. Je suis « The Normal One », si vous le souhaitez » , lâche-t-il, non sans se départir d’un large sourire aux lèvres.

C’est un match de plus, tout comme Galatasaray ou Manchester aux tours précédents.

De toute cette conférence de presse, les médias britanniques ne retiendront que ce sobriquet attribué à lui-même : The Normal One. Un clin d’œil évident à son homologue portugais, José Mourinho, lui qui s’était autoproclamé The Special One à son arrivée à Chelsea, en 2004. Les deux hommes s’estiment, se respectent. Mais alors que sa place sur le banc des Blues n’a sans doute jamais semblé aussi précaire, le Mou retrouve celui qui a, il y a deux ans et demi, ni plus ni moins brisé son rêve de soulever la Ligue des champions avec le Real Madrid. Forcément, à l’aube des retrouvailles, ce sont de douloureux souvenirs qui affleurent.

Retour dans le temps. Ce 24 avril 2013, quand le Real Madrid se déplace dans la touffeur du Westfalenstadion afin de défier le Borussia Dortmund, en demi-finale aller de C1, c’est avec le costume de favori. Conscient que la Liga est désormais promise au rival barcelonais à quelques semaines de la fin du championnat, la Casa Blanca se concentre essentiellement sur la coupe aux grandes oreilles. Avec, toujours, cette obsession qui taraude tout un peuple : la fameuse Décima. Jusqu’ici, les Madrilènes ont assuré le service minimum dans la plus prestigieuse des compétitions. Dans un groupe relevé composé déjà du Borussia Dortmund, puis de Manchester City et de l’Ajax Amsterdam, ils terminent derrière le BvB. Conséquence, ils prennent Manchester United en 16es de finale. Une expulsion controversée de Nani et une superbe frappe de Modrić viendront sortir Madrid du bourbier mancunien. La confrontation face à Galatasaray au tour suivant ? Une formalité. Alors, à l’heure d’aller se frotter au mur jaune, José Mourinho est donc un homme en mission. Et à la sérénité inébranlable. « Je n’ai pas peur, je n’ai pas la pression, je suis quelqu’un qui se bat pour ne pas connaître de tels sentiments. C’est un match de plus, tout comme Galatasaray ou Manchester aux tours précédents. Je ne vois pas autrement ce match » , lance-t-il, sans douter, en conférence de presse d’avant-match.

Les typhons Götze et Lewandowski

Conscient qu’il aborde ce rendez-vous en tant qu’outsider, le Borussia Dortmund choisit de la jouer profil bas. Mais un événement va quelque peu altérer l’insouciance inhérente qui caractérise la formation allemande. La veille du match, le quotidien Bild provoque un séisme médiatique en annonçant le transfert du joyau Mario Götze, formé dans la Ruhr, vers l’ennemi honni du Bayern Munich. Mis dans la confidence par ses dirigeants dans la foulée de la qualification homérique contre Málaga en quarts de finale (0-0 ; 3-2), Jürgen Klopp décide de manier l’humour en conférence de presse pour dissimuler une amertume légitime : « J’ai profité vingt-quatre heures de la victoire. Mario voulait profiter de l’expérience d’un grand entraîneur (Pep Guardiola dont la venue en fin de saison a été actée, ndlr) et apprendre à jouer à une touche de balle. Je ne peux pas le faire. » Outre ce transfert controversé, les Schwarzgelben nourrissent l’espoir fou de renverser l’ogre madrilène. Largués par le Bayern Munich en Bundesliga, ils entendent étirer un peu plus une épopée européenne dont le maître mot se veut frisson. Et les soldats du fantasque Klopp peuvent avancer un argument de poids. En phase de groupes, le BvB a tenu la dragée haute à l’équipe espagnole et s’est même payé le luxe de s’imposer une fois lors de leur double confrontation (2-1 ; 2-2). Malgré ces performances probantes, Klopp exhorte les siens à rester concentrés et met la pression sur les épaules du Real. « Le Real me paraît plus fort maintenant. À l’époque, il lui manquait des joueurs importants (Marcelo notamment, ndlr) et maintenant, il disposera presque de tous, rappelle-t-il quelques jours avant la rencontre. Le Real est dans un grand moment de forme, dans une bonne dynamique de résultats. »

Le peuple madrilène s’attendait à des étincelles ? Il va finalement vivre l’une des soirées les plus lugubres dans son histoire européenne. Dans une enceinte portée par le souffle palpable de 65 829 spectateurs, le Borussia donne une véritable leçon à son vis-à-vis. Guidés par la paire Gündoğan-Bender, les partenaires de Weidenfeller étouffent d’entrée une pâle équipe de Madrid, totalement désarmée par le fameux gegenpressing. Une démonstration collective sublimée par la prestation lunaire de Robert Lewandowski. Buteur dès la 8e minute de jeu, l’attaquant polonais offre cette soirée-là ce qui constitue encore jusqu’ici le plus beau chef-d’œuvre de sa carrière. Malgré l’égalisation de Ronaldo qui fait office de cache-misère avant la mi-temps, l’arrière-garde espagnole amputée de deux titulaires (Marcelo et Arbeloa remplacés poste pour poste par Coentrão et Ramos, Varane étant titularisé en défense centrale) sombre inéluctablement en seconde période. Au retour des vestiaires, Lewandowski claque un triplé en moins de vingt minutes et achève un favori dès lors au bord du précipice. Un quadruplé d’une beauté irrésistible. Le premier pour un joueur à ce stade de la compétition.

Toute l’Europe va se rappeler du quadruplé de Lewandowski. S’il nous sert à nous qualifier pour la finale, bien sûr

Dans la foulée de cette demi-finale aller récitée sans fausse note, Jürgen Klopp savoure ce succès historique, tout en refusant de verser dans l’euphorie avant la manche retour : « On a joué ce match dans des conditions de tension extrême après l’affaire Götze, révélée par la presse. Mais on a su transformer cette émotion négative en un rendement extraordinaire. Je précise tout de suite qu’on a un deuxième match à jouer à Madrid, et si la tactique de ce soir a bien fonctionné, je me garderai bien d’en dire davantage pour la suite. J’espère surtout, si on se qualifie, que les quatre buts de Lewandowski vont entrer dans l’histoire du club. Si vous faites un tour par le musée, vous voyez depuis des années les mêmes vidéos. Avec les buts de Robert, j’espère qu’on va bientôt se renouveler. Mais un quadruplé, vous savez, ça n’a rien d’extraordinaire. Ça dépend où et contre qui vous le marquez. Moi aussi, j’en ai réussi un jour. C’était contre Erfurt en championnat de D2, mais il n’y a que moi pour m’en souvenir ! Celui de Lewandowski, toute l’Europe va s’en rappeler. S’il nous sert à nous qualifier pour la finale, bien sûr. » Avec la force du désespoir, José Mourinho, lui, martèle que l’exploit, aussi invraisemblable soit-il, apparaît possible. « C’est difficile de dire si l’on a failli collectivement ou individuellement. Mais voilà ce qui arrive quand tu n’as pas une bonne utilisation du ballon et que la première relance n’est pas bonne. Alors, on va préparer le match retour avec toute l’énergie et l’espoir que l’on doit mettre dans ce match-là. En football, j’ai au moins appris une chose : rien n’est impossible » , confie-t-il en conférence d’après-match. Une semaine plus tard, le Real Madrid manquera sa présence en finale, dans l’écrin de Wembley, à un but près (2-0), touchant du bout des doigts l’exploit. Insuffisant, donc, pour que José Mourinho ne renaisse de ses cendres. Et, ce samedi, le désormais Normal One pourrait peut-être encore revêtir le costume de la faucheuse face à un Special One qui ne l’est plus tant que ça.

Dans cet article :
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