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Quand Karl Lagerfeld assurait la promotion du maillot des Bleus

Par Arthur Courant
Quand Karl Lagerfeld assurait la promotion du maillot des Bleus

Mars 2011. Moins d'un an après la catastrophe de Knysna à la Coupe du monde 2010, Nike dévoile le nouveau maillot extérieur de l'équipe de France : une marinière censée renouer le contact avec les Français. Pour en faire la promotion, le nouvel équipementier des Bleus fait appel à Karl Lagerfeld. Une page du football français dont il convient de se rappeler alors que le grand couturier allemand s'est éteint, ce mardi, à 85 ans.

L’équipe de France traverse une période difficile. Après la mascarade de la Coupe du monde 2010, les Bleus ont attiré la méfiance du peuple français. Nike, nouvel équipementier de la sélection française, se doit d’agir pour ne pas subir une déroute marketing. Pour le maillot domicile, la marque à la virgule opte pour du bleu. Sobre et classique. Pour le maillot extérieur en revanche, elle innove et désigne une marinière. Blanche, ornée de rayures bleues, cette dernière « appartient au patrimoine culturel français depuis le XIXe siècle » , écrit la FFF dans un communiqué en mars 2011.

Validé par Mexès, vomi par Lizarazu

Certains la décrient, d’autres l’apprécient. C’est notamment le cas de Philippe Mexès, international à cette période. Sur les ondes de RMC à l’été 2011, le défenseur central vante le style du maillot : « Il est mignon, on dirait un polo. Il a beaucoup de succès. À Rome, les joueurs me saoulent pour l’avoir. » Bixente Lizarazu, lui, est moins fan. Lors d’une émission sur RTL, le champion du monde 1998 n’hésite pas à le faire savoir : « On part sur un truc un peu inhabituel, un peu choquant au premier abord. Moi, ça me fait penser un peu à la tenue de Passe-Partout dans Fort Boyard, mais peut-être qu’on va s’y habituer. » Qu’importe les avis, Nike doit assurer la promotion de sa marinière. Et pour ce faire, la marque fait appel aux services de Karl Lagerfeld. Elle commande au grand couturier allemand une série de photos pour mettre en valeur sa nouvelle création. L’objectif ? Mettre en exergue l’esprit « résolument innovant » de la marinière et l’esprit « conquérant de l’équipe de France » , déclare l’équipementier.

Le « Kaiser » accepte, lui qui a rarement travaillé dans l’univers du sport. Il choisit Alou Diarra, capitaine de la sélection, comme tête d’affiche pour magnifier cette nouvelle tunique. Sur un fond blanc, le natif de Villepinte pose fièrement avec sa marinière. Filtrées en noir et blanc, les photos conservent tout de même les bandes bleues dans leur couleur originelle. Une opération de communication réussie sur laquelle le sélectionneur Laurent Blanc reviendra juste avant l’Euro 2012 : « Ça a été un super coup marketing, il faut le reconnaître. Les femmes adoraient ce maillot-là. C’est déjà une bonne chose. »

Alou Diarra : « Dans sa manière de travailler, Lagerfeld m’a inspiré »

Parce qu’un shooting avec Karl Lagerfeld n’est pas anodin, sept ans plus tard, Alou Diarra se rappelle tout. « Le shooting avait lieu en plein Paris, dans son atelier. Le cadre était impressionnant, mais convivial, il y avait une immense bibliothèque » , se souvient l’actuel consultant pour France Télévisions. D’abord intrigué, celui qui évoluait alors à Bordeaux s’est vite laissé séduire par la personnalité de Lagerfeld : « Pour moi, on avait pris une grosse tête d’affiche juste pour faire de la comm’. Et en fait, en discutant avec lui, je me suis rendu compte qu’il connaissait beaucoup de choses sur le football. En apparence, je dis bien en apparence, Karl Lagerfeld peut avoir l’air froid. En réalité, c’est quelqu’un de très surprenant, d’ouvert, chaleureux et souriant. J’ai pu m’apercevoir qu’il avait un sens du détail très précis. Dans sa manière de travailler, il m’a inspiré. Ça donne des idées pour ce qu’on peut faire ensuite. Mon entourage m’a dit que j’étais un privilégié d’avoir été shooté par Lagerfeld ! »

De cette séance, l’ancien capitaine des Bleus se souvient de la liberté que Lagerfeld lui avait laissée : « Vu que j’étais capitaine, on m’avait demandé de faire quelques clichés. On a fait plusieurs prises et on n’a pas arrêté tant qu’il n’avait pas son cliché favori. Il m’a dit de prendre le ballon et de faire ce que je savais faire. J’ai fait une série de jongles. Il m’a laissé toute la liberté, je faisais les mouvements que je voulais et il a gardé les clichés qu’il préférait. » Et même lorsque les deux hommes se mettent à parler ballon rond, le Kaiser s’illustre par sa culture : « Je ne sais pas s’il savait où je jouais à l’époque (Bordeaux), mais il se souvenait que j’étais passé par le Bayern Munich ! On avait échangé sur ce sujet. Je lui avais dit que je parlais un peu allemand. Lui parlait très bien français ! » Karl Lagerfeld est peut-être mort en ignorant qu’Alou Diarra a aussi joué à Louhans-Cuiseaux, mais à sa manière, il a contribué à l’opération rédemption de l’équipe de France.

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Par Arthur Courant

Propos d'Alou Diarra recueillis par AC

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