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  • Tactiques de légende – Milan AC vs Manchester United (C1 2007)

Quand Kaká et Gattuso faisaient voler le sapin de Carlo

Par Markus Kaufmann
6 minutes
Quand Kaká et Gattuso faisaient voler le sapin de Carlo

L'Italie et l'Angleterre sont deux pays lointains, culturellement, géographiquement et footballistiquement. D'un côté, la terre du football réfléchi, calculé, tactique. De l'autre, là-haut sur l'île, on aime les rythmes fous, l'engagement physique et une attaque ressemble à une prise d'assaut d'un navire. Dans les années qui suivent le drame du Heysel, l'Italie place neuf finalistes en C1 jusqu'à ce que Manchester United rafle la mise en 1999. La hiérarchie est bousculée dans les années 2000 : depuis 2004, quinze demi-finalistes anglais contre quatre italiens, mais trois victoires partout ! Premier épisode des rencontres Italie-Angleterre : le choc Milan AC - Manchester United en demi-finale de la C1 édition 2007.

Évidemment, les deux styles se rejettent. Les uns insultent les autres de « simulateurs » , ces autres qualifient les premiers d’ « analphabètes tactiques » . On se souvient de la panenka de Pirlo à l’Euro. On se souvient surtout du Heysel en 1985 : Juventus-Liverpool et la descente aux enfers des Anglais. En 2003, quand la Juventus et le Milan AC se retrouvent pour une finale 100% italienne à Old Trafford, les deux camps semblent presque prendre un malin plaisir à livrer le pire spectacle possible en finale de C1. « Vous détestez notre football calculé ? Vous allez en bouffer. » Ils font durer le plaisir : 0-0, prolongation, tirs au but. Liverpool vengera la Reine avec style en 2005, avant que le Milan…

Le Milan était traditionnel, Manchester n’a jamais changé

En cette saison 2006-2007, Cristiano et Rooney dominent enfin le Chelsea de Mourinho, tandis que le Milan est plongé dans une saison difficile, au cours de laquelle Yoann Gourcuff et Nelson Oliveira jouent plus de matchs que Maldini et Nesta. Deux semaines avant le grand rendez-vous des demi-finales, Ferguson en met sept à Spalletti. L’Europe tremble. Dans le dernier carré, le Milan AC est seul contre trois Anglais. Seul, mais rodé : il s’agit de la quatrième demi-finale de C1 en cinq ans pour les Milanistes. Carletto en joue : « À ce stade de la compétition, c’est la tradition qui compte. » Il le sait, son Milan est alors très « traditionnel » : toujours le même sapin de Noël (4-3-2-1), habillé de ses perles Kaká et Seedorf sous l’étoile Gilardino ou Inzaghi, soutenu par le tronc Pirlo-Gattuso-Ambrosini et des ailiers au rôle capital : Oddo et Jankulovski. Dida, Maldini et Nesta complètent la formation, quand ils ne sont pas blessés.

Car, déjà, on parle d’une « équipe de vieux » . Tout le contraire de la formation de Manchester, pleine de jeunesse, de fougue, mais aussi d’absents dans le 4-2-3-1 du match aller : Van der Sar, Évra-Brown-Heinze-Oshea derrière, Fletcher-Carrick pour tenir le milieu, et enfin Cristiano, Scholes et Giggs derrière Rooney. Une formation typique de Ferguson, habile pour garder le ballon aussi bien que pour contre-attaquer, personnifiée par la polyvalence de Paul Scholes, à la fois 6, 8 et 10.

La cavalerie anglaise va vite, mais Kaká est divin

Manchester fait un début de match très Premier League : une équipe furieuse qui attaque sans relâche, met la pression, joue dur, n’hésite pas à balancer trois ballons dans les nuages, persuadée que le quatrième fera mouche. Rapidement, les Italiens, surpris, plient : Cristiano marque sur corner à la 5e minute. Les hommes d’Ancelotti sont cueillis à froid, et Kaká semble seul contre le reste du monde. Le 4-3-2-1 n’a pas eu le temps de mettre le pied sur le ballon au milieu, ni de lancer ses deux latéraux pour faire reculer les Rouges. Devant, Gila joue en pivot et c’est à Kaká de prendre la profondeur, seul. Le Brésilien insiste, encore et encore. Les Rossoneri laissent passer l’orage du début de match et attendent les éclaircies de son numéro 22. Comme une flèche, il perfore la défense bis mancunienne au bout de vingt minutes. Le Milan s’installe alors et le sapin pousse. Un quart d’heure plus tard, la magie opère. Kaká est seul face à trois Rouges, puis seul contre Évra et Heinze, puis seul contre Van der Sar, puis seul au monde à Old Trafford, les bras au ciel. 2-1, un doublé et le Ballon d’or promis quelques mois plus tard.

Vidéo

La pluie et les blessures

À la reprise, les éléments font basculer la rencontre. Ancelotti perd Maldini et Gattuso, il se met à pleuvoir et Manchester frappe de plus en plus loin, arrive toujours plus vite et plus fort. « À la reprise, nous avons arrêté de jouer et défendu trop bas » , observe Nesta. Malgré toute leur expérience, les Milanais encaissent deux buts à deux moments cruciaux : l’heure de jeu et les arrêts de jeu. Nesta a raison, le sapin de Noël est très court en cette soirée pluvieuse. Mais toutes ces jambes milanaises devant la surface ne suffisent pas pour empêcher Scholes d’inventer une merveilleuse louche pour Rooney. Et alors qu’en fin de match, la folie de Kaká pèse à nouveau sur la défense anglaise, une attaque rapide classique du championnat anglais vient perforer les lignes italiennes. Rooney, encore. Deux buts encaissés à domicile, mais cet avantage qui permettra à Ferguson de contre-attaquer à San Siro…

4-2-3-1 contre 4-3-2-1 : le jeu du milieu et l’enjeu des ailes

Match retour à San Siro, là où le Milan n’avait à l’époque jamais perdu contre une équipe anglaise. Manchester récupère Vidić (mais pas Ferdinand), Ancelotti est obligé de remplacer Maldini par Kaladze, et préfère cette fois-ci Inzaghi à Gilardino. C’est au tour de Manchester de subir l’effet du stade. 77 000 personnes, c’est beaucoup. Et à la différence du match aller, l’équipe qui prend l’ascendant psychologique a aussi la maîtrise de la géométrie de son côté. Sur le terrain, on ne croit voir que l’opéra des deux maîtres Seedorf et Kaká, mais l’équipe milanaise l’emporte aussi au milieu et sur les ailes. Ancelotti explique brièvement la victoire tactique : « Les clés du match ont été la grande pression des milieux de terrain et les courses des latéraux. » Rino Gattuso grandit au fur et à mesure de la rencontre, jusqu’à sembler immense au milieu du déjà très grand San Siro. Cristiano n’a plus d’espace, Manchester n’a jamais le temps.

Gennaro le raconte : « Je ne pensais qu’à courir, courir et courir, jusqu’à que mes jambes ne s’arrêtent plus. » D’autre part, Pirlo, Seedorf et Kaká ont alors le temps de lancer les latéraux Oddo et Jankulovski. Dans un duel entre un 4-2-3-1 et un 4-3-2-1, la domination est bien souvent décidée par la bataille des côtés : les latéraux du sapin de Noël sont-ils capables de faire reculer les deux ailiers offensifs du 4-2-3-1, à savoir Cristiano et Giggs ? À Milan, oui. Les centres s’enchaînent. Et puis Milan marque rapidement. L’insaisissable Kaká à la 11e minute, le facile Seedorf à la 30e. Manchester perd le fil de la rencontre, commet deux fois plus de fautes que son adversaire (21 fautes à 11), l’absence de la relance de Rio se fait terriblement sentir. Alors que Gilardino jouait dos au but, Inzaghi vit pour la profondeur, jamais gêné de réclamer le ballon. Ironie du sort, c’est Gilardino qui viendra sceller la rencontre sur une contre-attaque en fin de match. Un, deux et trois. Le Milan perdra les deux derbys de la saison et finira tout de même à 36 points de « l’Inter des records » , mais se consolera en passant l’été avec la C1 sous le bras. La cinquième de l’ère Berlusconi (avant 1986, le Milan ne comptait que dix Scudetti et deux C1). Manchester « devait » gagner le triplé. Un an après le Calciopoli, la Serie A est reine d’Europe.

Dans cet article :
Julian Nagelsmann, le temps de l’expérimentation
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