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Quand George Best devait signer à Marbella…

Par Robin Delorme, en Espagne
4 minutes
Quand George Best devait signer à Marbella…

Amateur de spiritueux, de soleil et de splendides créatures, George Best a, entre la fin des sixties et le milieu des seventies, élu domicile dans le Sud de l’Espagne. Une histoire d’amour qui a bien failli lui faire enfiler la liquette de l’Atlético Marbella sitôt après son départ de Manchester.

Quarante ans après, Kingston-upon-Hull, ville de 300 000 âmes du Yorkshire de l’Est, s’interroge encore sur le pourquoi du comment. Enrique Castro Gonzalez, plus communément appelé Quini, également. Entre cette bourgade du Nord-Est de l’Angleterre et l’attaquant asturien cinq fois Pichichi, le trait d’union répond au nom de George Best. Le flashback, lui, ramène en 1972. Moins de deux semaines après le Bloody Sunday, la sélection espagnole doit se rendre en Irlande du Nord pour le compte des qualifications pour le prochain Euro belge. Sécurité oblige, la rencontre se délocalise dans l’enceinte de Hull City, toute surprise de cette décision. Contrainte au partage des points, la Roja rate le coche et voit s’éloigner le rendez-vous européen. Quini, pour sa part, n’assiste même pas à cette désillusion : son visage, tuméfié par un coup de coude du Cinquième Beatles, le presse dans les brancards. Pire, il ne retrouve les terrains qu’une année plus tard… De cette agression, George Best ne s’excusera jamais. L’Espagne, pour autant, ne lui en tient pas rigueur : quoi de plus normal, puisque Best en fait sa seconde maison, entre oranges fruitées et femmes dénudées.

Le VRP des oranges espagnoles et des plages andalouses

L’intense relation entre l’Espagne et George Best s’entame quelques mois plus tôt, à l’occasion de la rencontre aller entre les deux sélections. Le Sánchez-Pizjuán de Séville, alors théâtre de la rencontre, assiste à une démonstration de force locale. Le résultat, de 3-0, passe pourtant au second plan suite au coup de sifflet final, comme l’évoque l’édition de ce 11 novembre 1970 : « Best a reçu des mains des représentants de la Fraternité des paysans d’Alcala de Guadaira un cadeau prenant la forme d’un panier d’oranges triées sur le volet. » Un présent bien étrange que le Nord-Irlandais accepte avec grand plaisir, assurant qu’il se « réserve la moitié de ces magnifiques fruits » avant de partager le restant avec ses coéquipiers pour qu’ils « vérifient à quel point ils sont bons » . Pionnier des joueurs-publicités, le Belfast Boy se trouve en effet le VRP des agrumes d’outre-Pyrénées. « Les agrumes espagnols sont les plus proches de Grande-Bretagne, le fruit arrive donc dans vos magasins avec toutes ses propriétés » , narre-t-il ainsi dans un spot de promotion financé par le Syndicat des exportateurs de fruits d’Espagne.

Loin d’être la base de son petit-déjeuner, ces oranges lui octroient un statut de super star dans une Espagne toujours sous le joug de Franco. Ce pays, il apprend à le connaître dès le milieu des années soixante grâce à ses plages paradisiaques des Baléares et d’Andalousie. Après quelques flirts avec Majorque, il décide de faire de Marbella sa place forte. « Il n’aimait pas trop la plage » , rembobine Gerardo Valencia, intime de Best qu’il rencontre dans un bar de Manchester, au magazine Panenka. « Lui, son truc, c’était d’aller au bar Stone ou au casino de Torrequebrada… En fin de compte, dans n’importe quel endroit où il pouvait boire de la Guinness. » Le début de la névrose du Britannique s’entame au début des seventies. Plutôt que de traîner son spleen lors des séances d’entraînement de United, il préfère s’évader dans le Sud de l’Andalousie. En 1972, en pleine fugue par rapport à son club, il déclare, dans les colonnes de As, « arrêter le football » : « Le football m’empêche la plus grande partie du temps de faire ce que j’aime. Ce que j’aime, c’est le soleil, la mer, les taureaux, les femmes blondes, les brunes et les rousses. Je ne peux pas y remédier. »

« C’était un type génial, il était comme les Espagnols »

Deux semaines passent, et George Best, après avoir enchaîné les amendes, revient sur sa décision – de cet événement sera tiré le livre Sod it, I’m off to Marbella. Et donc, à Manchester. Son spleen, il le traîne durant un peu plus de deux ans, avant de quitter définitivement MU et les obligations du monde professionnel. « En 1975, nous avons fait une énorme fête, très alcoolisée, dans un pub de Marbella. Avec Gerardo Valencia (alors vice-président du club, ndlr), nous avons réussi à lui faire mettre le maillot de l’Atlético de Marbella et nous avons publié un article dans le journalSol de España. Le grand Georgi nous a dit que cela ne lui déplairait pas de jouer avec Marbella » , retranscrit José Manuel Bermudo, journaliste pour le Diario Sur. Le hic arrive de la Fédération : en Espagne, seuls les clubs de première et seconde divisions peuvent aligner des étrangers. L’Atlético Marbella milite lui en Tercera, ce qui condamne toute possibilité de le voir fouler les prés de la Costa del Sol. Qu’importe, pour son ami Valencia, « c’était un type génial, il était comme les Espagnols » . Qu’en disent Quini et sa pommette ?

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