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Quand Chiellini portait le maillot de la Fiorentina
On a l'impression qu'il a toujours porté le maillot de la Juventus. Pourtant, il y a dix ans tout rond, en 2004/05, Giorgio Chiellini a disputé une saison de Serie A avec la tunique de la Fiorentina. Et il avait des cheveux.
Quand on demande à un supporter de la Fiorentina ou de la Juventus quel joueur italien a quitté l’équipe viola pour rejoindre les Bianconeri, il n’a en général qu’un nom à la bouche : Roberto Baggio. Personne, non, vraiment personne, ne répondra Giorgio Chiellini. Et pourtant, celui qui porte depuis bientôt dix ans le maillot de la Vieille Dame a bel et bien, un jour, pris le train de Florence à Turin. Il a même fait le trajet dans les deux sens. C’était en 2004. La Juventus accapare ce jeune défenseur prometteur, qui vient de faire ses débuts en Serie A avec le maillot de Livourne. La Roma était sur le coup, le Torino aussi, mais c’est finalement la Juve qui rafle la mise pour 3 millions d’euros. À cette époque, la défense de la Vecchia Signora est composée de Lilian Thuram, Paolo Montero, Fabio Cannavaro, Ciro Ferrara et Gianluca Zambrotta. Autant dire : pas de place pour un jeune défenseur de 20 ans né à Pise. Le club alors entraîné par Fabio Capello décide donc de le prêter. Et le point de chute, c’est la Fiorentina.
Un coup de coude dans le pif
Giorgio Chiellini débarque donc à Florence en août 2004 dans un contexte tout à fait particulier. La Fiorentina vient tout juste de revenir en Serie A, après avoir connu l’enfer de la faillite et de la quatrième division. L’équipe est entraînée par Emiliano Mondonico, qui en avait pris les rênes au cours de la saison précédente, en Serie B, et qui était parvenu à obtenir la montée au terme des barrages. Pour fêter le retour parmi l’élite, la famille Della Valle investit ; des pointures du championnat italien comme Fabrizio Miccoli, Enzo Maresca ou Martin Jorgensen. Chiellini, lui, fait partie des « promesses » , au même titre qu’un certain Giampaolo Pazzini, arrivé en provenance de l’Atalanta. Pas de round d’observation pour Giorgio, qui, fort d’une saison complète en Serie B avec Livourne en 2003-04 (41 matchs disputés!) est titularisé dès la première journée, pour un déplacement périlleux sur la pelouse de l’AS Roma.
Mondonico le positionne en latéral gauche. Sa prestation est positive, il provoque même l’expulsion de Cassano, qui lui flanque un coup de coude dans le pif (déjà). Giorgione prend un bon 6 dans la Gazzetta dello Sport du lendemain, et ce, malgré la défaite 1-0 de son équipe. À Florence, il devient rapidement un pion essentiel. Aubaine pour lui : l’Italie se remet à peine de l’élimination lors du premier tour de l’Euro 2004, et Marcello Lippi, le nouveau sélectionneur, cherche des forces fraîches. Le 17 novembre 2004, pour un amical face à la Finlande, il offre ainsi sa première sélection à Chiellini, qui dispute l’intégralité de la rencontre avec, à la clef, une victoire 1-0. Le défenseur sera rappelé à cinq reprises d’ici à la fin de la saison, laissant penser qu’il pourrait être l’une des surprises de ce bon vieux Marcello en vue de la Coupe du monde 2006.
Embrouilles avec les tifosi et but de la tête
En attendant, Chiellini apprend le métier et fait ses gammes. S’il fait preuve de capacités athlétiques indéniables, il doit encore progresser sur le plan défensif. La saison de la Fiorentina est compliquée. Le club doit lutter pour ne pas redescendre. Mondonico quitte ses fonctions après quelques journées et son remplaçant, Sergio Buso, ne fait pas long feu non plus, remplacé à son tour par Dino Zoff. Les entraîneurs se succèdent, mais Chiellini, lui, est toujours titulaire. Paradoxe : il est souvent considéré comme le bouc émissaire par les supporters, qui n’hésitent pas à lui mettre sur le dos la plupart des responsabilités sur les buts encaissés par la Fiorentina. Après un entraînement, certains « tifosi » étaient même venus l’attendre, et Chiellini, pas franchement un mec qu’on impressionne comme ça, avait failli en venir aux mains. En réponse, il inscrit un superbe but de la tête face à la Juventus, le 9 avril, pour un match nul final 3-3 contre ses anciens/futurs coéquipiers.
Grâce à un coup de collier lors du sprint final, la Fiorentina décroche finalement son maintien lors de la dernière journée, avec une victoire 3-0 face à Brescia. La mission est accomplie, et Giorgio est rappelé par la maison-mère. Fabio Capello le voulait dans son équipe depuis l’époque où il entraînait la Roma. Il le récupère donc à Turin, bien décidé à en faire un futur titulaire de l’arrière-garde juventina. Étrangement, son retour à la Juve coïncide avec l’arrêt de ses convocations en équipe nationale. Lippi ne l’appellera plus, et l’Italie remporte le Mondial 2006 sans lui. Il sera rappelé par son successeur, Roberto Donadoni, pour le premier match post-champion du monde, en août 2006.
De son passage à Florence, Chiellini garde, malgré la rivalité entre les deux clubs et les quelques problèmes avec les supporters, de très bons souvenirs. Au moment où il quitte le club florentin pour revenir à Turin, il affirme qu’il « doit tout à la Fiorentina » . Une déclaration qui n’avait pas franchement plu aux tifosi turinois, mais aussi à Renato Pretini, son mentor à Livourne. « L’entendre dire qu’il doit tout à la Fiorentina, c’est dur, affirmera-t-il quelques années plus tard dans le journal Il Tirreno. Je l’emmenais en voiture à tous les déplacements de Livourne, ses parents me l’avaient confié et je m’en occupais. C’est pendant ces interminables kilomètres de route que je lui ai expliqué toutes les malices du football. » Ah, tout s’explique…
Par Éric Maggiori