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Quand Benfica se paie un Grec
Pour venir à bout de l’immense Bayern Munich à l'Estadio de la Luz, Benfica pourra compter sur son duo grec Samaris-Mitroglou. Il faut dire que les Grecs et Benfica entretiennent une romance qui date d’une quinzaine d’années.
C’était il y a bientôt douze ans. Le 4 juillet 2004, la Grèce d’Angelos Charisteas braquait o Estádio da Luz (1-0) et remportait l’Euro devant un public médusé. La double défaite de cette année-là face aux Hellènes – qui avaient également remporté le match d’ouverture – a très vite amené le peuple portugais à éprouver une grande amertume à l’encontre de son bourreau. Seule la direction de Benfica a développé le syndrome de Stockholm – bien que Porto s’y soit aussi essayé avec Giourkas Seitaridis – non seulement en continuant de recruter dans le Sud-Est européen, mais en amplifiant ses recherches sur le territoire grec tout au long des dix dernières années.
En tout, six joueurs issus du peuple ennemi ont déjà porté la tunique rouge de Benfica, dont quatre depuis 2004. Comme Fernando Santos (futur sélectionneur de… la Grèce) en 2006-2007, Rui Vitória compte aujourd’hui deux Hellènes dans ses rangs, synonymes d’austérité – ironique -, de froideur et de réalisme, toujours bien utiles dans une équipe qui avait la réputation de beaucoup rater sous Jesus. Bref, de Fyssas à Mitroglou en passant par l’immense Karagounis, Benfica a démontré qu’avoir un bon Grec dans la besace était important pour tenir le coup une fois les grands rendez-vous venus.
Machairidis, le mauvais précurseur
Plus que le premier Hellène du SLB, Triantafylos Machairidis a été le premier Grec à évoluer en Liga portugaise. C’était au siècle dernier. En 1999-2000, à l’époque ou Karel Poborsky magnifiait encore la tunique encarnada frappée de l’inoubliable logo Telecel. Pour l’anecdote, le défenseur central, joueur absolument banal, a même été un Sergueï Semak avant l’heure. C’est après une double confrontation face au PAOK Salonique de Machairidis en Coupe de l’UEFA que Benfica décide de l’enrôler en janvier 2000, convaincu par les deux prestations livrées par le défenseur (qui loupe quand même un penalty synonyme de défaite du PAOK contre les Aigles au match retour). Grosse erreur. Si officiellement, le joueur dit ne « pas s’être adapté à la vie portugaise différente du quotidien grec » (Record, février 2014), la version officieuse veut que le Grec ait un peu trop apprécié les plages portugaises et abusé des plaisirs de la Sagres. Ce qui expliquerait que le club s’en soit débarrassé moins d’un an après son arrivée.
Takis Fyssas, premier titré
Ni le plus beau, ni le plus fort, ni le plus classe, l’international grec laisse tout de même au public benfiquista un souvenir sympathique, celui d’avoir fait partie de la première vraie équipe post crise des nineties, celle qui a renoué avec les titres et privé José Mourinho du quadruplé – que réalisera plus tard André Villas-Boas – en remportant la Coupe du Portugal 2003-2004. Takis Fyssas s’est d’ailleurs illustré à l’Estadio do Jamor ce jour-là en marquant le but égalisateur contre Porto qui débouchera sur la victoire finale du SLB. Moins présent l’année suivante, le champion d’Europe 2004 peut tout de même se targuer d’avoir remporté le championnat portugais en 2005 sous les ordres de Giovanni Trapattoni. Ce n’est pas un hasard si la Luz garde du Grec le souvenir d’un joueur porte-bonheur.
Katsouranis et Karagounis, frères d’armes
Malgré le départ de Fyssas en 2005, les dirigeants benfiquistas ont pris soin de garder leur taux de champions d’Europe de l’effectif intact. Un an après l’Euro, c’est au tour de Giorgos Karagounis de retrouver le stade qui lui a apporté tant de joie – bien qu’il n’ait pas pu jouer la finale en 2004. À l’époque, c’est un gros coup pour Benfica, même si le milieu de terrain a peu joué lors de son passage à l’Inter (comme n’importe quel bon joueur face à Veron, Zanetti et compagnie). Le club lisboète fera coup double en signant son pote Kostas Katsouranis, pur numéro 6 de profession, en 2006. Si le premier des deux a plus de talent, plus de ballon et donc plus de spectacle au bout de la chaussure, c’est néanmoins le second qui réussit à se mettre le public encarnado dans la poche.
Plus hargneux, plus complet et plus décisif, l’ancien de l’AEK Athènes plante la bagatelle de 15 banderilles sous les couleurs du SLB en trois exercices, là où son ami relayeur en inscrit trois fois moins en deux ans. Roublard, Katsouranis était réputé pour marquer quasiment exclusivement des buts moisis et/ou de la tête sur corner. Mais un but reste un but. Des deux membres de la plus belle paire grecque benfiquista à ce jour, de par sa complémentarité, seul le dernier réussit à repartir au pays avec un titre en poche, à savoir une petite Coupe de la Ligue, en 2009. À un an près, il gagnait aussi le championnat. Dommage. L’histoire retiendra que la paire KK s’est retrouvée au Panathinaikos en 2009 avant de permettre, dix ans après l’Euro, à la Grèce de marquer à nouveau l’histoire au Brésil. La lusophonie, sponsor officiel des exploits grecs.
Samaris et Mitroglou, les déménageurs
1m89 pour 82 kilos pour Andreas Samaris, 1m88 pour 86 kilos pour Kostas Mitroglou. Pour sa dernière cuvée grecque, Benfica n’a pas fait dans la dentelle. Non pas que les deux hommes soient des peintres balle au pied, loin s’en faut, ils apportent surtout cette supériorité physique qui faisait défaut à Benfica depuis les départs de Nemanja Matić et d’Óscar Cardozo. Après avoir traversé une période d’adaptation compliquée à leur arrivée dans l’embouchure du Tage – en 2014 pour Samaris et en 2015 pour Mitroglou -, les deux anciens de l’Olympiakos font aujourd’hui l’unanimité en Liga Nos.
Véritable couteau suisse, Samaris s’est déjà rendu utile en 6, au poste de relayeur, mais aussi en défense centrale, tandis que Mitroglou fait lui la paire avec Jonas en pointe. C’est même l’homme fort du moment. Le buteur de la sélection grecque devrait par ailleurs rejoindre définitivement le SLB lors du prochain mercato, lui qui est seulement prêté par Fulham, moyennant 7 millions d’euros. Mitroglou devrait d’autre part baisser son salaire de 2,3 millions à 1,8 million d’euros nets pour rester à Lisbonne jusqu’en 2020. Le public appréciera sans aucun doute.
Par William Pereira