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Pulisic, Captain Not America

Par Matthieu Darbas
5 minutes
Pulisic, Captain Not America

C’est peut-être l’un des surnoms les moins évidents de la planète foot : Christian Pulisic aka Captain America. Depuis qu'il y a fait ses premiers pas en 2016, l’attaquant de 24 ans symbolise le renouveau de la sélection américaine, sans pour autant jouer les meneurs d’hommes. Rien d’un super-héros.

Chacun son histoire préférée. Il y a celle de Marvel qui traverse les époques et relate l’acte héroïque de Steve Rogers, sombrant dans la glace à bord d’un vaisseau d’Hydra le 5 février 1945 pour sauver la planète. Et celle écrite mardi dernier par Christian Pulisic, donnant son corps pour la nation pour permettre aux siens de se qualifier en huitièmes de finale de cette Coupe du monde 2022. L’un restera endormi dans la glace pendant 70 ans. L’autre passera quelques heures à l’hôpital avant de ressortir presque indemne. Quoi qu’il en soit, les deux héros se font appeler de la même façon. Mais à la différence du vrai Captain America, Christian porte mal le costume.

J’espère que les gens qui nous regardent, surtout ceux aux USA, pourront se dire : « Ces gars-là donnent vraiment tous les uns pour les autres, pour ce pays », et c’est ce qui nous rend vraiment spéciaux.

Un bon soldat tout de même

« J’ai réussi à marquer, mais j’en ai payé le prix, confie Pulisic en conférence de presse, à deux jours du début des huitièmes de finale du Mondial ce samedi. Weston McKennie m’a donné un super ballon, je l’ai bien touché, mais j’ai surtout pris un genou, juste dans la zone du bassin. C’était évidemment très douloureux, mais je me sens mieux maintenant. J’espère que les gens qui nous regardent, surtout ceux aux USA, pourront se dire :« Ces gars-là donnent vraiment tous les uns pour les autres, pour ce pays », et c’est ce qui nous rend vraiment spéciaux. » Leader technique sur le terrain, le pensionnaire de Chelsea est bien rentré dans ce Mondial : une belle offrande sur le but de Timothy Weah lors de l’entrée en lice des États-Unis (1-1), une performance intéressante contre les Three Lions (0-0) et donc ce but face à l’Iran (0-1). Percutant sur le flanc gauche de l’attaque américaine, Pulisic enchaîne les bonnes copies et compte désormais 22 réalisations en 55 apparitions sous la tunique des Yanks. De quoi marquer un peu plus l’histoire de sa sélection après avoir été le plus jeune joueur à participer à un match de qualification pour la Coupe du monde et à marquer un but (17 ans et 253 jours).

Et pourtant, même avec tous ces artifices, rien ne colle avec la force, le charisme, la puissance et le caractère du super soldat des Avengers. « Pour être très honnête, je n’aime pas vraiment ce surnom », avait même révélé Pulisic dans les colonnes de GQen début d’année, assurant avoir été proche de la dépression en 2021 à la suite de la lourde pression autour de son rôle en sélection.« C’est beaucoup parfois. Quand je viens en équipe nationale, c’est toujours :« Comment ça se passe à Chelsea ? C’est quoi le problème ? Que se passe-t-il ? » Oui, c’est difficile. C’est dur », avait-il rajouté. Meilleur buteur de l’histoire des USA et aujourd’hui consultant pour CBS Sports, Clint Dempsey avait volé au secours de son ancien coéquipier : « Il y a beaucoup de joueurs qui n’ont pas réussi à s’imposer à Chelsea. Regardez Salah, De Bruyne ou même Lukaku… » Mais au-delà de cette difficulté à s’imposer sur le Vieux Continent, et donc à répondre aux attentes placées en lui, le feu follet de 24 ans n’endosse pas le rôle de meneur d’hommes de ce groupe.

Oui, Messi le fait avec l’Argentine. Oui, Ronaldo le fait pour le Portugal. Mais non, vous ne pouvez pas demander à ce gars de faire pareil que ces monstres avec les États-Unis. Nous devons être réalistes, chez nous c’est impossible.

Mais un simple soldat tout de même

« Oui, Messi le fait avec l’Argentine. Oui, Ronaldo le fait pour le Portugal. Mais non, vous ne pouvez pas demander à ce gars de faire pareil que ces monstres avec les États-Unis. Nous devons être réalistes, chez nous c’est impossible », a récemment déclaré Landon Donovan, du haut de ses 157 sélections, au micro de The Athletic. L’ancien joueur du LA Galaxy a beau lui aussi défendre la star de cette sélection, il y a quand même un problème dans cette histoire : difficile d’être capitaine sans brassard. « Avec nous, Tyler Adams remplit un rôle très spécifique. C’est le général. C’est le stratège. C’est le gars qui va à un endroit, n’importe où, pour montrer l’exemple. Quand il parle, les gens l’écoutent. » Voilà ce que le sélectionneur américain Gregg Berhalter a indiqué après le succès face à l’Iran le 29 novembre dernier (1-0).

Pour ce Mondial, c’est donc bien Tyler Adams qui porte le brassard de capitaine. Plus jeune d’une année, et avec pas moins de trente sélections au compteur, le milieu de terrain de Leeds semble mieux endosser les responsabilités de leadership. Vite convaincu, Donovan s’était même rendu compte que lorsque Pulisic avait célébré son but face à la Team Melli, « il semblait qu’il était soulagé. Et pas heureux. Ça n’était pas vraiment de la joie. Je connais ce sentiment, j’ai pu le voir sur son visage. » De quoi confirmer les dires de certains de ses anciens coéquipiers comme Geoff Cameron qui parle de Pulisic comme quelqu’un de « timide » et « très introverti » .

Alors, évidemment, si on ne connaît pas l’homme derrière le costume, difficile de comprendre la vague de critiques de certains admirateurs des Yanksautour du « LeBron James du soccer », surnom donné au jeune attaquant depuis une publication Instagram du King en juillet 2018.« Avec tout ça, je pense que parfois, je réfléchissais beaucoup trop et j’essayais d’exceller, alors que je n’étais déjà pas bon. Ce n’était pas nécessaire de se mettre cette pression, avait lancé Pulisic dans une interview pour ESPN en février dernier,mais ce qui est sûr c’est que je n’ai pas besoin de ça, et même de quoi que ce soit, pour faire mon travail correctement. » Non, absolument pas. Ni de pression ni d’un brassard, et encore moins d’un bouclier.

Dans cet article :
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