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Pukki, le Finlandais volant

Par Maxime Renaudet
Pukki, le Finlandais volant

Sacré meilleur joueur et meilleur buteur de Championship la saison dernière, Teemu Pukki est devenu la nouvelle idole de Carrow Road. Cette saison, avec six buts au compteur dont un triplé retentissant contre Newcastle, le Finlandais de Norwich City a déjà montré que l'échelon supérieur ne lui faisait pas peur. Pourtant, après ses échecs au FC Séville, à Schalke 04 et au Celtic, plus grand monde ne l'imaginait si haut.

Depuis qu’il a été élu président de la République, Emmanuel Macron reçoit régulièrement en cadeau des maillots de foot. Derniers en date : ceux de Rodez et de Clermont-Ferrand, début octobre. Quelques semaines auparavant, mi-septembre 2019, le Premier ministre finlandais, Antti Rinne avait, lui aussi, amené une tunique lors sa visite diplomatique à Paris. Celle de la sélection nationale finlandaise, floquée du numéro 10 et d’un nom qui ne doit pas dire grand-chose à Macron. Celui de Teemu Pukki, nouvelle idole des Huuhkajat. « Nous n’avons pas eu de joueurs comme Teemu depuis Jari Litmanen » , balance Niklas Kalatsev, son ami et voisin à Kotka, où ils ont joué ensemble en première division. « Il a marqué beaucoup de buts importants pour l’équipe nationale alors que quelques années avant, il était critiqué pour ses performances en sélection, notamment dans les journaux et sur Internet. » Mais tout ça n’est qu’une histoire ancienne. Car à 29 ans, en plus d’être le meilleur buteur des Canaries, Pukki est en passe de qualifier son pays pour l’Euro 2020, une première dans l’histoire de la Finlande.

Un pas en avant, deux pas en arrière

On peut parler là d’ascension fulgurante. De fait, Pukki a connu son premier moment de grâce un an auparavant, en septembre 2018. Le 8, il inscrit le seul but du match lors d’un Finlande-Hongrie en Ligue des nations. Trois jours plus tard, il récidive, en étant le seul buteur de Finlande-Estonie. De retour en club, le 15 septembre, il est à nouveau le buteur décisif d’un Norwich-Middlesbrough qui lance enfin la saison des Canaries, englués à une piteuse 17e place avec trois défaites, deux nuls et une seule victoire au compteur. Face à Boro, Pukki inscrit déjà son troisième pion en sept journées de Championship. Sept mois plus tard, après une saison couronnée de succès, le club de l’East Anglia retrouve enfin la Premier League. Surtout, en plus de terminer meilleur buteur de Championship devant Tammy Abraham et Neal Maupay avec 29 réalisations, Pukki est élu meilleur joueur de la saison. Devenant du même coup la nouvelle vedette de Carrow Road. Rien d’étonnant selon Dawda Bah, son coéquipier à Helsinki en 2010 : « Je n’ai jamais eu de doutes sur Pukki. Il a eu sa chance et il l’a saisie. Ce n’est pas une surprise qu’il en soit là aujourd’hui. »

Pourtant, la trajectoire de sa carrière n’a rien d’un parcours de santé. Car si tout avait bien débuté pour lui avec un premier but en première division finlandaise à seulement 17 ans, son départ au FC Séville à l’hiver 2008 est un véritable échec. Sa mère, Teijia, prend un an de congé pour venir vivre avec lui en Andalousie, mais la langue espagnole et sa timidité sont un frein à son adaptation. « À cette époque, c’était un beau transfert pour un Finlandais. Il était très jeune et c’était un gros club espagnol. Malgré tout, il a quand même réussi à devenir professionnel là-bas » , tempère Niko Ikävalko, qui a évolué avec lui à ses débuts à KooTeePee. Mais Pukki doit attendre six mois avant de jouer avec l’équipe B et six de plus pour jouer les vingt-sept et seules minutes de sa carrière en Liga, ne laissant qu’une impression lointaine au Français Abdoulaye Konko, qui l’a côtoyé en Andalousie : « Ça remonte à loin, mais je me souviens d’un petit blond, qui s’entraînait de temps en temps avec nous. À l’époque, ce n’était pas facile de se faire une place dans l’équipe première de Séville. »

No Pukki, No Party

Pukki parvient malgré tout à décrocher sa première sélection nationale, avant de s’engager avec le HJK Helsinki en août 2010. Aux côtés de Jari Litmanen et Mikael Forssel, Pukki – surnom finlandais du père Noël – se refait la cerise et retrouve sa confiance. Ce que confirme le Gambien Dawda Bah, son coéquipier de l’époque : « Teemu était déjà très très rapide à l’époque. Je jouais derrière lui et c’était un régal, car en plus d’être très rapide, c’était un joueur intelligent. Je lui ai offert pas mal de buts, mais en réalité, il n’avait pas besoin de moi pour marquer. » Cette saison-là, l’attaquant de 20 ans contribue largement au titre de champion de Finlande remporté par le club de la capitale. Ce dernier obtient le droit de jouer les tours préliminaires de Ligue Europa. L’occasion pour Teemu de marquer à trois reprises contre Schalke 04, poussant le club allemand à le recruter pour une bouchée de pain. Mais dans la Ruhr, son adaptation s’avère une nouvelle fois délicate.

La première saison, barré par Klaas-Jan Huntelaar et Raúl, il est titularisé à seulement cinq reprises en Bundesliga, pour autant de buts. L’exercice suivant n’est guère mieux, car il n’est présent que deux fois dans le onze de départ de Jens Keller. Heureusement, l’entraîneur allemand lui donne sa chance en Ligue des champions, et ses deux rencontres contre Montpellier, puis Galatasaray, lui permettent de taper dans l’œil du Celtic. Direction le champion d’Écosse en titre, mais là encore, Pukki n’arrive pas à s’imposer, la faute à un football britannique qu’il peine à assimiler. Après avoir quitté le onze de départ pour aller s’asseoir sur le banc, il signe à Brøndby pour se relancer. Au Danemark, ses deux premières saisons se passent bien, mais personne ne pense qu’il reviendra un jour sur le devant de la scène européenne. C’était compter sans Alexander Zorniger, ancien coach de Stuttgart qui débarque à la tête de Brøndby à l’été 2016. Les méthodes de l’entraîneur allemand correspondent parfaitement à Pukki, qui se relance et finit deux fois deuxième meilleur buteur du championnat danois. Donnant ainsi tort à l’entraîneur du Celtic Neil Lennon, qui avait déclaré qu’il n’allait « pas se transformer en Superman simplement parce qu’il a déménagé à Brøndby » .

Le GOAT de Noël

S’il ne s’est en effet pas transformé en Clark Kent, après quatre saisons réussie à Brøndby, et un nouveau statut en équipe nationale, Pukki décide de ne pas prolonger. Suivi de longue date par le directeur sportif de Norwich City, Stuart Webber, il file gratuitement chez les Canaries à l’été 2018. Le coach, Daniel Farke, l’aligne d’abord sur un côté ou en soutien de Jordan Rhodes, avant de le titulariser au poste de numéro neuf contre Middlesbrough, avec le succès que l’on connaît. À 28 ans, le père Noël finlandais se révèle aux yeux de l’Angleterre, et ses nouveaux supporters lui consacrent même une chanson calquée sur l’air de « Don’t You Want Me » du groupe anglais The Human League. Le Finlandais ne s’est toujours pas transformé en Superman, mais les fans des Canaries le considèrent déjà comme leur GOAT, un acronyme anglais qui lui va comme un gant puisqu’en finnois, Teemu signifie « chèvre » . De l’autre côté de la Mer du Nord, ses nombreux pions ne passent pas non plus inaperçus, et nombre de ses anciens coéquipiers ne ratent pas une miette de ses performances, Niklas Kalatsev le premier : « On n’est pas beaucoup resté en contact, mais je regarde tous ses matchs cette saison. Et l’année dernière, quand il jouait en Championship, j’ai regardé trois ou quatre matchs, ainsi que tous ses highlights. »

Encensé par Zlatan Ibrahimović après sa première saison en Angleterre, Pukki a remis ça à l’étage supérieur. Lors de la première journée contre Liverpool – club très suivi en Finlande à la suite des passages de Jari Litmanen et Sami Hyypiä -, il marque son premier but en Premier League malgré la défaite des siens (4-1). Le week-end suivant, face à Newcastle, il devient le premier joueur de Norwich à inscrire trois buts en Premier League depuis le quadruplé d’Efan Ekoku en 1993. Teemu se distingue encore lors de la défaite contre Chelsea, puis lors de la victoire saisissante des siens face à Manchester City. En équipe nationale, le natif de Kotka est également entré dans une autre dimension en marquant sept buts lors des huit derniers matchs de la Finlande, la propulsant à la deuxième place de son groupe derrière l’Italie. En club, s’il a marqué plus de 50% des buts de Norwich cette saison, lui et son équipe n’ont remporté que deux matchs en huit journées, pointant à une décevante 19e place malgré un jeu plein de promesses. Mais comme à l’accoutumée, l’humble Teemu garde son calme et sait que la chance va tourner. La même qui a permis à son drôle de nom de se retrouver dans le dressing d’Emmanuel Macron.

Dans cet article :
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Par Maxime Renaudet

Tous propos recueillis par MR.

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