- Coupe de la Ligue
- Quarts
- PSG-Guingamp (1-2)
PSG-Guingamp : et à la fin, c’est la Coupe de la Ligue qui perd
Les Guingampais ont réalisé un exploit. Qu'ils profitent de leur joie ! Mais soyons un peu réaliste, bien plus que le PSG, c'est la Coupe de la Ligue qui a perdu hier soir. Et qui aura bien du mal à s'en remettre.
La sensation inattendue de ce milieu de semaine s’est donc déroulée face aux caméras de France 3 Île-de-France. Dans un Parc des Princes clairsemé, les derniers du championnat se sont offert, à la photo finish sans même en passer par les tirs au but, le quasi déjà champion de France 2018-2019. Déterminés, à l’image d’un Marcus Thuram capable de retirer un penalty après avoir raté le premier et de le marquer finalement, les Guingampais demeurent indiscutablement les grands vainqueurs de cette rencontre, au-delà du score. Pas tant parce qu’ils pourraient dorénavant nourrir l’espoir de soulever le trophée à Lille ou rêver d’Europe. Il s’agit surtout d’une bouffée d’espoir et de confiance inespérée et inégalable pour une équipe qui reste à cinq points des barrages. Dans sa mission biblique, Gourvennec vient peut-être d’écrire la Genèse de son Pentateuque footballistique. Désormais, il peut redonner foi en un miracle annoncé à une formation en pleine rédemption. La Coupe de la Ligue n’est pas une fin en soi, elle constituait juste l’opportunité de frapper fort. Une concordance des temps et des lieux parfaite.
Un mal pour un bien pour Paris ?
Les Parisiens vont sûrement accuser le coup, et Tuchel avaler sa première grande désillusion à la tête du PSG. Un petit moment difficile à passer en interne, dans la presse, et en particulier sur les réseaux sociaux qui ne vont pas manquer l’occasion de brocarder ces arrogants qui règnent, et rien n’a changé de ce point de vue sur le foot français. Paris a trébuché. Il va vite se relever car, une fois digérée cette déception toute relative, surtout pour l’orgueil, les véritables échéances, celles pour lequel l’actuel effectif est construit, débarquent vite. Avec Manchester United en première ligne.
De fait, il n’y a qu’un seul et véritable perdant : la Coupe de la Ligue elle-même. Ce n’est guère un secret, la compétition peine à passionner. Son calendrier semble de trop, toujours calé dans les trous laissés aimablement par les autres.
Mal fagotée, elle n’avait qu’un seul atout à vendre : de grandes équipes pros, leurs stars, et pour tout dire, souvent la certitude d’aligner la meilleure en finale puis en lauréat (le PSG depuis 5 ans par exemple). Contrairement à la Coupe de France, son storytelling ne s’est jamais appuyé en rien sur une quelconque mythologie du « du petit contre le gros » . Encore moins sur le sympathique « Petit Poucet » , porte-drapeau du foot « d’en bas » qui, en pliant un adversaire quatre ou cinq divisions au-dessus, redonnerait en quelque sorte le ballon rond au peuple. La Coupe de France est une institution, la Coupe de la Ligue un team building.
Un accident industriel pour la Ligue
De ce point de vue, rien ne peut rapprocher, aussi bien concernant les conséquences sportives que la dimension symbolique, la chute de Paris en quarts de finale en Coupe de la Ligue de la piteuse sortie de l’OM face à Andrézieux en 32es de finale de Coupe de France. Et pas seulement au regard de la situation fort dissemblable des deux Goliath victimes de leur David respectif. Il n’existe aucune notion de revanche symbolique, encore moins de métaphore républicaine, dans la Coupe de la Ligue. Cette dernière n’existe que pour valoriser le capital du foot professionnel. L’élimination de Paris, mais aussi de Marseille et Lyon, sans parler de Lille, essore donc grandement son intérêt. Si tout le monde souhaite à Bordeaux voire Strasbourg inscrire leur nom au palmarès, on doute beaucoup qu’on ait sabré le champagne mercredi soir dans les bureaux ou les loges VIP des instances du foot.
Car cet accident industriel survient au pire moment pour cette compétition. La LFP est en pleine discussion de « gré à gré » avec les diffuseurs pour essayer d’en refourguer les droits, alors que l’appel d’offres a tourné au fiasco. Le football est devenu un luxe. Il a besoin de marques fortes et de produits d’appel pour pousser les médias à débourser des sommes indécentes. Il va donc falloir désormais tenter de vendre une Coupe de la Ligue où Neymar, Mbappé et autres pourraient disparaître avant les demi-finales. Quand la Ligue 1 s’arrache à 1 milliard d’euros avec l’assurance de proposer le même casting chaque semaine, les négociations vont sûrement prendre un tour très particulier dès jeudi matin. Cela repose surtout derechef la raison d’être de ce gadget made inLFP, qui n’offre plus d’accès direct en Coupe d’Europe, ne remplit pas les stades et ne figure pas vraiment dans l’agenda des supporters, sans parler de l’indifférence du quidam. Hier, les Guingampais ont peut-être enfoncé un premier clou dans le cercueil de cette Coupe de la Ligue.
Par Nicolas Kssis-Martov