- C1
- 8es
- PSG-Real Madrid (1-2)
Projet X
L'échec face au Real Madrid est aussi indiscutable que la nécessité de questionner la manière dont Paris veut construire son futur. Le PSG doit-il rajouter une couche de vernis sur cette table qu'il façonne depuis sept saisons, ou doit-il carrément la renverser ?
Qu’il est dur de voir une bête agoniser. Comme il fut dur de regarder le Paris Saint-Germain, aussi hagard et sonné qu’il l’était après le but de Casemiro, attendre un coup de sifflet pour abréger ses souffrances. Mais dès les secondes suivantes, et une fois passé le deuil d’un parcours anoblissant en Ligue des champions, doit se poser la question de la crédibilité du projet parisien et de la légitimité des dirigeants qatariens.
Les déceptions sportives doivent amener une vraie réflexion sur la viabilité des caps tels qu’ils sont fixés aujourd’hui. Car Paris ne pourra récolter une nouvelle fois de cette saison que les lauriers nationaux, au risque de se faire rembarrer d’un gotha européen qu’il ne regarde que de loin. La prestation du Real Madrid, et sa (ses ?) classe(s) d’écart avec le club français, ne peuvent qu’en attester.
Redescendre sur terre…
La défaite ce mardi soir face aux Madrilènes n’est peut-être pas aussi traumatisante que celle concédée face aux Barcelonais l’an dernier au même stade de la compétition. Le 6-1 venu de nulle part au Camp Nou hantera les esprits des supporters parisiens pendant plusieurs décennies encore. Mais ce match au Parc, ce mardi, risque de peser encore plus lourd à long terme. Face au Barça, les Parisiens avaient au moins montré leur force à l’aller, capables d’écraser un cador continental (4-0). La claque au retour, qui n’a existé qu’à la faveur d’un écroulement dans les ultimes minutes, fut aussi violente et cruelle que porteuses d’un vrai message pour le futur : Paris devra s’armer pour grandir.
En 2018, Paris est reparti frustré de Madrid, puni par le réalisme maximal des coéquipiers de Cristiano Ronaldo. Pire, il n’a même pas pu lutter chez lui face à une équipe remaniée d’un Real dans une mauvaise année. Même pas la possibilité de croire rien qu’un instant à l’exploit. La leçon n’a clairement pas été retenue et rien ne peut empêcher la remise en cause du niveau et des promesses de l’élève parigot. Ou quand les cauchemars succèdent au « Dream Bigger » .
… Pour ne pas creuser
Et au-delà du constat qui peut être fait à l’échelle d’un match, c’est clairement une stratégie sportive et managériale que Paris doit aujourd’hui complètement retravailler. Les masques mis sur les visages des hommes recrutés lors des derniers mercatos sont tombés ce soir. Unai Emery, investi parce qu’il avait déjà remporté trois coupes européennes, semble très loin du compte et n’a plus aucune ressource sous la main. Dani Alves était également censé apporter son expérience lors des soirées de gala, mais au poids des ans s’est ajoutée une suffisance qui paraît irrémédiable quant à son avenir dans ce projet. Mbappé n’a pas encore les épaules assez larges pour justifier à lui seul le coût de son transfert et doit encore mûrir avant d’être considéré comme un joueur majeur de sa formation. Lassana Diarra ? Il a débarqué cet hiver pour combler un besoin dans l’entrejeu parisien, sans qu’on fasse véritablement appel à lui lors de cette double confrontation. Tous ne sont pas forcément grillés par cet échec. Mais il faudra dès demain cravacher pour s’en relever, et les discours protecteurs ou évasifs de Nasser Al-Khelaïfi ne suffiront plus pour protéger ses ouailles.
Un seul échappera directement aux critiques cette semaine : Neymar Junior. Le Brésilien n’a certes pas répondu à toutes les attentes au Bernabéu. Mais il fera son retour une fois la tempête retombée, le championnat et une coupe en poche, et une Coupe du monde dans le viseur. Mais quand s’esquissera la saison suivante, lui aura-t-on donné suffisamment de garanties pour que Paris puisse devenir celui qu’il était censé être ce printemps ? Au moment d’aller signer un gros chèque pour recruter le prochain joueur censé faire entrer le PSG dans une nouvelle dimension, les dirigeants ne seront-ils pas à court d’arguments ? Tant d’interrogations qui flottent cette nuit au-dessus de la capitale et qui devront être rapidement clarifiées, avant que le convoité dernier carré ne soit qu’un trou creusé dans le sol.
Par Mathieu Rollinger