- Coupe de France
- 32es de finale
Profession : commentateurs d’amateurs
Ce dimanche, c'est multiplex « Au cœur des régions » sur France 3. Une occasion en or de voir des équipes amateurs squatter la petite lucarne, et une approche du commentaire un brin différente des grandes affiches internationales. Décryptage avec deux hommes aux manettes de ces retransmissions pas comme les autres : Kader Boudaoud et Patrick Montel.
Dans le jargon, on appelle ça des décrochages régionaux. À savoir un dispositif permettant à chaque antenne régionale de France 3 de diffuser son propre match, selon un intérêt dicté par la proximité. Sur France 3 Bretagne par exemple, quoi d’autre qu’un Stade rennais–Stade brestois ? Une galette-saucisse et une pinte de Coreff, exactement. Et sur les autres canaux ? Une offre éclectique permettant de croiser le Canet Roussillon FC commenté par Patrick Montel et Nicolas Gillet, l’ASF Andrézieux-Bouthéon, sur la pelouse de Geoffroy-Guichard, face à l’OM et sous les yeux d’Alou Diarra, ou encore Thierry Adam descendu de sa moto du Tour de France pour s’installer au Roazhon Park en compagnie de Stéphane Guivarc’h – et d’une galette-saucisse, donc. En résumé, un programme étiqueté terroir, loin des paillettes du football globalisé.
Une affaire de métier
De là à rendre le travail du commentateur plus facile ? Pas au premier abord pour Kader Boudaoud, aux manettes de l’affiche entre l’ASF et l’OM : « C’est plus facile de préparer Paris – Guingamp qu’Andrézieux – Marseille, commence le journaliste en charge du foot chez France Télévisions. Parce que je prépare Andrézieux de la même manière que le PSG ou l’OM, sauf qu’Andrézieux, c’est évidemment plus compliqué d’avoir des infos. » Alors, il va sur « trois, quatre, cinq sites » , révise les résultats récents, tombe sur des interviews. Quand ce n’est pas le métier qui parle : « Par exemple, Andrézieux est dans le groupe de Bergerac en National 2 et j’ai des copains là-bas. Je vais les appeler pour prendre des infos. » Ensuite vient la rencontre avec l’entraîneur, parfois les joueurs, la veille du match : « J’y vais avec une base bien avancée, l’âge, les poste, les parcours… Dans l’équipe d’Andrézieux, il y a le fils de l’entraîneur. Si tu arrives devant le mec et que tu ne le sais pas, tu n’as pas fait ton boulot ! »
Lorsqu’il se rendra au stade Gilbert-Brutus de Perpignan pour prendre le pouls de la rencontre entre le Canet Roussillon FC et l’AS Monaco, Patrick Montel aura, lui, une pointe de nostalgie. Un peu pour cet « antre du 13 (le rugby, N.D.L.R.), un sport qui m’est cher » . Et surtout parce que dans « tous ces clubs amateurs que j’ai la chance de côtoyer, je retrouve le football de naguère, quand on pouvait partir en vacances avec un joueur professionnel. Un truc inimaginable aujourd’hui ! » Et puis, ce sera au tour de l’expérience, encore une fois, d’entrer en jeu : « Le métier de journaliste, c’est de connaître les gens en une journée. À condition de les aimer, on peut le faire. Et c’est notre mission vis-à-vis de clubs qui ont tellement bataillé pour en arriver là. » Car une fois le match lancé, le risque est fort de n’avoir que 120 minutes, au mieux, pour faire découvrir au grand public les histoires traversant le 8e de la poule H de National 3.
Histoires, musique et poésie
Coup d’envoi, justement. Synonyme d’un certain relâchement pour Kader Boudaoud. Mais pas pour une question de pression : « Autant c’est plus difficile en préparation, autant ça devient plus facile en commentaires, car tu as souvent des histoires humaines, des destins un peu brisés, des trajectoires hésitantes. Ça, c’est intéressant à partager. » À condition de savoir reconnaître les acteurs en représentation : « J’ai une méthode qui me vient de Charles Biétry et Christophe Josse, avec qui j’ai commencé : je dispose les mecs sur une feuille dans la manière où ils jouent. Pas de photo hein, seulement nom, prénom, numéro, stats de base, histoire s’il y en a une. » Le temps de quelques minutes, c’est intégré : « Parce que tu repères aussi à l’attitude du joueur, son gabarit, sa manière de courir. Si tu l’as vu à l’entraînement la veille, c’est hyper rapide. »
Il y a la technique, puis il y a tout le reste. Kader Boudaoud appelle ça le tempo, parce que le match est une musique. Patrick Montel, lui, se raccroche aux lettres : « La poésie est forcément différente dans un Canet Roussillon-Monaco. C’est Reims contre El Biar, c’est une dimension épique propre à cette compétition, où Canet peut gagner aux tirs au but. Elle est là, la poésie, pas dans 86 passes et trois tacles glissés. » Quelque chose de plus large que la seule Coupe de France pour celui qui s’insurge contre les consignes et le formatage de « la jolie blonde avec le mec à la barbe de trois jours » : « Il faut laisser la poésie dans le football ! Si on enlève l’imagination, la création et la spontanéité, il ne reste que le nombre de kilomètres parcourus. C’est effrayant ! »
Un match de rêve
Reste une question, inévitable si l’on considère que l’aventure commence là où le format s’arrête : et les galères ? Aucune pour Montel, qui rêve seulement de commenter une qualif’ d’un petit pour voir « un vestiaire de gens complètement déjantés après une victoire héroïque » . Idem du côté de Boudaoud, qui se souvient au contraire d’une belle journée dans le Pas-de-Calais : « C’était la première édition duMatch de rêve, en 2012. L’équipe ayant réuni le plus de votes avait droit à un match filmé et commenté par la paire de la finale, en l’occurrence Emmanuel Petit et moi. La ville était décorée, la coupe était là, et nous, on commentait depuis une plateforme au-dessus de la buvette. C’était un village de 1 500 habitants, une main courante autour du terrain, les gens hallucinaient de voir la coupe de France et un champion du monde ! Ce sont des bons souvenirs, ouais. » Ce jour-là, Cambrai (DH) l’avait emporté 3-0 contre l’équipe d’Excellence qui le recevait. Le nom du bled ? Labeuvrière. Soit une promesse de troisième mi-temps arrosée à la magie de la Coupe de France.
Par Eric Carpentier
La programmation complète du multiplex "au cœur des régions" :
- ASF Andrézieux Bouthéon / Olympique de Marseille
En direct sur France 3 SAT, Aquitaine, Auvergne, Basse et Haute Normandie, Bourgogne, Centre-Val de Loire, Corse, Franche-Comté, Limousin, Paris Île-de-France, Poitou Charentes, Provence-Alpes, Rhône-Alpes.
Aux commentaires : Kader Boudaoud et Alou Diarra accompagnés de Claire Vocquier Ficot en bord de terrain.
- Canet Roussillon FC / AS Monaco FC
En direct sur France 3 Côte d'Azur, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées.
Aux commentaires : Patrick Montel et Nicolas Gillet.
- Stade rennais FC / Stade brestois 29
En direct sur France 3 Bretagne, Pays de la Loire.
Aux commentaires : Thierry Adam et Stéphane Guivarc'h.
- Grenoble Foot 38 / RC Strasbourg Alsace
En direct sur France 3 Alpes, Alsace.
Aux commentaires : Claude Eymard et Marinette Pichon.
- Stade de Reims / RC Lens
En direct sur France 3 Champagne Ardennes, Lorraine, Nord Pas de Calais, Picardie.
Aux commentaires : Rodolphe Gaudin et Toifilou Maoulida.
Partout en France, il sera possible, même pour les téléspectateurs n’habitant pas dans la zone de couverture des antennes régionales concernées, de suivre les matchs en direct et en intégralité sur le site France tv sport, ainsi que sur les antennes régionales de France 3, accessibles aux téléspectateurs au sein des offres de la plupart des opérateurs ADSL / câble / satellite.