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Prince Yaya de Monaco
À l’aube de la saison 2006/2007, Yaya Touré signe pour trois saisons à l’AS Monaco. L’Ivoirien n’en passera finalement qu’une seule, marquée par un paradoxe entre grosse satisfaction individuelle et année plus que blanche sur le plan collectif.
Double champion d’Espagne. Double champion d’Angleterre. Vainqueur de la Ligue des champions. Vainqueur de la Coupe d’Afrique des nations. Quadruple Ballon d’or africain. Si l’on devait résumer la carrière dorée de Yaya Touré en une poignée de mots, cela donnerait à peu près ça. De quoi imaginer que le joueur, considéré à juste titre comme l’un des tout meilleurs milieux de terrain jamais vu sur un terrain de football, était dès son plus jeune âge prédestiné à la gloire.
Pourtant, son arrivée en Ligue 1 à l’été 2006 se fait dans le plus grand des calmes. Yaya souffle à peine 22 bougies, et son nom résonne davantage comme celui du petit frère de Kolo, récent finaliste de la C1 avec Arsenal. « On ne le connaissait pas vraiment au départ… On savait juste qu’on allait avoir un grand milieu de terrain en renfort, qui venait de Grèce pour compléter l’effectif, se souvient Guillaume Warmuz, troisième gardien de l’AS Monaco et ancien champion de France avec le RC Lens. Quand je l’ai vu la première fois, il m’a fait penser à Marc-Vivien Foé. » Tiens, ça tombe bien : Yaya s’apprête aussi à devenir un symbole pour son continent.
Le souci Bölöni
Après une Coupe du monde allemande où les Éléphants sont tombés avec les honneurs dans le groupe de la mort, Yaya coûte 5,5 millions d’euros au Rocher. Le prix à payer pour s’offrir un milieu parti de l’Olympiakos comme un prince, avec un doublé coupe-championnat dans l’escarcelle. Et dès son arrivée en France, son projet est ficelé. « Dans ma tête, j’étais bien organisé, confie l’intéressé au Club du Dimanche en 2015. Il y avait un plan de carrière, je devais passer les étapes. Mon père, c’était un homme de l’armée. Quand je discutais avec lui, je trouvais cela bizarre quand ses soldats se braquaient devant lui, et quand il se braquait devant ses supérieurs. Lui me répondait : « Tu vois, c’est la hiérarchie. Pour être tout en haut, tu dois y parvenir étape par étape. » Je suivais ses conseils et je me suis plié à cela. » L’objectif, c’est donc d’être un titulaire en puissance dans un premier temps.
Une tâche pas si simple, puisque Lázló Bölöni ne lui donne pas sa pleine confiance. Évincé après onze journées, le technicien laisse Monaco dans une position de lanterne rouge au classement. Un début calamiteux pour l’ASM et Yaya Touré, qui souhaite briller avec le partenaire du club de ses débuts, l’Asec Mimosas. Depuis La Turbie, Warmuz participe aux entraînements collectifs. « Ce que j’ai vu, c’était un garçon agile des deux pieds et technique, se souvient Warmuz. Dans cette période, il dégageait une énorme puissance dans ses courses, il était très mobile. Même si Yaya est grand par la taille, il était capable de changer de rythme très rapidement comme le font les plus petits gabarits. Bref, c’était un profil ultra complet ! » Un profil auquel Laurent Banide donne les clés sans hésiter.
Le gentil bulldozer
Au sein de l’équipe, Yaya se fait une place définitive. Ses performances sur le terrain aident grandement à la remontée de l’équipe au classement, mais quand ses jambes sont en feu sur le terrain, sa tête reste froide avec le groupe. « J’avais eu l’occasion de connaître son frangin Kolo à Arsenal, qui était plus expressif dans le vestiaire, se rappelle Warmuz. Quand je parlais avec Yaya, c’était quelqu’un de discret, respectueux des cadres comme Flavio Roma, François Modesto ou même des papys comme moi (rires) ! Après, tu voyais que sa personnalité commençait à s’affirmer au fil du temps. » Et pour cause : sur les vingt-six journées post Bölöni, l’AS Monaco n’en perd que cinq. Avec un début de saison aussi catastrophique, le club de la Principauté termine sa saison dans le ventre mou de la Ligue 1.
De son côté, Yaya Touré s’est offert cinq buts et sept passes décisives, mais l’essentiel est ailleurs. Le FC Barcelone de Frank Rijkaard l’embauche pour 9 millions d’euros, les médias locaux lui collent l’étiquette de « Vieira du Barça » et le voilà à intégrer la philosophie de jeu catalane avec ses 187 centimètres et 78 kilos. L’occasion de reprendre sa quête de titres, mais de modifier quelque peu son naturel. « Avant de partir à Barcelone, il était plus svelte, analyse Warmuz. Son tour de taille s’est épaissi ensuite, j’imagine que c’est du fait de la musculation… En tout cas, je préférais ce Yaya de Monaco, plus technique et véloce, capable de changer de rythme de façon très brutale. C’était moins le cas à la fin de son passage au Barça et à City, où pendant ce temps-là, il s’est amélioré dans d’autres secteurs de jeu. » Tonton Yaya, qu’est-ce qu’il y a sous ton grand maillot ?
Par Antoine Donnarieix