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Primes à la casse

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Primes à la casse

Scandaleux, honteux, inacceptable ! On aura vraiment dépassé toutes les limites de l'indécence! Alors que les braises de l'annonce de Raymon Domenech - qui demande 3M d'euros d'indemnités de licenciement - sont encore tièdes, ses complices du fond du bus rebranchent l'allume-cigare en exigeant leurs primes.

Mais avouons-le, finalement, les primes on s’en tape. Ray-Strange on s’en tape aussi. Trop facile de taper sur ces bonasses de footballeurs. Comme de critiquer la permissivité des mœurs en allant en cachette aux putes. Encore une fois, on les expose sur la place publique. Certes leur maladresse et leur absence totale du sens de la communication, voire de culture politique, les plombent. Dur de pleurer sur leur sort. Mais de là à hurler avec les loups, qui mordent nos fesses de bien des manières plus dures que cette banale histoire de punition sur l’argent de poche ! Ces primes sont simplement le reflet d’une réalité : l’équipe de France représente aujourd’hui un business, une grosse affaire qui ne ressemble en rien à l’embryon qu’a pu connaître un Michel Platini en son temps, quand tout le monde s’insurgeait du spectacle d’un émir Koweitien intervenant en plein match de Coupe du Monde, des pétrodollars plein les poches. Aujourd’hui, les sponsors sont sur le terrain à chaque match, derrière le(s) joueur(s) de leur choix, sur un décor en plexiglas. Il est vrai qu’ils ont la politesse d’attendre 5 secondes après le coup de sifflet final…

La réalité, c’est que l’équipe de France a été privatisée en 1998, et que ça a fait moins de barouf que la privatisation de TF1. Le désintéressement, la beauté supposée du port du maillot bleu, le tout assorti d’une marseillaise beuglée avec enthousiasme à la commande : autant de slogans vides de sens et plus ou moins démagogiques ressortis du chapeau occasionnellement sur les conseils d’agences de communication bien renseignées. Une marque, ça se bosse les gars. Faut pas s’endormir. Sinon, un jour, on se fait gauler le marché. Carrefour, ils peuvent aller sur l’écologie si on déconne trop. Bah ouais… La réalité, c’est que dans l’histoire de Knysna, la Fédération se comporte comme toute boite digne de ce nom en 2010 : on saque les supposés responsables, on essaye de récupérer le plus de blé possible, on envoie un message de fermeté aux « actionnaires » pour éviter la chute de l’action. Et peu importe le droit du travail, les contrats signés, les éventuelles injustices ou dégâts humains. Y’a des priorités, c’est comme ça que ça marche. Les lois ne vont pas assez vite pour le business. Et avec un bon avocat, on s’en sort toujours avec un bon compromis.

« Footballeurs, voleurs, trop payés, privilégiés… » ?

Ces primes de qualification, les joueurs les méritent car elles sont contractuelles et non liées aux résultats et encore moins dépendantes de l’image guère reluisante qu’ils ont véhiculée en Afrique du Sud. Elles proviennent des sponsors, pas de l’argent public ni encore des cotisations des licenciés (à l’inverse du salaire de Domenech en tant que sélectionneur ou des frais de bouche des dirigeants de la Fédération). Alors pourquoi ces primes apparaissent-elles brutalement au centre du débat ? Bien sûr, surtout en période de crise, « les Français » n’aiment pas trop les personnes qui gagnent beaucoup d’argent, encore moins les sportifs. Alors quoi de plus facile que de relancer la polémique ? « Footballeurs, voleurs, trop payés, privilégiés… » . Surtout, après que le bon peuple se soit fait enfler en beauté sur les retraites, autant pointer du doigt quelques gugus qui n’ont toujours pas compris l’importance politique de leur cape et qui continuent de bafouiller leur leçon de civisme.

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C’est pourtant grâce aux joueurs que la Fédé a pu négocier de si beaux contrats avec telle ou telle marque. Grâce aux héros de 98, ceux qui ont emmené la France en finale à Berlin et ceux qui se sont qualifiés pour la Coupe du Monde en Afrique du Sud. Alors pourquoi devrait-on les priver de ce qu’ils ont mérité au nom d’une morale transcendantale, cette belle façade qui ressort dès qu’il s’agit de camoufler le reste ? Evidemment, Evra a commis une belle erreur. On ne s’engage pas renoncer à ses primes devant les caméras quand on est capitaine, pour ensuite laisser ses petits copains négocier comme des marchands de tapis le pourquoi du comment. Et les laisser se dépatouiller médiatiquement avec leur brutale envie de charité pour les bonnes œuvres (qui, pour leur culture générale, ont guichet ouvert toute l’année). Il n’empêche, le vrai débat de fond n’a pas été posé.

Salariés sans véritable pouvoir

Pourquoi ces satanés états généraux du foot n’ont-ils pas soulevé les vrais problèmes, notamment celui de la rémunération des sélectionnés et la mission de service public d’une Fédération. Il serait temps de formaliser un peu l’affaire. Pourquoi par exemple ne pas considérer que les revenus des sponsors doivent aller à un foot amateur qui va en avoir grandement besoin dans les années à venir et que les joueurs seront juste défrayés pour leur participation en EDF (une apparition en bleu apporte déjà suffisamment en plus-value sur le marché des transferts) ? Non, il y avait beaucoup plus urgent : pour le monde du football dit professionnel, il s’agissait de savoir comment profiter de la faiblesse du monde supposé amateur afin de prendre le pouvoir pour récupérer cette manne financière énorme qu’est l’équipe de France.

Qu’il est facile de toujours exiger des footeux une exemplarité éthique qui bizarrement ne s’impose guère dans d’autres secteurs de la société, ou certains comportement ont été infiniment plus dommageables au bien commun que la crise de puberté des Bleus dans leur bus. Etrangement, les bonnes âmes semblent oublier que les footballeurs gagnent en effet très bien leur vie, mais qu’ils restent d’abord des salariés sans véritable pouvoir. Enfants des milieux populaires, ils ne savent pas toujours se servir de leur popularité, à la différence des artistes, pour peser ou impressionner les gouvernants. Et contrairement à d’autres, ils ne dinent pas avec le Président au Fouquet’s, mais se font convoquer comme de sales gamins à l’Élysée.

Alors, qui est le plus obscène ? Des salariés réclamant l’application de leur contrat ou des acteurs privés se jetant sur un bien commun à la première faiblesse ? Un service public n’est pas une entreprise. Une entreprise n’est pas un service public. Les logiques diffèrent et imposent à leurs acteurs des choix qui sont parfois incompatibles. En d’autres termes plus familiers, on ne peut pas bouffer à tous les râteliers. C’est autour de cette extrême confusion entre logique publique et privée que se joue l’avenir de l’équipe de France.

Vikash Dhorasoo, Nicoals Kssis-Martov, Pierre Walfisz

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