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Presnel Kimpembe: après la faute de main, l’erreur de communication
72 heures après s’être désintégrés en plein vol face à Manchester United, les joueurs du PSG ont repris contact avec le monde réel via des communications qui se veulent sincères (Kimpembe, Mbappé), mais qui demeurent maladroites et précoces. Le fossé se creuse avec les supporters qui, aujourd’hui, ne veulent plus pardonner.
« Je ne sais pas si le but est vraiment de gagner des matchs ou d’être bon sur Instagram, Twitter, avoir des followers, faire des clics et avoir des . » Cette sortie de la légende Dirk Nowtizki, champion NBA 2011 avec Dallas, sur la nouvelle génération pourrait très bien s’appliquer à la vidéo de Presnel Kimpembe dévoilée samedi sur la chaîne YouTube de Bros Stories qui gère, entre autres, la communication du joueur. Scénarisée à souhait (noir et blanc, gros plans sur les mains, etc.), le défenseur central auteur de la main qui amène le penalty de Manchester United dans les arrêts de jeu se livre à un drôle d’exercice de mea culpa. Après ses excuses, on y apprend que les joueurs ont fait preuve de « beaucoup de suffisance par rapport au match aller » et « pris ce match à la légère » , avant d’affirmer que « ça n’arrivera plus jamais » . Cette sortie, qui part sans doute d’une bonne intention pour un joueur formé au club et très attaché à ses racines, arrive au plus mauvais moment. Depuis mercredi, un silence de deuil règne autour du PSG. Les supporters du PSG oscillent entre haine, colère, frustration, déception et doutes. Barcelone était un accident. Manchester n’en est pas un.
Pas maintenant, pas comme ça
Existait-il une solution idoine pour reprendre « contact » avec le monde réel ? Difficile à dire. Mais cette vidéo et le message véhiculé dedans n’étaient pas ce dont les supporters parisiens avaient besoin. Pas maintenant. Pas comme ça. En choisissant sa propre boîte de communication dans un exercice préparé plutôt que de choisir un média traditionnel qui apporterait le débat contradictoire, Presnel Kimpembe a choisi la communication pure et dure. Une solution de facilité, quelque part. Sincère pour certains, maladroite pour la grande majorité et qui donne encore l’impression que le club ne sait pas comment mener sa barque dans une période de tempête noire. Depuis mercredi, seul Antero Henrique a pris la parole publiquement, mais c’était pour fustiger la sortie nocturne d’Adrien Rabiot le soir du match… Un détail dont tout le monde se fout. Depuis, les joueurs utilisent les réseaux sociaux de leur propre initiative pour communiquer, et le club ne semble rien maîtriser, comme dépassé par les événements. Kylian Mbappé, lui, a choisi Téléfoot pour se livrer dans un exercice qui ressemble, malgré tout, à de la communication. Les joueurs ont sans doute besoin d’extérioriser ce cataclysme. De mettre des mots. D’expliquer l’inexplicable. Personne ne le nie, mais la cassure est immense.
« Qui me trompe une fois, honte à lui. Qui me trompe deux fois, honte à moi »
Quelle attitude adopter ? Le mutisme général sans doute. D’autant que le silence n’est pas un oubli. Contre Manchester United, les joueurs parisiens n’ont pas seulement perdu un match retour de Ligue des champions. Ils ont perdu la confiance de ceux qui les aiment et qui ne demandent rien en retour si ce n’est un minimum d’implication. De respect. De droiture. Dès lors, les expressions « suffisance » ou « pris ce match à la légère » sonnent comme des bombes auditives. Une trahison. À la limite, il aurait été plus compréhensible d’avancer une forme de peur deux ans après Barcelone. Ce serait humain au fond. Encore que. Mais de la suffisance et de la légèreté, non. C’est pire que tout. Et l’assumer publiquement dans un exercice de communication préparé tend à limiter la sincérité du message.
Depuis mercredi soir, les supporters du PSG n’ont pas envie d’entendre pourquoi ni comment le séisme est arrivé. Il est arrivé. Point. Il est donc difficile de pardonner, de refaire confiance, de s’aimer comme si la page allait être facile à tourner. Dans un couple, une faute grave peut être pardonnée. À la deuxième en général, chacun reprend sa liberté. Dans la vie d’un supporter, ce n’est malheureusement pas possible. Plus c’est dur, plus il reste accroché parce que c’est son sacerdoce. Il pardonnera peut-être, avec le temps. Il se relèvera sans doute. Mais il n’oubliera jamais. « Qui me trompe une fois, honte à lui. Qui me trompe deux fois, honte à moi. » Les joueurs du PSG regagneront, avec le temps, l’amour des leurs à l’endroit où ils ont tout perdu : sur le terrain. D’ici là, leur monde doit être le silence.
Par Mathieu Faure