Premier League : Où va Arsenal ?

Le 16 mai dernier, à la fin de la saison, comme un vulgaire petit caïd de Pétersbourg, Andreï Archavine s’est mêlé de la future campagne de recrutement d’un club où il est arrivé cinq mois plus tôt. L’impudent s’est carrément lâché : « Nous devons acheter cet été. Pas des joueurs qui ont un potentiel, des joueurs qui sont prêts dès maintenant, des joueurs comme moi. Il en faut deux ou trois. Si Arsenal veut gagner, il faut le faire. Nous sommes fatigués d’attendre. Actuellement, les jeunes joueurs viennent à Arsenal parce qu’ils considèrent que c’est une très grosse équipe. Mais si nous continuons à ne gagner aucun titre, les jeunes ne voudront plus venir » . Message reçu 5 sur 5 par Arsène Wenger ! Il n’a pour l’instant recruté aucun « joueurs qui sont prêts dès maintenant, des joueurs comme moi » . Tranquille, l’Arsouille : « Je suis plus concerné par le fait de mettre tout le monde au diapason physiquement, même si nous regardons en même temps les opportunités. Je regarderai les matchs de pré-saison pour voir ce dont on a réellement besoin et quand le moment viendra, nous agirons » . Sinon, Arsène s’est juste encore pris de passion pour un nouveau jeunot, Zezinho (17 ans), international brésilien junior. Le p’tit gars ne demande qu’à venir chez les Gunners et son transfert pas trop cher avoisinerait les 4 millions d’Euros. Donc, Andreï va devoir continuer d’attendre du renfort…

Où ça se corse, c’est que les départs de poids continuent. Senderos, pourtant considéré comme élément d’avenir (23 ans), a été prêté au Milan AC avec option d’achat qui pourrait être levée au bout d’un an. Mais c’est surtout le “choc” Kolo Touré, qui vient de rejoindre Adebayor à Manchester City pour 17, 4 millions d’Euros. Deux départs et deux gros trous dans l’effectif, en attaque et en défense centrale. Même s’il faut reconnaître que Kolo avait pris moins d’importance chez les Gunners la saison passée. Plus consistante, la piste très chaude qui enverrait Emmanuel Eboué à la Fiorentina… Si on prête un minimum d’attention aux rumeurs qui parlent aussi des probables transferts de Gallas, voire de Sylvestre, ça ferait rien de moins qu’une défense bien déplumée et privée de ressources. OK, le jeune Belge Thomas Vermaelen, venu d’Ajax au mercato, n’est pas inintéressant, mais il faut voir…

Dans un autre registre, on peut souligner l’indisponibilité chronique d’un Rosicky, absent des terrains depuis janvier 2008… Mais la grosse affaire, c’est bien sûr le cas Cesc Fabregas. Il a démenti toute velléité de départ tout au long du mois de juin dans la presse anglaise. Il faut dire que le joyau de Wenger (l’unique joyau ?) a subi les sollicitations persistantes. D’abord celles de Mourinho, à l’Inter, en mai, juste pour tâter le terrain. Et puis les approches plus déterminées de Florentino Perez pour le Real et de Laporta pour la Barça (la presse anglaise avait parlé d’une offre de 47M d’Euros du club blaugrana…).

Aux dernières nouvelles, Cesc resterait donc à Arsenal. Mais pour combien de temps encore ? A 22 ans et déjà six saisons chez les Gunners, il fait partie de cette baby-génération censée devoir émerger maintenant. Or, Arsenal ne gagne plus rien et semble au contraire stagner au sein du Big Four, dépassé par MU, Chelsea, voire Liverpool. La dernière victoire en championnat remonte à 2004, la dernière FA Cup à 2005 et en Ligue des Champions, l’amorce d’un déclin se dessine : après la finale de 2006, les Gunners ont échoué en 8ème puis en quarts cette saison. Une légère progression trompeuse, cette année, quand on se souvient du terrible duel contre MU (0-1 puis 1-3 à dom) et du jugement sans appel de Patrice Evra sur l’issue de la qualification mancunienne : « Onze hommes contre onze enfants » . Une formule qui avait choqué… parce qu’elle était vraie. Outre les limites de la stratégie des jeunes mise en place par Wenger (pauvre Kieran Gibbs…), on a surtout noté l’absence d’un vrai leader. Le départ d’un Mathieu Flamini l’an passé a finalement beaucoup plus compté que ça…

Cette saison, il s’est passé aussi trois événements indirects considérables dans la vie du club d’Arsenal. Premièrement, l’interview bazooka de Lassana Diarra le 10 avril dernier, où de Madrid, il a sérieusement écorné la réputation de “Wenger-formateur-de-jeunes” : « Ce que j’ai appris avec Arsène Wenger ? Rien. Il m’a seulement appris à douter de tout. Avec lui, je n’ai joué que quinze matchs. Ma relation avec lui n’était pas bonne. On ne peut pas s’entendre avec tout le monde, mais j’ai plus appris avec Mourinho. Lui me disait les choses en me regardant dans les yeux. Quand il y avait un problème, on en parlait. Wenger ne m’a pas adressé la parole jusqu’à ce que je lui dise que j’allais partir. Il parlait avec les autres, mais avec moi, non. Je me sens comme si je n’avais jamais joué à Arsenal. Si on ne m’en parle pas, j’oublie. C’est sorti de ma tête » .

Il y a eu ensuite le triomphe Thierry Henry : Titi a enfin gagné la Ligue des Champions ! Comme s’il fallait aller ailleurs pour décrocher enfin ce titre suprême que Wenger convoite depuis son arrivée à Londres. C’est le genre de fait marquant qui va à coup sûr faire réfléchir un Fabregas, voire un Van Persie ou même un Archavine à quitter Arsenal. Fabregas retournera de toute façon en Espagne, c’est écrit et il l’a laissé entendre. Si Arsenal continue de stagner, de ne plus remporter de titres, alors son retour au pays natal pourrait survenir plus tôt qu’Arsène le souhaite, lui qui en a fait son leader de jeu absolu.

Et enfin, justement, troisième événement : l’offre faite à Wenger de la part de Florentino Perez en mai dernier pour coacher le Real (on a parlé d’un salaire annuel de 12 millions d’Euros). On sait qu’Arsène a refusé… après avoir beaucoup “réfléchi” : « Évidemment, parce que je suis à un moment de ma carrière où je ne vais pas encore entraîner pendant dix ans. Je suis au club depuis douze ans et je n’ai pas envie de faire l’année de trop. J’ai refusé parce que j’ai construit une équipe jeune et j’aurais eu l’impression de ne pas aller au bout de mon travail. Je ne nie pas que ce sera une année décisive. Si on ne se mêle pas à la lutte pour le titre, il faudra tout reconstruire » . OK… Mais ça fait un bon bout de temps que Arsène Wenger (59 ans) annonce une saison à venir grandiose, avec des Baby Gunners enfin arrivés à maturité….