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Pourquoi personne ne doit recruter Lionel Messi
Annoncé proche de la rupture avec le Barça, Lionel Messi est un cœur à prendre. Mais peut-être aussi un boulet à traîner. Et si l'Argentin était en voie galopante de ringardisation ?
Dans la vie d’un homme, la trentaine est une drôle de tranche d’âge. Quand certains mûrissent naturellement en accueillant avec félicité le passage des ans, d’autres essaient de préserver plus que de raison leur statut de jeune cool, quitte à en devenir un tantinet gênants. À 33 piges, difficile de savoir dans quelle case on placera Lionel Messi la saison prochaine. L’Argentin, qui a annoncé à sa direction vouloir dire adiosà son Barcelone chéri, serait partant pour une nouvelle aventure footballistique avant de terminer sa brillante carrière professionnelle. Manchester City et quelques aventureux prétendants seraient possiblement sur le coup. À moins que tout le monde ne finisse par lâcher l’affaire, en n’accordant pas au natif de Rosario le bénéfice du doute. Après tout, à l’heure de faire péter la banque pour l’Argentin, une question se pose, inévitablement : et si recruter Lionel Messi était en réalité une fausse bonne idée ?
Le coût du Messi
Parlons d’abord salaire. Selon les révélations de Football Leaks relayées par Mediapart en janvier 2018, Lionel Messi toucherait autour de 100 millions d’euros bruts par an, hors bonus, soit 50 millions nets, au FC Barcelone. Par comparaison, et toujours selon les chiffres donnés par Football Leaks, le salaire réel de Neymar au PSG culminerait à environ 37 millions d’euros annuels. Affreusement élevé, le salaire de Messi n’est peut-être pour autant pas un obstacle pour des clubs de la trempe de Manchester City ou Manchester United, en admettant que les mensualités de l’Argentin permettent à ces formations de composer sans trop de casse avec les réglementations du fair-play financier. La question salariale, sauf si le joueur consent à une dévaluation substantielle de ses émoluments, met donc hors jeu un certain nombre de formations, sans non plus faire du sextuple Ballon d’or un écrin intouchable.
C’est plutôt l’intégration de Lionel Messi à un nouveau projet collectif qui peut éventuellement poser question. Qualifié par certains de petit dictateur du vestiaire d’un Barça qui s’était inféodé à son talent, l’Argentin pourrait avoir un statut délicat à gérer, s’il était amené à rejoindre une nouvelle écurie dans les mois à venir. D’un côté, lui sera apposé le statut de méga star qui lui colle irrémédiablement aux basques. De l’autre, il devra se greffer le plus organiquement possible à un onze qui ne voudra peut-être pas bouleverser son identité de jeu, pour un joueur à qui il reste deux à trois ans de football au plus haut niveau. Pep Guardiola, qui connaît bien Messi, aurait-il pour autant envie d’ajouter une aussi grande variable à l’équation virtuose (du moins en Premier League) qu’il a su mettre en forme à Manchester City ? Alors que des projections plus fantaisistes annoncent Messi en possible partance pour l’Inter, il est autant – sinon plus difficile – de se figurer Antonio Conte bouleverser pour l’Argentin son projet de jeu, basé sur une intensité physique maximale et un bloc équipe solidaire en toutes circonstances.
Le spectre de la ringardise
De quoi se demander si les gars de la race de Lionel Messi, parfaitement hors normes sur le plan technique, mais délestés d’efforts sur le plan défensif, ne sont pas un peu dépassés dans le football qui est en train de s’écrire sous nos yeux. Voir la Juve de Cristiano Ronaldo se faire sortir sans gloire de la Ligue des champions ces deux dernières saisons en faisant all in sur un joueur qui ne court quasiment que quand le ballon est dans les pieds de ses équipiers peut être une source de réflexion. Surtout quand les équipes qui ont remporté les deux dernières éditions de la C1 (Liverpool et le Bayern) partagent un style de jeu vertical, où le sacrifice au nom du collectif, le dépassement de fonction, le volume et l’intensité des courses offensives comme défensives, sont autant d’ingrédients indissociables de leurs succès continentaux. Deux clubs où les stars se partagent la gloire et les responsabilités, dans des équipes où le pouvoir, sur et en dehors du pré, semble plus horizontalement réparti. Rien à voir avec ce qu’a connu Messi au FC Barcelone ces dernières années, en somme. Ce dernier est-il pour autant devenu ringard pour le sommet européen ? Difficile à dire. Reste à voir si quelqu’un aura envie de payer très cher, pour pouvoir le savoir.
Par Adrien Candau