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Pourquoi n’y a-t-il pas de beach soccer à Rio ?

Par Côme Tessier
Pourquoi n’y a-t-il pas de beach soccer à Rio ?

Au vu du relatif anonymat du tournoi de football masculin des JO, notamment à cause de la priorité laissée aux clubs, la solution ne serait-elle pas de laisser un autre football prendre la relève ? Le beach soccer ne rêve que de ça. Mais pour l'heure, le CIO fait la sourde oreille.

En juillet dernier, le CIO a annoncé les nouveaux sports à intégrer au programme de Tokyo 2020, comme le surf, le karaté ou encore le retour du baseball et du softball. Des sports additionnels qui bénéficient en fait de leur popularité au Japon, comme le veut la nouvelle Charte olympique. Concernant le football, rien ne doit changer : un tournoi féminin classique et un tournoi masculin particulier qui ne doit pas concurrencer la Coupe du monde et, donc, intéresse peu. Le football semble manquer d’idées pour se renouveler. Il n’a pourtant qu’à ouvrir les yeux sur les pratiques quotidiennes des amateurs de ballon rond, autour du monde et dans les villes visitées par les Jeux olympiques, pour avoir des pistes. À Rio, avec la plage de Copacabana, n’y avait-il pas mieux qu’un vulgaire football à onze sur gazon ? Bien sûr, la solution était un joli tournoi de beach soccer. Un sport assez récent, formellement établi en 1992 et qui croît depuis à vitesse grand V : première Coupe du monde en 1995 et intégration à la FIFA neuf ans plus tard. Cependant, il manque un second souffle au beach soccer pour se développer ailleurs que sur le sable brésilien. Particulièrement en France, la discipline ne parvient plus à attirer suffisamment de public et de sponsors pour être moins confidentielle. Les JO étaient le bon moment pour mettre un coup de projo sur un sport « à la coule » qui a tout pour séduire. Peine perdue, le CIO n’en veut pas.

Lobby de Blatter et sourde oreille

Le gros problème pour devenir sport olympique, c’est qu’il faut se faire une place au profit d’un autre et être adoubé lors d’un vote dans un congrès olympique. Et il faut s’y prendre tôt. Pierre Ducrey, membre du CIO, explique les démarches dans une interview du comité olympique suisse. « La charte olympique impose un délai de sept ans pour qu’un nouveau sport soit inclus au programme olympique » . Avec pour critère fondamental : la place restante, donc. « Le programme des Jeux doit comprendre un noyau de 25 sports au moins, et 28 au plus. » Ainsi, à Buenos Aires en 2013, la lutte gréco-romaine s’est retrouvée sous la menace du squash ou du baseball, avant de sauver sa peau. Concernant le baseball, il y a bien eu une tentative pour l’inscrire dans le programme de Rio 2016. Un peu tardive. En 2011, Sepp Blatter veut jouer des coudes et tente d’influencer Jacques Rogge. En quelques mois, les fédérations de beach soccer sentent que l’évolution olympique peut aller dans leur sens. Sergei Anokhin, le président de la Fédération russe – alors championne du monde en titre après des années de domination brésilienne – estime à l’époque que son sport a « de réelles chances, parce que Pelé lui-même fait du lobby » . Et pas seulement par passion pour le ballon, mais aussi parce que le Brésil a des intérêts certains à voir le beach devenir un pourvoyeur de médailles, selon Anokhin. « Le Brésil a de véritables chances de médailles d’or dans très peu de sport, et avec le beach soccer il peut gagner. » Cela ne passe pas si loin du coup parfait. Carlos Nuzman, responsable de l’organisation des Jeux, est assez séduit par l’idée, comme le rapporte le site spécialisé Beachsoccer.com en 2011. « Le beach soccer comme sport olympique pour la première fois[…]au Brésil en 2016 est une belle idée. Je suis sûr que cela n’aurait que de bonnes répercussions auprès du sport et des fans. » Mais le CIO fait marche arrière bien vite et rejette le sport de plage par l’intermédiaire de Jacques Rogge, en juillet 2012, avec l’argument imparable : c’est trop tard. « Il n’est pas possible d’augmenter le nombre de sports pour 2016. » En fait, Rio ne bénéficie pas comme Tokyo de la nouvelle règle permettant l’inclusion de quatre sports en lien avec le lieu de l’Olympiade. Avec ce refus, Rogge enterre même les chances du beach soccer de participer au vote de Buenos Aires. Fermez le rang les mecs, oubliez, c’est pas pour vous les JO.

Un sport en demande

Le choix est d’autant plus dommageable qu’au niveau du public, le beach soccer aurait eu l’avantage d’attirer du monde, beaucoup de monde au Brésil, tout en étant un sport encore peu médiatisé, qui aurait pleinement profité de cette fenêtre ouverte pour sa promotion. Rien qu’en France, le football de plage demeure très confidentiel. La finale du championnat de France doit se contenter d’une « diffusion sur le site de la fédé » , comme le raconte Kévin Fonteneau du Vendée Fontenay Football, ce qui constitue une amélioration par rapport aux éditions précédentes. « Il y a quatre ou cinq ans, pour l’édition à St-Jean-de-Monts, il n’y avait personne. Maintenant, la fédé fait de la pub, essaye de ramener du monde. » Si le beach soccer doit être rendu olympique, c’est surtout parce qu’il s’agit d’un sport qui bénéficierait grandement de ce petit coup de pouce de la part du CIO, là où le foot a déjà une place médiatique majeure. Pour sa reconnaissance comme sport, ce pas serait nécessaire. « Je crois qu’il y a des mecs qui jouent au foot et qui ne font même pas le lien dans leur tête entre les moments où ils jouent sur la plage et le sport » , abonde Kévin Fonteneau, qui joue aussi en amateur et a commencé « pour rigoler » son premier championnat de France. « Quand on y prend goût, c’est un sport prenant. Ce ne sont pas les mêmes efforts, c’est très physique, et aussi spectaculaire. Avec l’habitude, on ne joue pratiquement plus au sol. » Ainsi, le beach soccer français montre bien ce qu’il manque pour en faire un sport olympique, et pourquoi son « olympisation » serait une bonne idée. Le sport est à un tournant, où il faut un surplus de structuration, de médiatisation, et que le projet soit pris à bras-le-corps au niveau des fédérations. « Pour les pays sans bord de mer, il commence à y avoir des terrains artificiels, mais c’est rare. Rio, c’était le moment ou jamais » d’inclure son sport et le rendre véritablement international, assure Kevin Fonteneau. À moins que Paris ne gagne le droit d’organiser les JO 2024. En discipline bonus, on pourrait bien y mettre le beach à Paris-Plage, non ?

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