Parce que la clique artésienne arrive à maturité
Grand amateur de pinard, Franck Haise considère sa troupe tel un Châteauneuf-du-Pape. Nul doute, la décantation arrive à son stade final. Et ce, malgré un jeu de chaises musicales qui n’a pas vraiment fait trembler les murs de la Gaillette. Jonathan Clauss sur la Canebière, Cheick Doucouré à Crystal Palace, on aurait pu croire Lens affaibli. Que nenni. Machado et Cabot (qui doit s’imposer) ont pris le relais dans le couloir, Salis Abdul Samed est la copie conforme de Doucouré, et devant, Openda promet de faire des ravages.
« Il faudra forcément reconstruire une partie du collectif, ça demande des ajustements et du temps », lâchait Haise fin mai. Après une
démonstration à Monaco et 7 points en trois journées (meilleur départ en Ligue 1 depuis 2004), le système de jeu et le groupe sont déjà affûtés et moins en déséquilibre défensivement. Devant eux en ce moment : le PSG et c’est tout.
Parce que Seko Fofana doit devenir le roi de l’Artois
Capable de se farcir l’ascension des 339 terrils du Nord Pas-de-Calais sans un seul point de côté, le stakhanoviste artésien sera la pièce maîtresse du retour en C1. Pierre angulaire du milieu, détonateur sur bon nombre de transitions, Seko Fofana flingue tous les os qui traînent sur son passage. 76 rencontres disputées avec Lens depuis son arrivée à l’été 2020, titulaire 70 fois, il a déjà délivré cette saison deux passes dé et inscrit un penalty, à Louis-II. Homme le plus courtisé du bassin minier, le taulier ivoirien va encore filer quelques frissons aux supporters jusqu’à la fin du mercato estival. Mais celui à qui on a dit qu’il déboulait dans
« un club de merde » lorsqu’il a rejoint Lens en provenance de l’Udinese (pour 10 millions d’euros) a encore quelques clapets à fermer. Pourquoi pas sur la plus belle des scènes du Vieux Continent ?
Parce que Yannick Cahuzac les poussera jusqu’au bout
Le néo-retraité des terrains ne pourra plus s’engueuler avec les arbitres sur la pelouse, quoique. Mais en décidant de le conserver et de l’intégrer au staff en tant qu’adjoint de Franck Haise, les dirigeants lensois ont eu le nez creux. Avec Jean-Louis Leca, le Corse est un indispensable de la cohésion du groupe. Et Cahuzac a
« pris le rôle à bras-le-corps », assure Haise.
« Au bout d’une semaine, on avait tous l’impression qu’il faisait partie du staff depuis plusieurs années. Son expérience d’entraîneur est courte, mais il a une grosse expérience de joueur. Il connaissait bien les méthodes de notre staff pour les avoir vécues presque trois ans, donc il avait une certaine avance. » Lens n’a pas de temps à perdre pour retrouver les sommets, c’est parfait.
Parce que Brice doit danser la Samba de ville en ville
Le destin et rien d’autre. Le 29 mai dernier, Brice Samba, alors portier de Nottingham Forest, sabre le champagne après la victoire en barrages à Wembley face à Huddersfield. Après 23 ans d’attente, Nottingham retrouve la Premier League, et il reste une année de contrat à l’international congolais. À l’autre bout du monde, quatre jours plus tard, Wuilker Faríñez chute à l’entraînement avec la sélection vénézuélienne. Rupture des ligaments croisés antérieurs du genou gauche pour celui qui devait devenir le numéro 1 des cages lensoises après une fine transition opérée avec Jean-Louis Leca. Samba, avec qui des premiers contacts avaient eu lieu plusieurs mois auparavant, devient une priorité absolue. Cinq millions d’euros, cinq ans de contrat, emballé c’est pesé. Samba acquiesce, son choix
« peut paraître surprenant », explique-t-il à
L’Équipe, mais
« quand on voit les deux dernières saisons de Lens, comment l’équipe joue, son public auquel je m’identifie, j’ai ressenti l’envie de venir ici ». Relance au pied, bras articulés façon Inspecteur Gadget, Brice Samba fait déjà l’unanimité et va filer des ordonnances pour soigner des maux de crâne à plus d’un attaquant de Ligue 1, et bientôt d’Europe.
Parce que Loïs Openda a le droit à une deuxième chance en C1
Le clin d’œil de l’histoire, ça a toujours son charme. Loïs Openda ne veut pas parler revanche, mais quand il a ouvert le score à Monaco samedi dernier – et au passage son compteur en L1 –, la moue de Philippe Clément sur le banc de l’ASM avait un léger goût de retour de bâton. C’est que quatre ans plus tôt, l’un n’avait pas vraiment filé sa chance à l’autre lorsque
les deux évoluaient à Bruges. Et les maigres apparitions en C1 ne l’ont pas aidé à s’installer. Openda est allé se refaire la cerise au Vitesse Arnhem, et Lens a posé 10 millions d’euros sur la table pour en faire son étendard offensif. Déjà en entente avec Pereira Da Costa, le petit prince de la Gaillette, et avec un profil opposé, mais complémentaire à Florian Sotoca, l’international belge a tout pour faire oublier Arnaud Kalimuendo parti à Rennes (12 buts la saison dernière) et devenir la coqueluche de Bollaert.
Parce que Franck est tellement à l’Haise dans son jeu
Trois fois la même compo en autant de matchs cette saison, Franck Haise n’avait jamais connu pareille régularité depuis la remontée en Ligue 1. Mieux, peu importe l’adversaire en face, il conserve ses principes et a pour le moment le choix du roi. Après avoir raté l’Europe de peu pour la deuxième année consécutive au printemps dernier, le féru d’œnologie insistait :
« L’ère actuelle avec une certaine forme de jeu reconnue et un état d’esprit affirmé doit être conservé. » Le gars est droit dans ses bottes, le collectif prime, et on ne voit pas bien qui Lens ne pourrait pas regarder dans les yeux cette saison. Mise sous pression, sortie de balle, dépassement de fonction, mouvement perpétuel, Lens est un bonbon à savourer. En préparation, l’Inter Milan est passée à la trappe, et West Ham a été tenu en échec. Les louanges à l’échelle nationale, c’est bien (notamment Pochettino, Galtier, Kovač, Clément ces deux dernières années), mais qui n’a pas envie de voir Haise se frotter à Guardiola ? Ou mieux, à Klopp, qu’il aimerait rencontrer en personne pour
« son humanité, la force qu’il semble avoir pour nouer une forte relation avec ses joueurs tout en y mêlant une énorme exigence ». On imagine déjà les deux s’enfilant un bon rouge dans les couloirs d’Anfield. Le meneur d’homme sang et or ne marchera jamais seul, alors qu’il emmène ses gaillards sur les pelouses de C1.
Parce que Bollaert attend ça depuis 20 piges
29 octobre 2002, Bollaert entre en éruption. Daniel Moreira et John Utaka scalpent l’AC Milan d’Inzaghi (2-1), futur champion d’Europe. Sans le savoir, les supporters lensois viennent d’assister à leur dernière rencontre de C1 à domicile. Depuis, de rares apparitions en C3, une Coupe Intertoto en 2005 et des années en Ligue 2 aussi noires que le charbon.
Les gamins de 20 ans n’ont jamais entendu la plus douce mélodie du football résonner dans leur temple. À l’époque, Jean-Paul Dambrine épluchait déjà ses patates des friteries Sensas, Gervais Martel était encore le boss, et le futur speaker du club, Sylvano, était dans le kop en Marek. Aujourd’hui, il est sur la pelouse. Alors à l’automne 2023, c’est lui qui enverra ce légendaire refrain sang et or : « Lensois, en Ligue des champions, Lensois en Ligue des champions ». Bon, après, il faudra s’armer de patience pour trouver des places parce qu’avec déjà 30 000 abonnés sur 38 000 places disponibles, les coutures de Bollaert ne tiendront pas longtemps…
Un PSG-Lens particulièrement sous tension