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Pourquoi le football est-il meilleur que l’amour ?

Par Adrien Ares-Rodríguez
4 minutes
Pourquoi le football est-il meilleur que l’amour ?

On vous moque, on vous vilipende, on vous exclut, on vous méprise. Tout ça parce que vous aimez le foot. Plus que tout. À vos yeux, rien ne surpasse un match de foot, même de Ligue 1. Et surtout pas l'amour, cet opium.

Opposer football et amour serait un grossier contre-sens. Le football, en tant que discipline, se nourrit de la passion que lui portent des millions d’individus à travers le monde contrairement au hockey subaquatique – sport dans lequel la France fait par ailleurs bonne figure. Comme en amour, la première fois est déterminante. Il y a toujours ce joueur ou ce club qui déclenche un sentiment nouveau, un premier émoi chaste. Dès lors, le sujet subjugué ne pourra se passer de sa dose hebdomadaire de matchs, allant même jusqu’à s’infliger de fades rencontres qualificatives pour la Ligue Europa ou des 32e tours de Coupe de France et ressentira un manque à l’heure des trêves. Au vrai, le football est un sport consubstantiel à l’amour qui le transcende et le dépasse jusqu’à atteindre une pureté originelle inégalée dans un monde libéral fait de liaisons intérimaires et de sex-friend. L’adoption d’un club de football, le faire sien et le chérir du premier souffle de la découverte au dernier, est un mariage irraisonné qui dure ; à l’inverse de bon nombre de couples qui portent en eux un compte à rebours qu’ils font mine d’ignorer et, présumant les forces qui les unissent, s’estiment capable de conjurer les coups de boutoir des années et le désir crépusculaire.

En football, l’œuvre destructrice du temps n’a pas voix au chapitre. La passion demeure intacte, d’une blancheur virginale, sur laquelle l’argent et le sponsoring à outrance ne sont qu’une coloration jaune, un aplat d’urine à la surface de la neige molle, gâchant à peine le tableau. Le charme de son « club de cœur » agira encore bien qu’il se laisse aller, qu’il prenne du ventre mou ou qu’il fasse moins d’efforts pour plaire. D’une fidélité sans faille, le supporter transi pardonnera tout ou presque. Car ne nous méprenons pas : il s’agit d’un amour à sens unique et – les latinistes le savent mieux que quiconque – passion vient du latin passio signifiant souffrir ou endurer. Cependant, en football, les chagrins d’amour restent inoffensifs, sorte de pincements au cœur ou de brûlures indiennes.

L’orgasme du but

Libidineux sceptiques et priapiques zélés s’interrogent : quid du sexe ? Certes, il s’agit d’une déclinaison incontournable de l’amour qu’en apparence le football ne peut détrôner, tant elle réserve plaisirs chez les plus débrouillards des parties honteuses. En préambule, il serait aisé de citer Serge Gainsbourg (cf. Je t’aime moi non plus, Melody Nelson Publishing, 1969) : « L’amour physique est sans issue. » Toutefois, le football promet également une gamme complète de paraphilies : le frotteurisme est-il recherché par les supporters des stades ? Collectionner de façon compulsive des cartes Panini ne confine-t-il pas au fétichisme ? Enfin, se coltiner un déplacement en bus jusqu’à Mulhouse, y assister à un match emmerdant de National sous un ciel bas ne voisine-t-il pas avec le masochisme ? Malheureusement, tout porte à le croire. À l’heure de la puberté, les pin-ups lascives l’emportent sur les posters Onze Mondial d’Emmanuel Petit, sans que l’on sache si le dégoût du catogan ou les hormones en ébullition expliquent ce changement.

La confrontation entre football et sexualité est inévitable, mais tend à se confondre par la suite : nombre de supporters et de joueurs finissent par comparer un but à un orgasme, comme quoi même le miséreux sexuel goûtera aux glapissements d’extase devant un match. À la seule exception du 0 à 0. Galbes et cambrures émoustillantes laisseront de marbre l’amateur de ce sport car, durant 90 minutes, le football demeure la bagatelle la plus sérieuse au monde, pour paraphraser l’ouvrage de Christian Bromberger. En guise de conclusion, nous pourrions prendre l’exemple des enfants, qu’ils soient la cause d’un oubli de contraceptif idoine, la survivance d’un coup d’un soir ou le fruit d’un amour sincère. Ainsi, neuf mois après l’écrasante victoire barcelonaise à Madrid et le but d’Iniesta face à Chelsea, la Catalogne connaissait un baby-boom avec une hausse de 45% des naissances. Trêve de philosophie de comptoir et de verbiage, la sentence vient de la science. Oui, le football est meilleur que l’amour. Mieux, il le provoque.

PS : Faites-nous profiter de votre prose dans les commentaires. Voilà un beau sujet de dissertation, et vous avez la nuit devant vous. Vous ne pourrez aller aux toilettes qu’au bout d’une heure. On vous rappelle que l’usage des smartphones ou de calculatrice est interdit. On espère que vous avez relu Luc Ferry et Pascal Bruckner.

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Par Adrien Ares-Rodríguez

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