- Foot & Golf
- Ryder Cup 2018
Pourquoi le football est-il meilleur que le golf ?
Pour la première fois de l'histoire du golf, la Ryder Cup se joue en France. Le parcours de l'Albatros est tondu de près, une fan zone dressée sur le parvis de la mairie de Paris et les caméras braquées sur Tiger Woods. Le souci, c'est que rien de tout ça ne vaut un Guingamp-Bordeaux. Sauf peut-être le prix des tickets.
Opposer football et golf serait un grossier contre-sens. Pire, les deux activités – évacuons d’entrée le terme de « sport » pour qualifier le golf, cette « randonnée de quatre heures en tapant des balles » – devraient selon certains être considérées comme cousines : origines britanniques communes, goût partagé pour le gazon ras et objectif identique, celui de foutre une balle au fond. James II d’Écosse ne s’y serait d’ailleurs pas trompé, interdisant dans un même Act of Parliament golf et football, accusés de détourner les hommes de l’archerie indispensable à la défense du royaume. À se demander ce qui est passé par la tête de ce good old James ce jour-là. Car en réalité, tout oppose football et golf : à gauche, un sport collectif, créatif et universel ; à droite, un passe-temps de promeneur en goguette. D’un côté l’essuie-tout indispensable au quotidien, de l’autre la serviette en dentelle sortie pour les dîners trop longs.
Et cette année, l’invitation est lancée par ce bon vieux Charles-Edouard de la Renardière. « La Ryder Cup ! » s’extasie celui qui trouve Paul Pogba surcoté, avant de reprendre le fil de sa discussion sur les chaussettes Gammarelli. À croire qu’il n’a pas bien observé le swing du grand Paul face à la Croatie. Et en même temps, difficile de le lui reprocher : voilà un coup trop instinctif pour un homme habitué à passer de longues minutes devant un Bubba Watson ajustant son adresse au drive, avant de s’esquinter les yeux à essayer de suivre une petite balle blanche perdue de vue, pour finalement applaudir poliment un birdie. À moins qu’il ne s’agisse du putt victorieux de Tiger Woods, mais on parle alors du Pelé de la discipline. Ou de l’Ashley Cole, c’est selon.
The moment Tiger Woods won. CHILLS.? @teryngregson pic.twitter.com/Z4sVLkrUTr
— SB Nation (@SBNation) 23 septembre 2018
Quelques heures avant le come back du Tigre à East Lake, le Roudourou proposait lui à son entraîneur de « changer de club » , dans une inspiration impensable le long des fairways. Sauf que c’est oublier un peu vite une variable pas anodine, même pour Kombouaré (lanterne rouge et Bluegreen de Pléneuf-Val-André), Laurent Blanc (3-5-2 et handicap 8) ou Dany Boon (Raid dingue et ambassadeur de la Ryder française) : le prix. Parce qu’à 14 clubs le sac complet et 175 boules le fer Mizuno Tour, se prendre pour Jack Nicklaus coûte autrement plus cher que la jouer comme Motta. Sans oublier un green fee à faire d’un five à Paris une bonne affaire. Et non, malgré les apparences, n’avoir besoin que d’un seul gant, d’un pull sans manches, de chaussures de bowling et d’une casquette sans couronne ne fera pas baisser la note.
Quoi qu’en disent les partisans de la démocratisation, David Ginola en tête (Bulgarie et absence de Français à la Ryder Cup), l’extension du domaine de la lutte se poursuit jusqu’après la partie. 19e trou au Club House vs 3e mi-temps au PMU, c’est aussi la lutte des glass entre champagne frais et lager bas de gamme. Soyons clair : on ne reproche pas au golf d’être élitiste, pas plus qu’on ne cantonne le football à sa dimension populaire. On dit juste qu’une pinte éclate une flûte, et que si Balesteros avait pu être ton prof, les sumos feraient du saut à la perche.
Par Eric Carpentier