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Pourquoi l’absence de Touré est une bonne chose pour City
Le géant ivoirien ne sera pas rétabli pour affronter le Real Madrid en demi-finale aller de la Ligue des champions. Une bonne chose pour son club plus que pour la formation espagnole.
Yaya Touré devait briser la malédiction. Une série étrange qui allait permettre à certains d’alimenter des théories fumeuses. Depuis le sacre de Chelsea en 2012 porté par Didier Drogba, aucune équipe ne s’est présentée dans le dernier carré de la plus prestigieuse des compétitions européennes avec un Africain dans son équipe type. Comme Thomas à l’Atlético et Iheanacho, également à City, ne mettront pas à l’amende Koke et le Kun, cela va faire quatre éditions consécutives alors qu’il y avait Seydou Keita en 2011 avec Barcelone et bien évidemment Sameto’o avec l’Inter en 2010.
Pour être complet, il y en a eu, mais il s’agissait plus de joueurs de complément (Essien avec le Real, Benatia avec le Bayern, Asamoah avec la Juve, Song à Barcelone et enfin Salah, Ba et Eto’o à Chelsea). Yaya Touré est, lui, une figure emblématique de Manchester City. Un club qu’il rejoint en 2010 et avec lequel il gagne la Cup dès la première saison. Il met le but décisif en demi-finales, puis le but de la victoire en finale. Derrière, un Community Shield, deux championnats, et deux Coupes de la Ligue, dont la dernière cette saison, où il est encore là pour mettre le dernier tir au but. Mais il ne faut pas se tromper : son absence, annoncée par Manuel Pellegrini en conférence de presse d’avant-match, est du petit lait pour le coach chilien.
À trois au milieu au début pour faire le boulot de deux
Car comme toutes les légendes, que ce soit Raúl au Real Madrid ou plus récemment Francesco Totti à la Roma, au bout d’un moment, ça commence à devenir encombrant, et pas seulement dans la grille des salaires. Au départ, à Barcelone, Yaya Touré était la pointe basse du triangle de Guardiola. Peut-être parce qu’il sent le danger Sergio Busquets, il accepte d’emprunter le pont d’or offert par City. Ses exigences sont alors tout autres, il veut être relayeur. Qu’à cela ne tienne, Roberto Mancini le fait jouer avec Nigel de Jong et Gareth Barry au milieu.
L’année suivante, pour le premier titre, l’Italien leur dit qu’ils sont gentils, mais qu’ils peuvent très bien faire à deux le travail qu’ils font à trois. Il faut faire de la place à Nasri et Silva sur les côtés, puis Balotelli et Agüero devant. Deux ans plus tard, l’équipe rafle à nouveau la mise. Touré est toujours dans un milieu à deux, associé cette fois-ci à Fernandinho, un parfait complément besogneux. Mais la formule ne tient plus deux ans plus tard.
Trop offensif pour la récupération, trop lent pour un poste plus offensif
Désormais, Yaya Touré est aligné en numéro 10 dans un 4-2-3-1. Un rêve, un aboutissement ? Juste du pragmatisme de son entraîneur qui a dû faire avec bien des blessures cette saison dans le domaine offensif (Nasri, De Bruyne, Silva) et un constat que l’Ivoirien n’a plus trop de lucidité à 33 ans si on lui demande un peu trop de travail défensif. Quitte à bricoler, Pellegrini préfère voir Touré un cran plus haut, croisant les doigts pour que sa relation exceptionnelle avec Kun Agüero fasse la différence et donc l’intégralité du jeu offensif des Citizens. Mais la confrontation contre le Paris Saint-Germain a changé la donne. Cela coïncide avec le retour de Kevin De Bruyne, qui a changé le visage de son équipe, également revenu dans la course au podium en Premier League.
Avec Silva, Navas et Agüero devant, c’est le retour du City offensif avec un quatuor extrêmement mobile et du jeu dans les petits périmètres. Pour équilibrer le tout, la doublette Fernandinho-Fernando a brûlé son passeport sans état d’âme et fait le sale boulot à la récupération. Dans cette configuration, Yaya Touré n’a donc plus trop sa place. Mais cette histoire de blessures permet de ménager son ego, et de ne pas mettre trop de pression sur ceux qui sont amenés à prendre son poste. Comme ça, s’il est rétabli pour le retour, il pourra toujours entrer en cours de partie, s’il faut faire la différence sur un coup de patte. De l’art de savoir entretenir une légende. Ce n’est pas Totti qui dira le contraire.
Par Romain Canuti