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Pourquoi la Juventus va perdre son premier match ce soir
Si elle n’est plus en tête de son championnat, la Juventus demeure la seule équipe invaincue en Europe cette saison. Oui, sauf que cette invincibilité va s’arrêter ce soir, sur la pelouse de la Fiorentina. Ce n’est pas nous qui le disons. C’est le destin.
Parce que 1998, c’est beaucoup trop loin
1998. La France remporte la Coupe du Monde, Titanic apparaît sur les écrans français, le préfet Erignac est assassiné et la ligne 14 est inaugurée à Paris. Ouais, c’était le siècle d’avant. Mais 1998, c’est aussi l’année de la dernière victoire de la Fiorentina à domicile contre la Juve en Serie A. Quatorze années de disette. Intolérable pour les supporters florentins qui, c’est bien connu, haïssent bien comme il faut la Juventus. Rivalité historique oblige, la Fio n’a désormais plus le choix : elle doit gagner. Et si elle ne le fait pas pour ses supporters, qu’elle le fasse au moins pour Batigol, le dernier à avoir permis à la Viola de s’imposer. Le siècle d’avant, putain.
Parce que c’est la 28ème journée
La 28ème journée, c’est celle qui vient juste après la 27ème. Or, 27 et 28, ce sont des chiffres qui hantent les supporters de la Juventus depuis 2006. 27 : le nombre de Scudetti gagnés par la Juventus, selon les grandes instances du football italien. Mais pas pour les tifosi. Pour eux, le 28ème, remporté en 2005, et le 29ème, glané en 2006, leur appartiennent aussi. Mais Antonio Conte n’en a que faire. Lui se plie aux décisions, et clame haut et fort qu’il veut ramener à Turin le 28ème titre. Il semble donc évident que ce numéro 28 n’est pas anodin. Tiens, d’ailleurs, la saison dernière, lors de la 28ème journée, la Juve avait perdu contre le Milan AC (0-1). La numérologie ne trahit jamais.
Parce qu’Antonio Conte n’aime pas les mathématiques
La numérologie est une chose. L’arithmétique en est une autre. Et si la première est un ensemble de croyances, la seconde est une science. Une vraie. Posons, ici même, l’équation de la première défaite de la Juventus. (27 matches sans défaite + 7 pénaltys non sifflés + 1 coupe de cheveux de Jovetic – 11 défaites de la Fiorentina cette saison) x (le nombre de buts d’Amauri + le nombre de buts de Borriello) + le nombre de buts encaissés par la Fiorentina en championnat = 28. Bah ouais, 28. Encore et toujours. Coïncidence ?
Parce que la Juve déteste croiser la route d’un ex
La Juve et ses anciennes conquêtes, c’est toujours une drôle d’histoire. Qui finit souvent en eau de boudin. Et il suffit de remonter à la saison dernière pour s’en convaincre. Les Turinois se débarrassent de Giovinco, qu’ils refourguent à Parme. Bien vu. Juventus-Parme : Giovinco claque deux buts et les Parmesans s’imposent 4-1. Au match retour, Parme gagne encore, 1-0. Un but de ? Giovinco. Et devinez donc qui est l’attaquant de la Fiorentina ? Non non, pas Giovinco. Pire. Amauri. Ce Amauri, arrivé à Turin en héros, et reparti en moins que rien. L’Italo-brésilien, qui n’a pas encore marqué avec la Fiorentina, mise sa saison sur ce match.
Parce que Roberto Baggio
Parce que Roberto Baggio, c’est le symbole de la haine entre les deux clubs. Le mec qui est parti pour la Juve en 1990, après cinq saisons à la Fiorentina. Sauf que Baggio, il a toujours préféré la Viola à la Vieille Dame. L’année de son arrivée, il avait refusé de tirer un péno contre son ancien club et demandé à sortir du terrain. Au final, la Fiorentina l’avait emporté d’un petit 1-0. Cette fois-ci, une seule issue possible. Chiellini étant le seul ex florentin de l’effectif, et vu qu’il ne tire pas les penalties, il va donc se faire exclure. Et provoquer un péno. Donc 1-0 pour la Fio. CQFD.
Parce qu’en Italie, on n’aime pas ceux qui créent des polémiques (si, en fait, on adore ça)
Chiellini qui balance Ibra. Conte qui réclame des pénos à tout va. Les dirigeants de la Vieille Dame qui pointent du doigt les « erreurs » arbitrales en leur défaveur. Et la contestation à son paroxysme avec le « silenzio stampa » décrété suite à la dernière rencontre de championnat face au Genoa. A force de réclamer, la Juve va recevoir. En fait, la Fédération a déjà sévi. C’est Bergonzi qui arbitrera la rencontre. Pas un tendre, le type : c’est lui qui a refilé deux cartons rouges lors du dernier derby romain. Déjà un signe. Buffon expulsé à la 7ème (comme Stekelenburg avant lui) pour un accrochage dans la surface, Chiellini à la 86ème (comme Scaloni avant lui) pour un tacle par derrière. Ah, Bergonzi c’est aussi le mec qui a expulsé Conte il y a quelques semaines lors du match contre Bologne. C’est écrit, la Juve finira à 9. Ou 8. Le rêve d’un illustre florentin, il s’appelait Socrates.
Parce qu’Antonio Conte veut respecter l’histoire
Conte, le coach de la Juve, est un esthète. En bon esthète, il aime les belles choses, et il tente de les respecter. Ainsi, le voilà obligé de respecter l’histoire de la Serie A, et d’en respecter la première grande équipe de l’histoire : le Genoa. En 1922-23, les Génois réalisent un championnat parfait (à l’époque baptisé Prima Divisione) qu’ils terminent à la première position, avec zéro défaite au compteur. En tout, donc, 28 matches sans la moindre défaite. Conte et la Juve en sont cette saison à 27. Ce serait tout de même bête de réécrire les lignes d’une histoire qui tient depuis près de 90 ans.
Parce que le violet est la couleur de la frustration sexuelle
Le violet, couleur aux significations multiples. Celle de la noblesse ou de la jalousie. Aussi celle de la frustration sexuelle. Alors toute excitée qu’elle est par l’enjeu d’un titre qui lui échappe depuis 2006 (heu non, 2003…) la Juventus veut gagner un truc, tirer un trait sur ses deux dernières saisons pourraves terminées à la septième place de Serie A. Mais voilà que sur sa route, elle va devoir se frotter à la malédiction du violet. Et attention à l’alliance de couleur malsaine : selon les plus éminents spécialistes, « l’association du rose avec le violet est à exclure en tous points dans sa tenue vestimentaire » . Il est de quelle couleur au fait le maillot extérieur de la Juve ?
Parce qu’Artemio Franchi est mort à Sienne
Artemio Franchi est un ancien président de la Fédération Italienne de Football. Pourquoi parler de lui ? Parce que les stades de Florence et Sienne portent son nom. La raison est simple, le dirigeant est né à Florence et mort à Sienne. Antonio Conte l’entraîneur, lui, est « né » à Sienne. De fait, c’est dans la petite bourgade toscane qu’il a commencé à coacher comme adjoint en 2005/2006, et qu’il s’est affirmé la saison dernière. Alors le parallèle est facile. L’invincibilité de Conte va mourir à Florence.
Parce que l’Artemio Franchi tout court
Pour la première fois de la saison, la Fiorentina jouera à domicile, avec un public tout acquis à sa cause. Etrange de dire ça, mais dans une saison terne, les travées de l’Artemio sont vides. Un calme sinistre qui ne s’estompe qu’avec les contestations ponctuelles des plus fervents supporters en direction de la présidence Viola. Alors le temps d’un match, 30 000 tifosi (record d’affluence attendu pour la saison) oublieront d’insulter leurs dirigeants pour se concentrer sur les « gobbi » , comme ils les appellent. Les 11 juventini présents sur la pelouse vont en prendre plein les oreilles : le « Juve, Juve, pezzo di merda » sera de circonstance, Conte fera mieux de rester sur son banc s’il souhaite conserver ses implants. La Juve peut s’attendre à l’enfer. Ou pas?
Parce que
Et puis c’est tout.
Eric Maggiori et Alexandre Pauwels