- Course au Ballon d’or 2018
Pourquoi Griezmann doit arrêter de parler du Ballon d’or
« Je rêve du Ballon d’or. » À un mois du dénouement, Antoine Griezmann a répété une énième fois dans les médias son désir d’être le premier Ballon d’or à ne s’appeler ni Messi ni Ronaldo depuis 10 ans. Et si cette auto-promo se révélait surtout contre-productive ?
Bâillon : bandeau ou tampon que l’on met sur ou dans la bouche de quelqu’un pour l’empêcher de parler, de crier. Antoine Griezmann ferait bien de relire plusieurs fois cette définition donnée par le Larousse la prochaine fois qu’il sera tenté de répondre à une question sur le Ballon d’or. Une nouvelle fois, le joueur de l’Atlético de Madrid a rappelé son désir, en sortant les violons, de gagner le trophée de France Football dans une interview télévisée donnée à la branche espagnole d’ESPN. Depuis cet été, plus que jamais et plus que quiconque, Grizou fait la tournée des popotes pour faire sa publicité et son propre lobbying. Si on peut faire partie de ces gens qui considèrent que gagner un Ballon d’or ne représente vraiment pas grand-chose à côté de soulever une Coupe du monde ou des titres majeurs avec son club, il faut aussi admettre et accepter que la récompense la plus individuelle et individualiste du foot depuis sa création puisse obnubiler certains joueurs, a fortiori les attaquants vedettes de chaque époque.
Le hic, c’est qu’on a quand même l’impression qu’Antoine Griezmann en fait beaucoup plus que les autres à ce sujet. Qu’il en ferait même un peu trop. Et que fatalement, cela pourrait s’avérer contre-productif. On ne parle pas de frites, mais on finit par se demander si ce n’est pas ceux qui en parlent le moins qui en gagneront le plus. Là où Antoine Griezmann se laisse avoir sur les questions portant sur le Ballon d’or – à moins qu’il accepte ces interviews pour pouvoir en parler, ce qui est peut-être même plus probable… – et multiplie les coups médiatiques à ce sujet, on entend quand même beaucoup moins les autres. Que ce soit Cristiano Ronaldo, Luka Modrić, Kylian Mbappé ou Raphaël Varane, qu’on voit moins s’épancher sur la chose.
Malgré son doublé en finale de la Ligue Europa et sa Coupe du monde exemplaire dans le jeu comme sur le terrain des statistiques, Grizzi semble accuser un retard face au palmarès de Raphaël Varane (Ligue des champions, Coupe du monde et même le soutien de Michel Platini, qu’on comptera comme un titre) ou aux coups d’éclat fréquents de Kylian Mbappé dont les images font régulièrement le tour du monde. Mais l’excès de communication risque surtout d’accroître sa déception – aussi appelé « syndrome Ribéry 2013 » – s’il n’est pas récompensé le 3 décembre prochain. D’ici fin novembre et la clôture des votes, Antoine Griezmann devrait plutôt continuer à porter l’Atlético vers les sommets tout en éludant le sujet du Ballon d’or dans les médias. Parce que le terrain dira mieux que lui sa légitimité, qui est réelle, à remporter enfin ce trophée deux ans après être monté sur le podium. Et que le silence aussi peut être d’or.
Pierre Maturana