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Pourquoi diable s’intéresser à ce Belgique-Islande ?
Tranquillement installé dans le top 5 mondial, le quart-de-finaliste du dernier Mondial met ce soir sa crédibilité en jeu contre une équipe qui lui ressemble : l'Islande. Un match amical qui n'en a que le nom. Pour plusieurs raisons.
Parce que deux équipes qui se ressemblent se détestent forcément
Exil forcé, climat pourri, génération dorée. Ceci n’est pas l’attaque d’un reportage de Bernard de La Villardière sur les faubourgs de Reykjavik, mais bien les points communs entre deux sélections qui partageraient donc plus de choses qu’elles ne le croient. Au vrai, l’Islande a encore un peu de retard sur la Belgique. Parce que, comme l’Islandais, le championnat belge est tout pourri, mais pas autant quand même. En Islande, on parle d’un championnat 100% amateur, en Belgique, on parle d’un championnat d’amateurs dans lequel évolue des pros. Nuance. Derrière, il est vrai que les conséquences sont peu ou prou les mêmes. Comme leurs lointains voisins septentrionaux, les meilleurs joueurs évoluant au pays sont dès leur plus jeune âge contraint à l’exil pour avoir une chance de faire une vraie carrière. Résultats des courses, dans le onze qu’alignera ce soir Lars Lagerbäck, aucun joueur n’évolue encore en Islande. En Belgique, cela fait plusieurs années que c’est le cas. Et puis, il y a ce terme trop souvent usurpé de génération dorée. Pourtant, comme la Belgique il y a quelques années, l’Islande peut, elle aussi, compter sur quelques joueurs prometteurs dispatchés aux quatre coins de l’Europe (Ajax, Krasnodar, Real Sociedad, Swansea) et qui accumulent les résultats probants en sélection. Mais là aussi, la Belgique a un temps d’avance et sait que le délai d’attente entre les premiers frissons et le vrai bonheur est parfois long. Entre l’éclosion de Fellaini, Defour, Mirallas et Dembele en sélection et la qualification des Belges pour le Mondial brésilien, il s’est quand même écoulé six ans. Le temps de louper un Mondial et un Euro. Et puis, il y a la météo. Mais doit-on rappeler que le climat tempéré maritime propre à la Belgique ressemble à une destination de vacances rêvée pour tout Islandais ?
Parce qu’on ne sait pas quelle équipe soutiendront les Guðjohnsen
Il y a le père, Arnór Guðjohnsen, 277 matchs et 12 saisons passées à arpenter le championnat belge, et puis il y a le fils, Eidur Guðjohnsen, une enfance passée en Belgique entre ses 6 et ses 11 ans et une pré-retraite en cours dans la morne plaine brugeoise. Il y a donc manifestement un truc entre les Guðjohnsen et la Belgique. À côté de cela, les Guðjohnsen père et fils totalisent à eux deux plus de 150 matchs avec la sélection islandaise. Parmi ceux-ci, aucun contre la Belgique puisque la dernière opposition entre les deux nations remonte à 1977, mais une opposition historique contre l’Estonie où le fils remplacera le père à la mi-temps. Des belles histoires de famille qui ont forcément élevé la doublette au rang de star au pays. Mais, diable, alors pourquoi Eidur Guðjohnsen, un homme qui a défendu les couleurs de Chelsea, du Barça, mais aussi de la moitié des clubs de Premier League, s’est-il un moment retrouvé à décrépir sur le banc du FC Bruges ? Il n’y aurait en fait pas d’autres raisons que l’amour du froid. Le froid polaire pour Reykjavik, l’ambiance glaciale des longues soirées d’hiver pour Bruges. Un amour impossible, mais bien réel.
Parce qu’on va revoir les dents du bonheur de Christian Benteke
« On n’a vu que ses dents blanches tant il est heureux de nous retrouver après toutes les galères qu’il a connues. » Marc Wilmots témoigne, il y a des périodes dans sa vie qu’il est parfois préférable d’oublier. Celle allant du 29 mars 2014 à aujourd’hui en fait certainement partie pour Christian Benteke. Après avoir flambé pendant un an et demi avec Aston Villa, celui qui s’était imposé comme le premier choix de Marc Wilmots en pointe de son 4-3-3 est devenu le grand poissard du football belge. La faute à une blessure à la con survenue à l’entraînement à quelques semaines seulement du début de ce qui aurait dû être son Mondial. Aujourd’hui, Benteke rejoue, mais n’a pas encore retrouvé le sourire. Normal, il n’a pas encore marqué le moindre but depuis son retour (en 265 minutes de jeu) et Aston Villa reste sur six défaites consécutives. De quoi vous faire petit à petit péter une durite. Son carton rouge pris la semaine dernière contre Tottenham en atteste. L’homme est frustré, énervé, mais sent surtout le souffle de ses concurrents dans son dos. En sept mois sur la touche, Benteke n’a pas seulement loupé un Mondial, il a aussi vu Romelu Lukaku rejoindre définitivement Everton pour la coquette somme de 35 millions et Divock Origi signer à Liverpool après avoir bluffé tout le monde au Brésil. Deux challengers de taille, pour un joueur dans le creux, ça fait beaucoup. Mais ce soir, Wilmots l’a promis, Christian Benteke sera titulaire. Chez lui, en Belgique, et contre l’Islande. C’est sûr, il va sourire. Juste une fois.
Parce que Birkir Bjarnason et Roland Duchâtelet
On le sait, depuis juin 2011 et le rachat du Standard de Liège par Roland Duchâtelet, le club royal ressemble plus à une entreprise qu’à un club de foot à proprement parler. Et s’il y en a bien un qui résume à lui seul cette politique sportive douteuse, c’est bien Birkir Bjarnason. Arrivé gratuitement en janvier 2012, celui qui est déjà à l’époque international islandais ne sera titularisé qu’à 4 reprises en cinq mois avec les Rouches avant d’être prêté puis vendu au club de Pescara. Le tout grâce à un but inscrit à Valenciennes contre l’équipe de France. Résultat des courses : 900 000 euros de bénéfices pour le Standard. Sans conteste le plus beau coup de l’ère Duchâtelet. Aujourd’hui, Birkir est un indéboulonnable de Lagerbäck, mais évolue en Serie B. Ce soir, on parierait bien que le businessman belge sera en tribunes. Pour se rappeler son heureux fait d’armes, et pour serrer une dernière fois la pogne de son idole.
Parce que la Belgique va perdre
Ils ne sont que cinq. Cinq pays désireux de jouer un maximum de matchs en un minimum de temps. Parmi eux, il y a les Pays-Bas, la Turquie, la Croatie, mais aussi la Belgique et l’Islande. Cinq équipes qui n’ont manifestement pas peur de la surcharge physique inutile occasionnée par des joutes amicales sans intérêt et qui ont donc organisé une rencontre 48 heures seulement après leurs retrouvailles et quatre jours avant de disputer dimanche un match officiel. Pour la Belgique, la route vers l’Euro passera par la réception du pays de Galles, pour l’Islande ce sera un déplacement en République tchèque. En Belgique, on se pose logiquement la question des bienfaits réels de ce type de rendez-vous. Et à bien y regarder, il est en effet possible de s’interroger. Sur les 25 joueurs sélectionnés par Marc Wilmots, 19 jouent la Coupe d’Europe toutes les semaines avec leurs clubs respectifs et comptent donc sur les doigts d’une main leurs jours de repos sur une saison. Pour calmer la fronde populaire, Marc Wilmots a donc annoncé dès jeudi dernier que Christian Benteke, un des six à ne pas jouer de CE, et Moussa Dembele, en manque de temps de jeu avec Tottenham, seraient tous deux titulaires. Une manière policée d’avouer à son opposant islandais que les Diables chercheront avant tout à se préserver en vue de dimanche. Le tout en se privant notamment de Kevin De Bruyne. Leur meilleur joueur. La Belgique va donc perdre.
Par Martin Grimberghs, à Bruxelles